Au procès de l’homme qui a giflé Emmanuel Macron, les motivations incertaines d’un prévenu inconnu de la justice – Le Monde

A l’entrée du palais de justice de Valence (Drôme), lors de l’audience en comparution immédiate de Damien Tarel, jeudi 10 juin 2021.

Une fois. Deux fois. Trois fois. Puis une dernière, au ralenti. La gifle assénée deux jours plus tôt à Emmanuel Macron aura été décortiquée sous tous les angles par le tribunal correctionnel de Valence, jeudi 10 juin. L’angle de la violence physique d’abord, jugée « parfaitement inadmissible » par le procureur de la République Alex Perrin. Mais celui, surtout, de l’expression d’une violence politique presque revendiquée par son auteur, Damien Tarel, à l’audience : « Je me suis senti investi par ce que représentent les “gilets jaunes” exclus juste avant et dont la voix ne pouvait pas être entendue, et par le peuple français en général. »

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Le Drômois de 28 ans a été condamné à dix-huit mois de prison dont quatre mois ferme pour violences volontaires sans incapacité sur personne dépositaire de l’autorité publique. Les quatorze mois restants sont assortis d’un sursis probatoire de deux ans avec une obligation de soins psychologiques. Le tribunal a ajouté à son jugement trois peines complémentaires : l’interdiction de détenir une arme pendant cinq ans, d’exercer toute fonction publique à titre définitif et la privation de ses droits civiques, civils et familiaux pendant trois ans. Menottes aux poignets – un mandat de dépôt ayant été délivré –, Damien Tarel est sorti silencieusement, sans que l’on ait encore totalement compris le magma idéologique qui a poussé ce jeune homme totalement inconnu de la justice à un tel geste.

« Je ne voudrais pas faire le procès de notre démocratie »

Deux heures plus tôt, le tribunal découvrait ses cheveux longs et son vocabulaire très choisi, réfléchi. Sa dyslexie et son haut potentiel intellectuel diagnostiqués dans l’enfance, avant le traumatisme de la mort de son père, ses années de chômage et de RSA. Mais aussi sa passion pour le Japon, la chevalerie et les combats médiévaux, qu’il a mis à profit en lançant trois petites associations dans sa « petite ville de campagne mourante » de Saint-Vallier. Et son « dégoût » pour Emmanuel Macron, qui « représente très bien la déchéance de notre pays », selon lui. Qui représente surtout l’institution présidentielle et la démocratie française, lui fait remarquer l’un des assesseurs. « Je ne voudrais pas faire le procès de notre démocratie mais je ne trouve pas qu’il ait été élu par l’ensemble de la population française », rétorque Damien Tarel. Nous y voilà.

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Etait-il donc venu à Tain-l’Hermitage (Drôme) mardi 8 juin dans le but de gifler le chef de l’Etat ? Non, il n’était « pas du tout venu dans cet esprit-là », assure le prévenu. Tout juste avait-il « envisagé » avec son ami Arthur C., placé lui aussi en garde à vue mais dont l’implication n’a pas été retenue, de faire « quelque chose de marquant ». Comme porter des gilets jaunes ou brandir un drapeau français, mais c’était risquer de se faire interpeller. Ou lui lancer un œuf ou une tarte à la crème, mais un ami l’avait prévenu que l’œuf, « ça pouvait être dangereux », alors il avait abandonné l’idée. Finalement, ce sera la gifle plus ou moins spontanée.

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