« Jedi Blue » : au-delà du contrat publicitaire, un symptôme du problème des GAFA

Facebook et Google ne fermeront plus les yeux dessus. « Jedi Blue », leur contrat publicitaire obtenu par la justice américaine, est une réalité, malgré la pression des enquêtes antitrust. Au Texas, où les investigations progressent et d’où proviennent les documents, la justice cherche à montrer que Facebook et Google se seraient entendus sous la forme d’un pacte, si important qu’il aurait impacté le marché publicitaire sur internet.

Parfaite démonstration du climat actuel et de la complexité du problème des GAFA, le dossier « Jedi Blue » vient de s’étoffer, dans un article accusateur du New York Times. On y apprend un peu plus sur la façon dont Facebook se serait allié à Google sur le marché de la publicité sur internet, au lieu de lui faire concurrence. Plus représentatif encore : l’entente signée entre les deux entreprises aurait eu pour conséquence de venir étouffer la concurrence. Une affaire à la croisée entre le monopole et la concurrence déloyale, qu’aucun des deux ne souhaite cacher désormais.

Nouvelles révélations sur l’entente Facebook-Google

Le dernier article publié par le New York Times est une suite aux révélations du Wall Street Journal du 29 décembre dernier. Les deux médias américains ont pu accéder à certains éléments d’enquête de la justice du Texas, bien positionnée pour élucider le problème monopolistique américain des GAFA. En plus de leurs propres informations, les deux médias donnent aujourd’hui accès aux détails d’un certain dossier baptisé « Jedi Blue », qui retient particulièrement l’attention des régulateurs.

Il s’agit d’un véritable pacte qui concerne Facebook et Google, au sujet de la publicité en ligne. Après avoir voulu le concurrencer en 2017, « les preuves présentées dans une action en justice antitrust déposée par 10 procureurs généraux d’État le mois dernier indiquent que Google a proposé à Facebook, son plus proche rival dans la publicité numérique, une entente en or », rappelait le NYT cette semaine. Une alliance aujourd’hui chiffrée, et commentée par six autres dirigeants, clients de Google et participants à ses enchères publicitaires.

La première révélation de cette semaine est la suivante : Google a aidé Facebook à remporter les enchères en lui fournissant des informations supplémentaires sur la pertinence des différentes offres de publicité. Une data à prix d’or, pour pouvoir peaufiner les négociations et surenchérir sur les meilleurs dossiers vendus par Google à ses partenaires. En contrepartie, Facebook s’engageait à participer à au moins 90 % des négociations pour un montant annuel de 500 millions de dollars.

Plus représentatif encore : Google et Facebook se seraient entendus pour qu’un pourcentage « fixe » d’enchères soit remporté par le groupe de Mark Zuckerberg. Un élément du dossier suffisamment clair pour comprendre que les dés étaient truqués. « À l’insu des autres acteurs du marché, quelle que soit la hauteur des enchères, les parties ont convenu que le marteau tomberait en faveur de Facebook un certain nombre de fois », citaient les journalistes suite à la lecture des documents. Un porte-parole de Google a réfuté cette accusation en précisant que, comme tout autre annonceur, Facebook devait faire l’enchère la plus haute pour remporter un espace publicitaire.

Le problème des GAFA ?

Malgré ce que l’on pourrait croire en vue de la nature des informations, Google et Facebook ne démentent plus de l’existence du contrat. Plutôt que nier, les entreprises préfèrent simplement se défendre en ne présentant les dossiers que comme des contrats de partenariat. Pour le reste, la présence d’enchères est suffisante pour défendre et prôner la concurrence transparente. Un porte-parole de Facebook, par exemple, rappelait que pour obtenir les espaces publicitaires, l’entreprise se contentait de proposer l’offre la plus grosse à Google.

Le problème des GAFA est là. À travers leur puissance et l’absence de règles suffisamment cadrées par le passé (le poids de ces entreprises n’avait pas encore été appréhendé), Facebook et Google ont eu le temps de préparer leur défense et contourner les critiques. Les traces sont là, mais elles furent déjà préparées à se faire éplucher par la justice. Optimisées, elles contiennent elles-mêmes des notions de défense de la concurrence et des marchés. Preuve en est : le New York Times rapportait que le terme « antitrust » avait été utilisé plus de vingt fois dans le contrat “Jedi Blue”.

Chez les concurrents, aussi, la situation est tout aussi complexe. Véritable trésor pour les régulateurs et les journalistes, ces derniers se limitent, et parlent avec une grande retenue. Dans les révélations du journal cette semaine, seulement six des vingt autres partenaires de Google avaient accepté de témoigner. Sous couvert d’anonymat néanmoins. La raison ? Malgré leur intérêt à casser le pouvoir des GAFA, ces partenaires en craignaient les répercussions, qui mettraient « en péril leurs relations avec Google ». C’est dire.

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