Plus d’un millier de nouvelles arrestations en Biélorussie lors de manifestations contre Loukachenko – Le Monde

Une manifestation contre les violences policières et la réélection à la présidence du dirigeant autoritaire Alexandre Loukachenko, le 12 août 2020, à Minsk.

Trois jours après la réélection à la présidence du dirigeant autoritaire Alexandre Loukachenko, au pouvoir depuis vingt-six ans, les manifestations se poursuivent en Biélorussie. Plus de mille personnes ont été arrêtées par la police dans la nuit de mardi à mercredi et 51 blessées, a déclaré le ministère de l’intérieur, mercredi 12 août.

Deux manifestants sont morts depuis le début, dimanche, de ce mouvement de protestation violemment réprimé. Les autorités biélorusses ont confirmé, mercredi, la mort d’un manifestant interpellé lors d’un rassemblement, le deuxième décès officiellement recensé depuis dimanche.

Dans un communiqué, le comité d’enquête a rapporté que cet homme de 25 ans était mort dans un hôpital de Gomel (sud) après avoir été arrêté dimanche lors d’une « manifestation non autorisée ». Selon cette source, qui ne précise pas la date du décès, sa santé s’est « subitement dégradée » alors qu’il était en détention.

La police biélorusse a par ailleurs fait savoir qu’elle avait tiré à balles réelles sur des manifestants « agressifs », armés de bâtons en métal, qui protestaient mardi à Brest, dans le sud du pays, faisant, selon le bilan officiel, un blessé. Depuis dimanche soir, la police use de grenades sonores et de balles en caoutchouc pour disperser les protestataires, faisant plus de 250 blessés en trois jours. De nombreuses scènes de passage à tabac de manifestants étaient également diffusées sur les réseaux sociaux. Les autorités affirment avoir affaire à des casseurs et des provocateurs pilotés depuis l’étranger.

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Chaîne humaine

Mercredi, à la mi-journée, des dizaines de femmes, vêtues de blanc et tenant des fleurs, ont formé une chaîne humaine dans le centre de Minsk pour dénoncer les violences policières. « L’amour ne s’impose pas par la force », était-il écrit sur une banderole.

Des médias antigouvernementaux ont signalé des actions similaires dans d’autres villes, sans que la police intervienne. Sur les réseaux sociaux, des appels à manifester mercredi soir circulaient.

Des centaines de personnes étaient aussi rassemblées devant un centre de détention de Minsk pour tenter d’avoir des nouvelles de proches probablement arrêtés. Quelque 6 000 personnes ont été arrêtées depuis dimanche, sans que l’on sache combien sont encore détenues.

Des événements « choquants » et « scandaleux »

Au cours d’une discussion téléphonique, mercredi, avec le président russe, Vladimir Poutine, Emmanuel Macron a « fait part de sa très grande préoccupation sur la situation en Biélorussie et la violence opposée aux citoyens lors des élections ». « Il a souligné la nécessité de retrouver la voie du dialogue », a précisé l’Elysée.

« Les gens ont le droit de s’exprimer et d’exprimer leur désaccord, a fortiori dans le contexte d’élections, quand les libertés démocratiques devraient être maintenues, et non supprimées », a, pour sa part, déclaré la haute-commissaire de l’Organisation des nations unies (ONU) aux droits de l’homme, Michelle Bachelet. Elle a ainsi condamné la répression des manifestations et réclamé la libération des personnes arrêtées.

En déplacement à Prague, le chef de la diplomatie américaine, Mike Pompeo, avait plus tôt dans la journée soutenu les manifestants. « Nous voulons que le peuple biélorusse jouisse des libertés qu’il réclame, qu’il pense être dans son meilleur intérêt », a-t-il déclaré, lors d’une conférence de presse commune avec le premier ministre tchèque, Andrej Babis :

« Nous demandons instamment que les manifestants non violents soient protégés et en sécurité, il n’est dans l’intérêt de personne d’agir ainsi. »

M. Babis a, de son côté, jugé « choquant » et « scandaleux » le déroulement des événements en Biélorussie et espère « que l’Union européenne (…) prendra des mesures ».

Les ministres des affaires étrangères des Etats membres de l’UE doivent se réunir vendredi, et Bruxelles a menacé de prendre des sanctions contre Minsk en raison des fraudes électorales et de la dureté de la répression.

Une grande figure de la révolte biélorusse reste absente de ces manifestations. La principale opposante d’Alexandre Loukachenko, Svetlana Tsikhanovskaïa, qui avait galvanisé les foules lors de la campagne présidentielle, a dû fuir et s’est réfugiée en Lituanie. Dans un message diffusé sur les réseaux progouvernement, elle a appelé à cesser le combat, ce qui fait dire aux observateurs locaux qu’elle a subi des menaces.

Dimanche, Alexandre Loukachenko a remporté un sixième mandat, avec 80,08 % des voix. Svetlana Tsikhanovskaïa n’a, elle, obtenu que 9,9 % des voix. Loukachenko, 65 ans, n’a jamais laissé d’opposition s’ancrer. Celle-ci ne dispose d’ailleurs d’aucun élu au Parlement et la dernière vague de contestation, qui remonte à 2010, avait aussi été sévèrement réprimée.

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Le Monde avec AFP

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