Tuerie à la Préfecture de police : l’opposition veut une commission d’enquête à l’Assemblée – Le Monde

Le ministre l’intérieur, Christophe Castaner, au centre, et le préfet de la police de Paris, Didier Lallement, deuxième à droite, quittent le siège de la Préfecture de police de Paris, jeudi 3 octobre 2019, après l’attaque.

Après l’attaque qui a fait quatre morts à la Préfecture de police de Paris (PP), l’exécutif fait l’objet de vive critiques de la part de l’opposition, qui va demander mardi 8 octobre l’ouverture d’une commission parlementaire. Ces critiques surviennent alors que la piste de la radicalisation est désormais privilégiée dans l’enquête sur la tuerie, dont le Parquet national antiterroriste (PNAT) s’est saisi, vendredi 4 octobre.

Plusieurs éléments recueillis par les enquêteurs ont, en effet, conduit à accréditer l’hypothèse d’une radicalisation de Mickaël Harpon, l’employé de la direction du renseignement de la Préfecture de police de Paris (DRPP) qui a poignardé à mort, jeudi 3 octobre, quatre de ses collègues. Des charges qui vont à l’encontre des premières déclarations du ministre de l’intérieur, Christophe Castaner, quelques heures après l’attentat. Ce dernier avait affirmé que cet employé, atteint de surdité et en poste à la PP depuis 2003, « n’avait jamais présenté de difficultés comportementales », ni « le moindre signe d’alerte ».

« Il faudra comprendre pourquoi et comment une telle chose est possible », a affirmé l’ancien président Nicolas Sarkozy, en déplacement avec Christian Jacob à Provins, se disant « bouleversé par ce qu’il s’est passé » et soulignant « la sauvagerie inouïe de ces assassinats ».

« Faire la lumière sur les dysfonctionnements »

Le patron des députés Les Républicains, Christian Jacob, a annoncé samedi qu’il allait demander une « commission d’enquête » à l’Assemblée sur l’attaque, certains parlementaires exigeant par ailleurs la démission du ministre de l’intérieur, Christophe Castaner.

« Mardi en conférence des présidents, je vais demander la mise en place d’une commission d’enquête sur l’affaire de la préfecture de police », a déclaré le candidat à la présidence de LR, précisant qu’il souhaitait la voir commencer « ses travaux dans les plus brefs délais ». « L’affaire est très grave. »

Il faut la prendre « très au sérieux parce qu’elle engage la sécurité, l’efficacité de nos services de renseignement », a-t-il insisté, précisant que son groupe était prêt à utiliser son « droit de tirage » annuel qui lui permet d’inscrire une demande de commission d’enquête à l’ordre du jour de l’Assemblée.

Le député LR des Alpes-Maritimes Eric Ciotti a déclaré, dans un communiqué, avoir déposé, avec l’accord de Christian Jacob, une proposition de résolution « relative à la création d’une commission d’enquête parlementaire chargée de faire la lumière sur les dysfonctionnements ayant conduit aux attaques commises à la Préfecture de police de Paris jeudi 3 octobre 2019 ».

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« Mardi matin, la conférence des présidents demandera la création d’une commission parlementaire », a confirmé au Monde Eric Diard, député LR des Bouches-du-Rhône, auteur d’un rapport sur la radicalisation dans les services publics. Le groupe LR disposant encore en ce début de session, d’un droit de tirage, « la constitution de cette commission à la demande de Christian Jacob est assurée », précise-t-il.

« Je ne suis pas complètement surpris », dit le député. Selon lui, lors de la préparation du rapport rendu en juin, le préfet de police de Paris, alors Michel Delpuech, avait fait état de quinze personnes suivies pour radicalisation sur 43 000 agents, dix qui avaient un comportement assimilable à de la radicalisation, cinq pour avoir des contacts avec des personnes radicalisées. « L’homme aurait dû être surveillé en permanence, il aurait du faire partie des quinze suivis !, dit-il. L’enquête et la commission d’enquête nous le diront. »

Appels à la démission

Partant du même constat, Eric Ciotti concentre ses attaques sur le ministre de l’intérieur, dont il réclame la démission. « Soit il a voulu dissimuler des faits en connaissance de cause, ce que je ne peux pas croire parce que ce serait un scandale d’Etat, soit il maîtrise tellement peu les sujets qu’il s’est aventuré à parler sans savoir », avance-t-il, en référence aux propos initiaux du ministre quant au fait que l’auteur de l’attaque n’avait « jamais présenté de difficulté comportementale ».

« Sa parole à tout le moins imprécise imprudente et même fantaisiste fait suite à des déclarations totalement non maîtrisées, quand il évoque un risque zéro à Lubrizol, quand il annonce l’envahissement d’un hôpital par des manifestants, quand il change de stratégie de maintien de l’ordre… », poursuit-il. « On a un ministre de l’intérieur qui a perdu toute crédibilité. Le seul qui a de la crédibilité en interne, c’est Laurent Nunez. »

Même ton du président du groupe LR au Sénat, Bruno Retailleau : « Le ministre de l’intérieur doit répondre à cette question : comment un individu présentant un tel profil (signalement en 2015, fréquentation d’un imam proche des frères musulmans) a-t-il pu occuper un poste dans un service sensible de la préfecture de police ? », a-t-il critiqué sur son compte Twitter en reprenant des informations de certains médias.

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Le député Guillaume Larrivé, également candidat à la présidence LR, a lui aussi demandé la démission du ministre de l’intérieur, Christophe Castaner. « Je l’écris avec gravité. Trop c’est trop. Le ministre de l’intérieur n’est pas capable d’assumer sa mission. Il ne peut pas rester en fonctions. Il en va de la sécurité nationale », a-t-il affirmé, se demandant s’il y avait une volonté de « dissimulation » du ministre lorsqu’il a déclaré jeudi que le tueur n’avait jamais présenté de signe d’alerte.

Un « certain amateurisme »

David Habib, député des Pyrénées-Atlantiques et secretaire national à la sécurité au Pati socialiste (PS), demande que « M. Castaner affronte la vérité en nommant une commission d’enquête sous l’autorité du Parlement » :

« Il faut distinguer l’historique et identifier les responsabilités. C’est quand même la Préfecture de police, pas un endroit anodin. Les dernières informations laissent à penser qu’il y a eu, pour le moins, un certain amateurisme dans le recrutement des agents de la PP et que les remontées d’informations qui auraient dû se faire ne l’ont pas été. »

Le monsieur sécurité du PS ne demande pas comme la droite et l’extrême droite la démission du ministre de l’intérieur : « il y a quatre morts, Il faut respecter un délai avant de demander des têtes. Il n’y aura pas de fusible. Il faut seulement que Castaner affronte la vérité ».

A l’extrême droite, Nicolas Dupont-Aignan, président de Debout la France réclame lui la démission de Christophe Castaner. « Soit le gouvernement est inconscient de la menace islamiste, soit il cherche à taire la réalité pour cacher une faille majeure de sécurité », déclare M. Dupont-Aignan, se positionnement sur la même ligne que le Rassemblement national.

Sous le mot clé, #CastanerDémission plusieurs membres du parti d’extrême droite, à l’instar de Jordan Bardella, vice-président du Rassemblement national, ont également réclamé le départ du ministre de l’intérieur.

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