Télécoms : l’UE veut faire payer les géants du numérique

Télécoms : l'UE veut faire payer les géants du numérique

La question fait figure de vieux serpent de mer dans le monde des télécoms. Pourquoi les opérateurs devraient-ils supporter seuls la charge financière du déploiement et de la maintenance de la fibre optique et des réseaux 5G, alors que ce sont d’autres acteurs qui en tirent l’essentiel du bénéfice ? A savoir, les géants du numérique et les spécialistes du streaming tels que Netflix, Disney+, YouTube ou TikTok, grands consommateurs de bande passante.

Commissaire européen en charge du marché intérieur, Thierry Breton a résumé la situation en publiant un tweet associant une capture d’écran avec des affiches de films disponibles sur les plateformes. Une manière d’illustrer le lancement par la Commission européenne d’une consultation publique sur l’avenir des futures infrastructures de connectivité.

La Commission chiffre à environ 174 milliards d’euros les besoins d’investissement d’ici à 2030. Pour parachever la couverture en très haut débit, mais surtout pour se doter d’une « connectivité gigabit » permettant de supporter les nouveaux cas d’usage du métavers, de l’internet des objets, de blockchain ou de l’intelligence artificielle. Un investissement qu’il serait difficile de faire supporter aux seuls opérateurs européens, aux marges plus faibles que leurs homologues américains, et fragilisés par le contexte actuel d’inflation, de hausse des taux d’intérêt et de tensions géopolitiques.

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Le lobbying gagnant des opérateurs

Cette consultation publique, qui devrait donner à une proposition de règlement, fait suite à un intense lobbying desdits opérateurs. En septembre dernier, les principaux acteurs européens, dont Orange et Bouygues Telecom, avaient émis dans un document le souhait que « les plus gros générateurs de trafic contribuent équitablement aux coûts importants qu’ils imposent actuellement aux réseaux européens ». Une « contribution équitable » permettrait, à leurs yeux, un déploiement « plus rapide et plus inclusif » de la fibre et de la 5G.

Si la Commission ne mentionne pas explicitement le principe d’une contribution des acteurs du numérique, il est dans toutes les têtes. A commencer par celle de Thierry Breton, qui déclare : « L’internet haut débit nécessite des investissements élevés. C’est pourquoi […] nous explorons la question importante de savoir qui devrait payer pour la prochaine génération d’infrastructure de connectivité, y compris si les plateformes devraient partager le coût de l’investissement dans la connectivité de prochaine génération avec les opérateurs de télécommunications. »

Faciliter le déploiement des nouveaux réseaux

Reste à savoir quelle forme prendrait cette contribution et à partir de quel seuil de consommation de bande passante une entreprise pourrait y être éligible. Par ailleurs se pose la question d’une possible remise en cause du sacro-saint principe de neutralité du net. En contribuant au financement des infrastructures télécoms, un acteur comme Netflix ou YouTube ne serait-il pas en droit d’exiger l’allocation d’une bande passante dédiée ?

Au-delà de ce volet financement, la Commission entend avec sa future « loi sur l’infrastructure gigabit » accélérer le déploiement des nouveaux réseaux en réduisant les formalités administratives et en les facilitant avec la simplification et la numérisation des procédures d’autorisation. La future loi incitera également les opérateurs à coordonner leurs travaux de génie civil, permettant de poser une gaine ou de dresser un pylône, sachant qu’ils représentent jusqu’à 70 % des coûts de déploiement du réseau.

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