Coronavirus : contre le « bien commun », Sanofi oppose la nécessité de financer ses nouveaux vaccins – Le Monde

Pour une fois, tout le monde politique est d’accord. Du Parti socialiste à l’Elysée, on s’échange le même élément de langage : la santé est un « bien commun ». Mantra prononcé avant ou après s’être indigné des propos tenus par Paul Hudson, le directeur général de Sanofi, qui expliquait sans complexe, dans un entretien publié mercredi 13 mai par l’agence Bloomberg, que les autorités américaines ayant investi massivement dans la recherche pour l’éventuel vaccin contre le Covid-19, les Etats-Unis seraient servis en premier – c’est-à-dire quelques jours, ou semaines, avant l’Europe.

Tollé immédiat. Sur Twitter, Edouard Philippe a signalé avoir rappelé le principe de « l’égal accès de tous au vaccin » à Serge Weinberg, le président de Sanofi, une entreprise que le premier ministre qualifie de « profondément française ». C’est oublier un peu vite que le laboratoire, l’un des meilleurs spécialistes des vaccins, possède des sites de production dans 32 pays, compte 62,7 % d’investisseurs étrangers à son capital, et ne réalise que 6 % de son chiffre d’affaires en France. Quant à Emmanuel Macron, il a convoqué Paul Hudson à l’Elysée mardi 19 mai pour « avancer ».

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Sanofi n’a jamais fait mystère des aides publiques américaines dont il bénéficie. « En temps normal, il faut plus de dix ans pour développer un vaccin ; là, on essaie de le faire en dix-huit mois, explique le président de Sanofi France, Olivier Bogillot. Aux Etats-Unis, où nous sommes fortement implantés, l’agence Barda [autorité américaine pour la recherche et le développement biomédical avancé] est le meilleur interlocuteur en contexte de crise pour augmenter les capacités de production. Elle nous a passé des précommandes pour que l’on puisse acheter dès à présent des matières premières, par exemple. » Cette agence américaine a été fondée en 2006 pour soutenir les laboratoires privés dans la lutte contre les pandémies. En février, elle a versé un premier acompte de 30 millions de dollars (28 millions d’euros) à Sanofi. En parallèle, l’agence a déjà apporté 483 millions de dollars à Moderna, une biotech qui travaille sur un autre vaccin.

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« Les Etats-Unis autorisent, aux yeux des grands groupes pharmaceutiques, des mécanismes financiers public-privé efficaces et rapides », précise El Mouhoub Mouhoud, professeur d’économie à l’université Paris-Dauphine. Sur le Vieux Continent, pas de Barda, « pas de guichet unique, regrette M. Bogillot. On travaille en multipliant les discussions bilatérales ».

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