Boeing abattu par un missile iranien : cinq questions sur l'”erreur” qui a conduit au crash – franceinfo

Après avoir nié pendant plusieurs jours, le régime iranien a reconnu sa responsabilité dans le crash d’un avion de ligne de la compagnie Ukrainian Airlines, tuant les 176 personnes à bord.

Spectaculaire volte-face. Trois jours après le crash d’un Boeing de la compagnie Ukrainian Airlines, qui s’est écrasé tôt mercredi à l’ouest de Téhéran, le régime iranien a présenté ses excuses, samedi 11 janvier, reconnaissant avoir abattu l’avion de ligne “par erreur”. Mais l’Iran pointe aussi la responsabilité de l’“aventurisme américain” dans ce drame qui a fait 176 morts, essentiellement des Irano-Canadiens. Jusque-là, l’Iran avait nié avec force la thèse, privilégiée notamment par le Canada, selon laquelle l’avion ukrainien aurait été touché par un missile. Franceinfo revient en questions sur ce tir.

Comment l’Iran a-t-il admis sa faute ?

Les excuses ont eu lieu au plus haut niveau, samedi 11 janvier. L’Iran regrette “profondément” ce crash, qui constitue “une grande tragédie et une erreur impardonnable”, a déclaré le président iranien Hassan Rohani. Le chef de l’Etat a publié son message sur Twitter en anglais, tôt dans la matinée.

“L’enquête interne des forces armées a conclu que de manière regrettable des missiles lancés par erreur ont provoqué le crash de l’avion ukrainien et la mort de 176 innocents”, a précisé le chef de l’Etat iranien, toujours sur Twitter. 

Plus tôt, le ministre des Affaires étrangères iranien Mohammad Javad Zarif avait déjà exprimé ses “regrets, excuses et condoléances” sur Twitter.

Comment l’Iran justifie-t-il ce tir ?

Téhéran laisse entendre que la tension avec les Etats-Unis a joué un rôle important. “Une erreur humaine causée par l’aventurisme américain a mené au désastre”, a écrit le ministre iranien des Affaires étrangères Mohammad Javad Zarif sur Twitter.

Par ce tweet, le ministre fait allusion à l’escalade provoquée par l’exécution, le vendredi 3 janvier, du général iranien Qassem Soleimani, tué par un tir de drone à Bagdad sur décision du président américain Donald Trump. En représailles, l’Iran avait ensuite tiré des missiles sur des bases abritant des soldats américains. Donald Trump, de son côté, avait menacé, sur Twitter, de viser 52 sites iraniens si la République islamique réagissait militairement à la mort du général Soleimani.

Dans ce contexte tendu, les forces armées iraniennes ont expliqué samedi que l’appareil avait été pris pour un “avion hostile”. “Dans une situation de crise et sensible, le vol 752 d’Ukrainian Airlines a décollé de l’aéroport Imam Khomeiny [de Téhéran] et au moment de tourner, il [a semblé se rapprocher] d’un centre militaire sensible” des Gardiens de la Révolution, selon le communiqué publié par l’agence officielle Irna. “Dans ces conditions”, et à la suite d’une “erreur humaine, et de manière non intentionnelle, l’avion [a été] touché“, ajoutent les forces armées.

Téhéran avait jusqu’alors nié que l’avion ukrainien avait été touché par un missile. “Une chose est sûre, cet avion n’a pas été touché par un missile”, affirmait encore vendredi le président de l’Organisation de l’aviation civile iranienne.

Qui est responsable de ce tir de missile ?

Commandant de la branche aérospatiale des Gardiens de la Révolution, corps d’élite de l’armée iranienne, le général de brigade Amirali Hajizadeh a déclaré samedi 11 janvier à la télévision qu’il endossait la “responsabilité totale” du tir de missile ayant conduit au crash du Boeing 737 d’Ukrainian Airlines.

Il a donné quelques précisions sur les circonstances du tir. L’opérateur de missile qui a abattu le Boeing ukrainien mercredi à Téhéran a fait feu sans pouvoir obtenir la confirmation d’un ordre de tir à cause d’un “brouillage” télécom, a-t-il affirmé samedi. Le soldat a pris l’avion pour un “missile de croisière” et il a eu “10 secondes pour décider”, a raconté Amirali Hajizadeh.

Il pouvait décider de tirer ou de ne pas tirer. Il a pris la mauvaise décision.Amirali Hajizadehdans une déclaration à la télévision d’Etat

“C’était un missile de courte portée qui a explosé près de l’avion. C’est ce qui explique que l’avion a pu” continuer de voler, a encore expliqué l’officier des Gardiens de la Révolution. “J’endosse la responsabilité totale [de cette catastrophe] et je me plierai à toute décision qui sera prise“, a conclu le général. “J’aurais préféré mourir plutôt que d’assister à un tel accident.”

Comment réagit la communauté internationale ?

Les réactions les plus rapides ont émané de l’Ukraine, puisque l’avion qui s’est écrasé appartenait à une compagnie ukrainienne, et du Canada, puisque les victimes du crash sont surtout des Irano-Canadiens. Sur Facebook, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a exigé samedi la punition des coupables et le versement de compensations de la part de l’Iran. 

Nous attendons de l’Iran que les coupables soient traduits en justice, le paiement de compensations et le retour des corps des victimes.Volodymyr Zelenskysur Facebook

“Nous espérons que l’enquête se poursuivra sans retards délibérés et sans entraves. Nos 45 spécialistes doivent obtenir l’accès total” à l’ensemble des éléments de l’enquête, a-t-il encore réagi sur le réseau social.

Le Premier ministre canadien Justin Trudeau, lui, a réclamé de la “transparence” afin qu’une “enquête complète et approfondie” soit menée et établisse les responsabilités iraniennes dans ce crash. C’est lui qui avait affirmé en premier que l’avion avait été abattu par un tir de missile de Téhéran.

Comment va se dérouler l’enquête ?

En attendant que “le responsable” de cette erreur soit traduit en justice, comme l’a promis l’armée iranienne, Téhéran a promis de mener une enquête “transparente” et de tout faire pour faciliter la tâche des pays comptant des ressortissants dans les victimes, dont l’Ukraine. Le ministre ukrainien des Affaires étrangères Vadym Prystaïko a d’ailleurs souligné que les enquêteurs ukrainiens bénéficiaient de la “coopération entière” de Téhéran.

Téhéran, avec qui le Canada a rompu ses relations en 2012, a dit aussi attendre l’arrivée d’une équipe canadienne chargée de “s’occuper des affaires relatives aux victimes canadiennes”. L’Iran a par ailleurs invité Boeing, le constructeur américain de l’avion, à participer à l’enquête, ainsi que les Américains, les Canadiens, les Français et les Suédois à observer les méthodes de travail suivies par les Iraniens dans cette affaire.

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