Semences aux néonicotinoïdes : les Etats ne peuvent pas déroger aux interdictions de l’Union européenne – Le Monde

Manifestation contre Monsanto et Bayer, le 26 octobre 2020, à Montbéqui (Tarn-et-Garonne).

Les Etats ne peuvent pas déroger aux interdictions de l’Union européenne (UE) concernant les semences aux néonicotinoïdes, y compris dans des circonstances exceptionnelles. Dans un arrêt rendu jeudi 19 janvier, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a jugé illégales les dérogations octroyées à des pesticides interdits, lorsque ceux-ci sont appliqués en traitement préventif des semences – comme c’est le cas pour les néonicotinoïdes sur la betterave.

Au total, onze Etats de l’UE avaient adopté de telles « autorisations d’urgence » pour faire face à la baisse de leurs rendements, dont la Belgique et la France. Interrogée sur le cas de six dérogations adoptées à l’automne 2018 par la Belgique, et concernant notamment les semences, la CJUE a jugé ces dernières illégales.

Les Etats ont certes le droit « dans des circonstances exceptionnelles, à savoir lorsqu’un danger ou une menace compromettant la production végétale ou les écosystèmes ne peut être maîtrisé par d’autres moyens raisonnables », d’autoriser temporairement « des produits phytopharmaceutiques ne satisfaisant pas aux conditions prévues » par le texte européen, note-t-elle.

Pour autant, concernant « les semences traitées à l’aide de produits phytopharmaceutiques contenant des substances interdites expressément », le législateur européen « n’a pas entendu permettre aux Etats membres de déroger à une telle interdiction expresse », juge la Cour installée au Luxembourg, dont les arrêts s’imposent aux juridictions nationales des Vingt-Sept.

Les ONG ayant saisi la CJUE faisaient ainsi valoir que ces néonicotinoïdes « sont utilisés de manière croissante à travers la technique de l’enrobage des semences » et « au lieu d’être pulvérisés sur la culture, ils sont donc préventivement appliqués sur les semences avant l’ensemencement, sans égard à la présence avérée ou non des insectes que ces produits visent à éliminer ».

Déclin massif des colonies d’abeilles

En France, le gouvernement avait rendu public, le 3 janvier, un projet d’arrêté autorisant à nouveau pour la campagne 2023 l’utilisation de semences de betteraves sucrières traitées avec des néonicotinoïdes, insecticides néfastes pour les abeilles, suscitant l’opposition de défenseurs de l’environnement.

Ce texte, publié sur le site du ministère de l’agriculture et mis à la consultation du public jusqu’au 24 janvier, faisait suite à une décision favorable rendue une semaine plus tôt par le conseil de surveillance chargé d’instruire les demandes de dérogation d’usage de ces produits – conseil composé d’élus, de syndicats agricoles, de représentants de la filière, d’ONG, etc.

Fin 2020, le Parlement avait autorisé le retour temporaire de ces insecticides, qui contribuent au déclin massif des colonies d’abeilles et interdits depuis 2018, pour voler au secours de la filière betteravière dont les rendements avaient été drastiquement réduits par la jaunisse. La loi précisait que les dérogations ne pourraient être accordées, jusqu’en juillet 2023, que pour les semences de betterave sucrière.

En décembre, le ministre de l’agriculture, Marc Fesneau, s’était dit favorable à une nouvelle dérogation, après celles de 2021 et 2022, « pour lutter efficacement » contre la prolifération des pucerons verts, porteurs de la jaunisse de la betterave, « en attente de solutions alternatives ».

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Le Monde avec AFP

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