Chasses traditionnelles : la justice suspend les nouvelles autorisations du gouvernement – Le Monde

Saisi en urgence par One Voice et la Ligue de protection des oiseaux (LPO), deux associations de défense de la nature, le juge des référés du Conseil d’Etat a suspendu lundi 25 octobre les nouveaux arrêtés gouvernementaux autorisant des chasses d’oiseaux traditionnelles.

Après une première annulation en août par la plus haute juridiction administrative du pays de plusieurs autorisations de chasse (grives, merles noirs, vanneaux, pluviers dorés, alouettes des champs, avec des filets ou des cages), le juge a estimé que le gouvernement avait pris mi-octobre ces nouveaux arrêtés sur la même base, risquant de contrevenir au droit européen, et qu’il existait ainsi « un doute sérieux quant à leur légalité ». Après cette décision rendue en urgence, « le Conseil d’Etat statuera au fond sur les recours contre ces arrêtés dans les prochains mois », souligne l’institution dans un communiqué.

Non conforme au droit européen

La directive européenne « Oiseaux » de 2009 interdit les techniques de capture massive d’oiseaux sans distinction d’espèces. Une dérogation est possible « à condition d’être dûment motivée et dès lors qu’il n’existe pas d’autre solution satisfaisante » pour capturer certains oiseaux, avait rappelé le Conseil d’Etat.

Les gouvernements français prenaient donc chaque année des arrêtés autorisant ces chasses traditionnelles dans certaines régions déterminées, avec des quotas d’individus chassables. La Cour de justice de l’Union européenne, saisie pour des arrêtés similaires concernant la très controversée et emblématique chasse à la glu, avait jugé cette dernière non conforme au droit européen en mars 2021, suivie en juin par le Conseil d’Etat, qui avait confirmé son illégalité.

Cela n’avait pas dissuadé le ministère de la transition écologique de publier, le 15 octobre, huit arrêtés pour 2021-2022 faisant valoir que les textes apportent « les motivations nécessaires sur l’absence de solution alternative, la sélectivité, l’usage judicieux et les faibles quantités » d’oiseaux tués par ces chasses, qui peuvent permettre des dérogations. Les associations avaient aussitôt attaqué ces arrêtés et demandé leur suspension immédiate.

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Le gouvernement attend la décision sur le fond

« La tradition ne saurait justifier le manquement aux exigences de la directive “Oiseaux” » s’est réjouie la LPO, en saluant une « belle et grande victoire ». « Avec une telle jurisprudence constante, qui plus est portant sur les mêmes pratiques, on aurait dû en rester là. C’était compter sans la faiblesse du gouvernement face au lobby cynégétique », a regretté l’association.

« Quand le Conseil d’Etat a déclaré ces techniques de chasses traditionnelles illégales, le 6 août dernier, on n’aurait jamais imaginé que le gouvernement ose les autoriser à nouveau », a de son côté réagi One Voice, dénonçant « la servilité à l’égard du lobby chasse qui, rappelons-le, défend un loisir et pas une nécessité ». Le ministère de la transition écologique a de son côté déclaré que « le gouvernement prend acte » de la décision, rappelant qu’il « revient désormais au Conseil d’Etat de statuer sur le fond ».

« J’ai beaucoup de colère, d’amertume, de dégoût », a dit à l’Agence France-Presse Willy Schraen, président de la Fédération nationale des chasseurs (FNC). « Je ne comprends pas cet acharnement politico-juridique à emmerder une poignée de Français sur quelque chose d’insignifiant », a-t-il ajouté, assurant que ces chasses « n’ont pas d’enjeu en [matière] de biodiversité ».

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Le Monde avec AFP

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