Guerre en Ukraine : pertes énormes, ville en ruine… pourquoi Russes et Ukrainiens s’acharnent-ils autour de – LaDepeche.fr

La ville de Bakhmut, sur la ligne de front du Donbass, est le théâtre d’une lutte acharnée depuis des mois entre Russes et Ukrainiens. La bataille, coûteuse en hommes, ne se solde que par des avancées de quelques dizaines de mètres à peine. 

Pendant que l’Ukraine multipliait les succès autour de Kharkiv et à Kherson, c’est la Russie qui était à l’offensive autour de la ville de Bakhmut, y compris avec le groupe Wagner. La pression était telle que le président Zelensky la qualifiait de zone “la plus difficile” pour son armée en octobre. La ville n’est cependant pas tombée, et est aujourd’hui en grande partie détruite.

Un objectif militaire caduc

Selon Cédric Mas, historien militaire, président de l’Institut Action Résilience et avocat au barreau de Marseille, “cette bataille dans les alentours de la ville concentrerait plus de la moitié des pertes actuelles sur le front, bien que donner des chiffres clairs soit évidemment impossible”.

Quels gains peuvent justifier de telles pertes ? D’après l’historien militaire, “la bataille pour Bakhmut dure depuis l’été, et qui dit longue bataille dit changement d’objectif. À l’origine, les combats autour de la ville survenaient suite à la percée russe de Popasna. La prise de Bakhmut par les Russes aurait remis en cause le dispositif ukrainien dans le ‘saillant’ de Kramatorsk”, zone de forts combats pendant plusieurs mois.

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Cependant, comme le souligne Cédric Mas, “la contre-offensive ukrainienne vers Izium et Lyman a détruit le ‘saillant’. La raison des combats est maintenant plutôt symbolique, avec la nécessité vitale d’une victoire russe, à Bakhmut plutôt qu’ailleurs, puisque c’est le seul endroit où les unités rassemblées leur permettent d’attaquer.”

Une ville symbolique pour les deux camps

Les Ukrainiens acceptent cependant cet engagement russe, au prix de pertes élevées. “Du côté ukrainien, on peut distinguer deux aspects, juge le président de l’Institut Action Résilience . Il y a déjà une forme de contre-symbole qui vise à priver l’adversaire d’une victoire à Bakhmut. La ville devient importante politiquement puisque l’adversaire l’estime importante. Il y a également la volonté de ne pas lâcher un pouce de terrain. On a constaté des situations où les soldats ne voulaient pas se replier malgré les ordres, donc abandonner la ville pourrait être mal perçu”, résume l’expert en stratégie militaire. 

Les deux côtés acceptent donc cette bataille, vue comme un moyen d’affaiblir l’adversaire. “Les Russes espèrent probablement créer une bataille d’usure en piégeant l’Ukraine dans une lutte coûteuse et en les empêchant d’attaquer ailleurs, estime Cédric Mas. On peut juger que les Ukrainiens ont une approche similaire de leur côté : il est pour l’instant impossible de savoir qui l’emportera.”