Anne Hidalgo : «Je suis candidate à un nouveau mandat de maire de Paris» – Le Parisien

Oui, Anne Hidalgo est bien candidate à sa propre succession. La maire de Paris l’annonce dans une interview au Parisien – Aujourd’hui en France, réalisée le 8 janvier depuis son futur QG de campagne, boulevard Sébastopol. Dès les premiers mots, elle fonce vers ce qui sera le socle de son discours d’ici le 15 mars et le premier tour des élections municipales : l’écologie.

SA CANDIDATURE. « Je ferai campagne sous les couleurs de Paris en commun »

Vous finissez votre mandat dans quelques semaines. Avez-vous l’intention d’en solliciter un second ?

Oui. Je suis candidate à un nouveau mandat de maire de Paris. C’est cette ville que j’aime, qui me passionne, à laquelle je consacre une grande partie de ma vie.

VIDÉO. Anne Hidalgo : « Je suis candidate à un nouveau mandat de maire de Paris »

Vous estimez n’avoir pas achevé votre tâche ?

Je souhaite poursuivre l’action engagée en 2001 et amplifiée en 2014. Je veux continuer à apporter les transformations dont Paris a besoin. C’est désormais une course contre la montre. Nous avons dix ans pour agir face à l’urgence climatique.

Dans quel arrondissement allez-vous vous présenter ?

Je me présente dans le XIe arrondissement (NDLR : où se présente également David Belliard, le candidat EELV pour Paris), en numéro 2 sur la liste de François Vauglin, le maire actuel. C’est un arrondissement qui, pour moi, incarne très bien ce qu’est Paris. Le goût de la différence, de l’innovation, de la création, de la fête. Cet arrondissement a été particulièrement marqué par les attaques terroristes de 2015.

Ferez-vous campagne sous les couleurs du Parti socialiste ?

Je ferai campagne sous les couleurs de « Paris en commun ». Ce mouvement, que nous avons constitué, réunit à la fois des femmes et des hommes issus du PS, du Parti communiste, d’écologistes, de Génération.s, des centristes, des humanistes, mais aussi des Parisiennes et des Parisiens qui souhaitent s’engager.

Quelle sera la place des femmes dans les listes de « Paris en commun » ?

Je vous rappelle d’abord que je suis une femme et tête de liste parisienne. Avec Rachida Dat i (LR) et Danielle Simonnet (France Insoumise), nous ne sommes pas si nombreuses… Des femmes seront têtes de liste dans les arrondissements de conquête pour nous, comme le Ve, le VIe, le XVe et le XVIIe.

Au deuxième tour, pourriez-vous vous allier, à gauche, à la France Insoumise et aux écologistes, voire au macroniste dissident Cédric Villani ?

Avant de parler du deuxième tour, je m’intéresse au premier. J’ai envie de convaincre les Parisiens du rassemblement qui existe et qui est déjà très fort.

Est-ce que vous pouvez prendre l’engagement devant les Parisiens de ne pas vous présenter à la présidentielle de 2022 et de vous consacrer à votre mandat de maire jusqu’en 2026 ?

Évidemment oui ! Je ne serai pas candidate à la présidentielle de 2022. Mon ambition, c’est Paris. Maire de Paris, c’est le plus beau des mandats.

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Quelles relations entretenez-vous avec Emmanuel Macron ?

Nous nous voyons régulièrement. Nos relations sont bonnes, fluides et directes. Ce qu’elles doivent être entre le président de la République et la maire de la capitale.

L’ÉCOLOGIE. « Le centre de Paris sera piétonnisé »

Le socle de votre campagne est l’écologie. Une première mesure ?

Sur le vélo, nous irons encore plus loin en faisant de Paris une ville « 100 % vélo ». De nouvelles pistes, faites pour le confort et la sécurité des cyclistes, seront aménagées dans tout Paris en gagnant sur les places de stationnement. Et des liaisons nouvelles relieront la capitale aux villes du Grand Paris.

Où se gareront les voitures ?

Il y en a déjà beaucoup moins et il y en aura de moins en moins. Il faut rappeler que, pour un air plus pur, nous mettrons fin au diesel en 2024 et aux moteurs thermiques à l’horizon 2030. Les véhicules, électriques pour la plupart, pourront stationner dans les parkings souterrains ou ceux de nos bailleurs sociaux où de nombreuses places sont disponibles. Mais ce qui compte, c’est toute la place que nous rendrons aux Parisiennes et aux Parisiens, qui sont avant tout des piétons.

Et du côté de la verdure ?

La ville sera plus verte avec ses forêts urbaines sur le parvis de l’hôtel de ville, à la gare de Lyon et derrière l’Opéra. Nous transformerons les abords de la tour Eiffel entre la place du Trocadéro et l’Ecole militaire. Nous poursuivrons nos grands projets en réaménageant notamment la place de la Concorde et celle de l’Etoile sur le modèle de celles de la Nation et de la Bastille. Les Champs-Elysées seront arborés. Le centre de Paris sera piétonnisé, et la circulation sera limitée dans les quatre premiers arrondissements aux riverains, aux taxis, aux navettes électriques, aux véhicules d’urgence et de livraison pour les commerces et les artisans et aux personnes à mobilité réduite… Enfin, deux nouveaux grands parcs sortiront de terre. L’un à l’Est, dans le XIIe, dans le nouveau quartier Bercy-Charenton, qui reliera le bois de Vincennes au parc de Bercy. L’autre à l’Ouest, dans le XVe, en remplacement de l’héliport.

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Vous n’envisagez pas, comme votre concurrent Gaspard Gantzer, de supprimer le périphérique ?

Nous avons engagé depuis longtemps une réflexion avec les maires des communes voisines pour transformer le boulevard périphérique. Sur ce dossier, il faut avancer ensemble, comme sur le réaménagement des portes de Paris. Je veux transformer ces portes en places. Je commencerai par la porte de la Chapelle où les habitants ont été durement éprouvés ces dernières années. Je veux en faire une entrée dans Paris digne de l’esplanade des Invalides.

Donc c’est reparti pour les travaux si vous êtes réélue ?

Il n’y aura pas de moratoire (rires). Paris est une ville dont les canalisations ont parfois 150 ans : le travail de modernisation est permanent. Je sais que cela a été difficile et j’en remercie les Parisiens. Nous hériterons des Jeux olympiques et paralympiques, de trois piscines sur la Seine au cœur de Paris. Imaginez. Ce sera une autre ville.

Vous voulez changer de modèle ?

La question est : comment veut-on vivre à Paris dans cinq ans, dans dix ans ? L’alimentation doit être plus saine dans nos assiettes. Les cantines seront 100 % bio comme nous l’avons déjà fait pour les crèches. Et pour poursuivre nos actions en faveur de l’agriculture urbaine – 100 hectares sont cultivés actuellement —, deux grands potagers seront aménagés dans les bois de Vincennes et de Boulogne.

LOGEMENT. « Maintenir l’encadrement des loyers, c’est un impératif »

Paris, mercredi 8 janvier 2020.Anne Hidalgo dans son futur QG de campagne, boulevard Sébastopol./LP/Olivier Arandel
Paris, mercredi 8 janvier 2020.Anne Hidalgo dans son futur QG de campagne, boulevard Sébastopol./LP/Olivier Arandel  

Le logement est une préoccupation centrale. Quelle sera votre action ?

Clairement, la première des difficultés pour les Parisiens est de se loger, même si beaucoup a été fait depuis 2001. Nous étions alors à 13 % de logements sociaux. À la fin de mon mandat, nous serons à 22,6 %. Concrètement, ce sont 550 000 personnes, de la classe moyenne et des catégories populaires, qui peuvent continuer à vivre à Paris grâce à l’action de la municipalité.

Ça n’empêche pas la capitale de perdre 11000 habitants par an…

Nous allons porter à 25 % en 2025 la part du logement social et intermédiaire à Paris. Cela permettra de maintenir les familles et les catégories populaires à Paris à travers la production de logements. Et dans le secteur privé, je maintiendrai l’encadrement des loyers. C’est un impératif.

Comment allez-vous procéder pour mieux loger les Parisiens ?

Il faut de la construction de logements neufs et de la transformation de bureaux. Mais il faut aller beaucoup plus loin. Il faut intervenir très fortement contre les abus des plates-formes de location saisonnière du type Airbnb. Je ne parle pas du Airbnb qui permet d’arrondir ses fins de mois, celui de l’économie du partage. Je parle des 60 000 logements qui ont été retirés du marché locatif, bouleversant le visage de certains quartiers. Sur cette question, j’organiserai, avant l’été 2020, un référendum pour que les Parisiens puissent décider des règles du jeu.

On parle de la durée maximale de location ?

Oui, par exemple pour la baisser à 30 jours (NDLR : contre 90 jours actuellement).

Pourquoi un référendum puisque, au final, vous n’avez pas le pouvoir de décider le nombre de nuitées maximales ?

Pour permettre aux Parisiennes et aux Parisiens de s’exprimer. Leur voix fera bouger les choses. Airbnb ne pose pas les mêmes problèmes à Paris et dans une commune qui voit des touristes venir grâce à ce système.

D’autres mesures ?

On n’a pas encore tout tenté pour mettre fin à la logique de pure spéculation qui agite encore trop souvent ce marché. Je réunirai les banques, les assurances, les foncières et les grandes entreprises pour les embarquer dans la production de logement intermédiaire pour les classes moyennes. Mon idée est de leur dire : vous devez nous aider à créer du logement à des prix abordables, au moins 20 % en dessous du marché, avec deux ou trois chambres pour que les gens puissent y vivre en famille avec leurs enfants. On peut récupérer des bureaux vides, des garages ou des immeubles inoccupés.

LA SÉCURITÉ. « Il y aura 5000 agents »

Où en êtes-vous de la police municipale ?

Je prends le pari qu’au lendemain de l’élection municipale, elle verra le jour. Il n’y aura plus aucun obstacle à consacrer le mot « Police municipale ». Aujourd’hui, nous avons 3400 agents, il y en avait 700 en 2014. Nous passerons à 5000 agents pour le second mandat. Cela correspond aux besoins d’une ville comme Paris. Cette police fera respecter les règles du jeu de la vie quotidienne. Elle sera équipée d’armes pour se protéger et intervenir, comme toutes les polices municipales. Mais pas d’armes létales. On ne va pas se substituer à la police nationale.

Comment ses agents seront-ils préparés à leurs missions ?

Nous allons créer une école de formation pour cette police. Mais le plus important à mes yeux, c’est que notre police sera paritaire, avec autant de femmes que d’hommes. Ces femmes dans la rue seront l’incarnation de la sécurité et de la tranquillité publique que nous voulons, pour lutter contre le harcèlement de rue, qui empêche encore beaucoup de femmes de vivre, de s’habiller ou de sortir comme elles le souhaitent en toute liberté. Dans l’école que nous allons créer, la formation permettra aux agents de lutter contre toutes les formes de discrimination : antisémitisme, racisme, sexisme, homophobie et transphobie. Cette police portera les valeurs de Paris.

LES FINANCES. « Il n’y aura pas d’augmentation d’impôts »

Vous annoncez plein de nouvelles mesures, mais avec quel argent financer tout ça ?

Le budget sera détaillé en février lorsque je présenterai mon programme aux Parisiennes et aux Parisiens. Mais nous savons agir sous la contrainte financière. La Ville de Paris a un budget de 8 milliards d’euros et j’ai déjà dû faire face à des baisses de dotations extrêmement importantes, qui se sont élevées à quelque 4 milliards d’euros sur la mandature.

Vous allez devoir trouver de nouveaux financements…

Je présenterai un budget dans lequel il n’y aura pas d’augmentation d’impôts. Un budget dans lequel on ira chercher de nouveaux financements, comme avec les entreprises qui vont investir dans le logement, ou via des obligations vertes, un fond vert pour moderniser Paris. De nouveaux indicateurs, conçus avec l’OCDE et Positive Planet, seront aussi mis en place pour mesurer la dette écologique et prendre en compte ce que nous faisons en matière d’inclusion. Avec la crise climatique et le monde qui se désagrège, il nous faut tout repenser : la notion même de progrès, la prise en main par les habitants du destin de leur ville, notre responsabilité dans le modèle de société que nous voulons léguer à nos enfants. Ce sont ces idées que je porterai dans la campagne, pour bâtir un Paris en commun.

L’INNOVATION. Paris ou « la ville du quart d’heure »

Vous souhaitez recentrer la vie des Parisiens autour de leur quartier. De quoi s’agit-il exactement ?

La ville du quart d’heure, c’est tout ce qu’il y a, à un quart d’heure à pied, autour de chez soi. C’est la ville où l’on se connaît, où l’on se rencontre, où l’on vit ensemble et où l’on prend soin de son environnement et du bien commun. Dans cette ville, l’école est la capitale du quartier. Toute la vie d’un quartier, tout son rythme part de la vie des écoles. L’école sera le point d’ancrage de notre projet. Les cours d’école (maternelles, primaires et collèges) seront transformées et ouvertes aux habitants le week-end et pendant les vacances. Un lieu où vous pourrez vous reposer, lire si vous n’avez pas de parcs à proximité, faire jouer les enfants.

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Y a-t-il d’autres domaines qui entrent dans cette « ville du quart d’heure » ?

La culture va aussi s’organiser autour des écoles. Les conservatoires, les bibliothèques, les centres d’animation, les maisons de pratiques amateurs vont être reliés à l’école, qui sera la capitale du quartier. De même, dans la ville du quart d’heure, on va faire en sorte que dans chaque quartier il y ait un gymnase qui devienne un « Social Sports Club ». Un lieu où l’on vient après le travail, après l’école, pour faire du sport mais aussi du soutien scolaire pour les enfants, à l’image de ce que fait la championne olympique Sarah Ourahmoune avec la boxe dans la Halle Carpentier. Elle accueille les mamans et il y a du soutien scolaire pour les enfants. C’est une initiative privée et nous l’avons accompagnée, comme nous l’avons fait avec Magali Munoz et son club de foot dans le XIVe. Elle aussi accueille parents et enfants.

LA PROPRETÉ. Un budget d’« un milliard d’euros par an »

Paris sera-t-il propre ?

Dans cette ville du quart d’heure, qui doit être beaucoup plus propre, je consacrerai un milliard d’euros par an pour la propreté, l’entretien et les petits travaux de nos rues, de nos trottoirs, de nos places, de nos jardins, de nos pieds d’arbre. Aujourd’hui, nous avons 500 millions pour la propreté. Là, nous passerons à 1 milliard pour répondre aux attentes des Parisiens, qui auront leur mot à dire sur ces sujets.

LES JO. « Les budgets sont discutés de façon serrée »

Les Jeux olympiques vont-ils laisser un héritage à Paris ?

Oui, bien sûr. Les JO, c’est demain une ville plus accessible pour les personnes en situation de handicap. Des lignes entières de métro seront accessibles. On travaille beaucoup avec l’Association des paralysés de France. Je soutiens leurs propositions. Il ne faut pas relâcher la pression.

Justement le budget des JO ne risque-t-il pas d’exploser ?

Certainement pas. Les budgets sont discutés de façon très très serrée, j’y veille personnellement. Côté infrastructures, nous sommes dans les temps, comme pour le village olympique ou sur l’Arena porte de la Chapelle.

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