Vaccin contre le Covid-19 : le gouvernement juge « inacceptable » que Sanofi serve en premier les Etats-Unis – Le Monde
La réaction du gouvernement ne s’est pas fait attendre. Il serait « inacceptable » que le groupe pharmaceutique français Sanofi serve en priorité les Etats-Unis s’il trouve un vaccin contre le Covid-19, comme l’a affirmé son patron mercredi, a réagi jeudi 14 mai la secrétaire d’Etat à l’économie, Agnès Pannier-Runacher, au micro de Sud Radio :
« Pour nous, ce serait inacceptable qu’il y ait un accès privilégié de tel ou tel pays sous un prétexte qui serait un prétexte pécuniaire. »
Mme Pannier-Runacher a déclaré avoir « immédiatement contacté » le groupe pharmaceutique français après les propos de son directeur général. « Le patron de Sanofi France m’a confirmé que le vaccin serait accessible à tous les pays et évidemment (…) aux Français, ce d’autant qu’il a des capacités de production en France », a-t-elle expliqué.
Devant l’ampleur de la polémique, le responsable français du géant pharmaceutique a répondu dans la matinée sur BFM-TV que Sanofi ne distribuerait pas prioritairement aux Etats-Unis un éventuel vaccin contre le Covid-19 si l’Union européenne se montre aussi « efficace » pour financer son développement :
« Les Américains sont efficaces en cette période. Il faut que l’UE soit aussi efficace en nous aidant à mettre à disposition très vite ce vaccin. »
Une avance de « quelques jours ou quelques semaines »
Mercredi, le directeur général du groupe, Paul Hudson, a affirmé que Sanofi servirait « en premier » les Etats-Unis s’il trouvait un vaccin, car ce pays « partage le risque » des recherches dans le cadre d’un partenariat avec l’Autorité pour la recherche et le développement avancés dans le domaine biomédical (Barda). Le gouvernement américain « a le droit aux plus grosses précommandes », car les Etats-Unis « ont investi pour essayer de protéger leur population », a-t-il argué dans un entretien à l’agence de presse Bloomberg. Il a précisé que cette avance pourrait être de quelques jours ou de quelques semaines.
Dans la soirée, le groupe avait précisé dans un communiqué que « la production sur le sol américain sera[it] principalement dédiée aux Etats-Unis et le reste de [ses] capacités de production sera[it] alloué à l’Europe, à la France et au reste du monde », s’engageant toutefois à ce que son éventuel vaccin « soit accessible à tous ».
Une « décision scandaleuse »
« Cette décision est scandaleuse ! Le gouvernement doit agir avec la plus grande fermeté pour empêcher cette décision », a réagi mercredi matin le Parti socialiste dans un communiqué, ajoutant :
« L’engagement des Français pour développer un champion dans la filière de la santé ne peut pas aboutir à le voir préférer d’autres marchés pour lancer ses vaccins. […] Parce que la santé est un bien commun à soustraire aux jeux du marché, aucune entreprise française ne doit pouvoir jouer contre notre propre souveraineté sanitaire sans s’exposer à une nationalisation. »
Interrogée sur France Inter, Ségolène Royal, ancienne ministre de l’écologie, a dit de son côté : « Il est évident que la santé doit être exclue des règles du marché financier, ce n’est pas un bien comme un autre. »