Ukraine : inquiétude et manœuvres diplomatiques après une semaine de discussions infructueuses – Le Monde
A l’issue d’une semaine de discussions infructueuses entre les Etats-Unis et la Russie, la tension est loin d’être retombée en Ukraine, vendredi 14 janvier.
Les Etats-Unis ont accusé Moscou d’avoir posté des agents en Ukraine pour mener une opération qui pourrait servir de déclencheur d’une véritable invasion de sa part. La porte-parole de la Maison Blanche, Jen Psaki, a détaillé devant la presse les renseignements dont dit disposer Washington :
« La Russie jette les bases pour avoir la possibilité de créer de toutes pièces un prétexte pour une invasion, y compris à travers des actes de sabotage et des opérations d’information, en accusant l’Ukraine de préparer une attaque imminente contre les forces russes dans l’est de l’Ukraine. »
Les services de renseignement militaires ukrainiens ont émis vendredi un avertissement similaire.
« Aucune preuve » selon Moscou
Le gouvernement américain met en garde depuis plusieurs semaines contre la possibilité que Moscou, qu’il accuse d’avoir déployé près de 100 000 soldats à la frontière ukrainienne en vue d’une potentielle offensive, fabrique un « prétexte » pour pouvoir passer à l’acte. Le conseiller du président des Etats-Unis, Joe Biden, pour la sécurité nationale, Jake Sullivan, l’a encore dit jeudi devant la presse, promettant des détails. « Nous avons vu cette stratégie à l’œuvre en 2014 », lorsque la Russie a annexé la Crimée ukrainienne, « ils préparent cette stratégie à nouveau », a prévenu M. Sullivan. « Jusqu’ici, toutes ces déclarations ont été gratuites et n’étaient appuyées par aucune preuve », a déclaré le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, à l’agence de presse officielle TASS.
De son côté, l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN) a annoncé son intention de signer avec l’Ukraine un accord sur le renforcement de leur coopération contre les cyberattaques, au moment où plusieurs ministères ukrainiens étaient la cible d’un vaste piratage informatique.
La Russie a elle déclaré jeudi que ses efforts en vue de convaincre l’Occident d’empêcher l’expansion de l’OTAN vers l’est, par le biais notamment d’une intégration de l’Ukraine, l’avaient menée à une impasse et a menacé d’en tirer les conséquences, sans en préciser la nature.
Activité diplomatique
De son côté, le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, essaie de reprendre la main dans les négociations. Il a proposé une rencontre afin de désamorcer la crise à la frontière entre son pays et la Russie, a déclaré vendredi un de ses proches conseillers. « Le président Zelensky a proposé au président Biden, et nous pensons que cela peut se faire, d’organiser une rencontre trilatérale, peut-être par visioconférence, entre le président Biden, le président Zelensky et le président Poutine », a dit le chef du bureau présidentiel ukrainien, Andrii Iermak, lors d’un événement organisé par le cercle de réflexion américain Atlantic Council. « Nous attendons encore la réponse de la partie russe, mais nos partenaires américains ont accueilli notre proposition avec un certain intérêt », a-t-il expliqué.
« Je pense que c’est une position proactive, qui implique l’Ukraine dans la négociation. S’il s’agit de discuter de l’architecture de sécurité en Europe, il est nécessaire d’impliquer l’Ukraine », a-t-il encore estimé. Le chef de l’Etat ukrainien avait déjà appelé mardi à un sommet quadripartite avec Moscou, Paris et Berlin pour « mettre fin au conflit » avec les séparatistes prorusses dans l’est de son pays.
La ministre des affaires étrangères allemande, Annalena Baerbock, se rendra lundi à Kiev, où elle s’entretiendra notamment avec Volodymyr Zelensky, puis le lendemain à Moscou, pour un entretien avec son homologue russe, Sergueï Lavrov.
« Nous ferons une visite commune en Ukraine dans les jours qui viennent (…) sur la ligne de démarcation » entre séparatistes prorusses et forces ukrainiennes, a annoncé pour sa part Jean-Yves Le Drian, chef de la diplomatie française, lors d’une réunion des ministres des affaires étrangères de l’Union européenne à Brest. Cette visite commune est programmée « début février », a précisé une source diplomatique française.