Le gouvernement pris au piège du débat sur l’insécurité et l’« ensauvagement » – Le Monde

Jean Castex fait une déclaration à la presse en présence de Gérald Darmanin, au sujet de violences qui ont eu lieu à Dijon, le 10 juillet.

Jean Castex avait donné le coup d’envoi, le 15 juillet, lors de sa déclaration de politique générale. Ce jour-là, le premier ministre s’émouvait de « la banalisation de la délinquance du quotidien » et du fait que, « dans beaucoup de territoires, les petites incivilités, le tag, l’insulte, le petit trafic » gâchent « la vie des gens ».

Le 24 juillet, son ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, prenait la balle sécuritaire au bond et dénonçait dans Le Figaro la « crise de l’autorité » qui frapperait la France. « Il faut stopper l’ensauvagement d’une certaine partie de la société », déclarait le locataire de la place Beauvau en s’appropriant un terme – « ensauvagement » – que la présidente du Rassemblement national (RN), Marine Le Pen, a contribué à populariser.

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Depuis, les déplacements ministériels en réponse à des faits divers se sont multipliés. Les attaques lancées par la droite et l’extrême droite contre le supposé laxisme du gouvernement aussi. Et le thème de la sécurité n’en finit plus de grossir dans le débat public, au point de créer des remous au sein de l’exécutif et de contraindre le même Jean Castex à tenter de siffler la fin de la partie.

Mardi 1er septembre, le garde des sceaux, Eric Dupond-Moretti, s’est en effet inscrit en faux contre la rhétorique de Gérald Darmanin. « L’ensauvagement, c’est un terme qui développe le sentiment d’insécurité », a estimé l’ancien avocat sur Europe 1, un « fantasme » nourri à ses yeux « par les difficultés économiques », « le Covid » et « certains médias ». « L’insécurité, il faut la combattre. Le sentiment d’insécurité, c’est plus difficile, a-t-il jugé. La France, ce n’est pas un coupe-gorge. » La veille, la ministre déléguée à la citoyenneté, Marlène Schiappa, affirmait pourtant que « les violences gratuites augmentent dans ce qu’il est de coutume d’appeler un ensauvagement de la société ».

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Les « effets du confinement »

Jean Castex a tenté de mettre fin à cette cacophonie, mardi, en marge d’un déplacement à Châteauroux. « Fermez le ban : il n’y a aucune polémique », a assuré le premier ministre, regrettant un débat de « mots » plus que sur « les actions que l’on met et que l’on va mettre en place ». Ce qui ne l’a pas empêché d’indiquer que « le ministre de l’intérieur, comme l’ensemble du gouvernement, constate effectivement qu’il y a une montée du sentiment d’insécurité ». Malgré cette tentative d’apaisement, M. Darmanin a persévéré, le même jour. « On peut utiliser des mots différents. Personnellement, j’utilise le mot d’ensauvagement et je le réitère, a affirmé le ministre de l’intérieur devant la presse lors d’une visite à Choisy-le-Roi (Val-de-Marne). C’est un mot qui fait naître en moi des échos des années de permanence électorale où j’ai vu des gens victimes d’actes de sauvagerie. »

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