Trump visé par deux enquêtes, le ministre de la justice nomme un procureur spécial – Le Monde

Le procureur général Merrick Garland annonce la nomination de Jack Smith en tant que procureur spécial pour les enquêtes sur les actions de l’ancien président Donald Trump, à Washington, le 18 novembre 2022.

Le ministre de la justice américain, Merrick Garland, a annoncé, vendredi 18 novembre, la nomination d’un procureur indépendant, Jack Smith, pour superviser les enquêtes concernant l’ancien président Donald Trump. Le milliardaire, qui vient de se déclarer candidat pour l’élection présidentielle de 2024, est actuellement visé par deux enquêtes distinctes de la justice fédérale.

« Etant donné les développements récents, notamment l’annonce de la candidature à la prochaine élection présidentielle de l’ex-président et l’intention de candidature de l’actuel président, j’ai décidé qu’il était de l’intérêt du public de nommer un procureur spécial », a affirmé Merrick Garland lors d’une conférence de presse. Jack Smith a quant à lui promis, dans un communiqué, d’agir « vite » et « en toute indépendance ». Donald Trump a déclaré, de son côté, que le procureur « ne va pas enquêter de façon impartiale ».

« Ce terrible abus de pouvoir est le dernier en date dans une longue série de chasses aux sorcières qui ont débuté il y a longtemps », a clamé l’ancien président lors d’une allocution, vendredi soir, dans sa résidence de Mar-a-Lago, en Floride. « Je subis ces enquêtes, cette comédie et ces arnaques depuis le jour où je suis descendu de l’escalator de la Trump Tower », a-t-il fustigé. « Nous ne pouvons pas laisser ces abus atroces perdurer », a-t-il ajouté.

Quinze cartons

La première enquête porte sur l’assaut mené par des partisans de Donald Trump contre le Capitole le 6 janvier 2021, au moment de la certification de la victoire de son rival démocrate, Joe Biden, à la présidentielle de 2020. Cette enquête tentaculaire a entraîné l’inculpation de près de 900 personnes ayant directement participé aux violences. Mais les procureurs n’ont jamais exclu de s’intéresser à d’autres acteurs. « Chaque personne qui est pénalement responsable des efforts pour annuler l’élection devra répondre de ses actes », a déclaré Merrick Garland à plusieurs reprises.

La seconde enquête porte sur les archives de la Maison Blanche. En quittant la présidence, Donald Trump a emporté des boîtes entières de documents. Or une loi de 1978 oblige tout président américain à transmettre l’ensemble de ses courriels, lettres et autres documents de travail aux archives nationales. En janvier, il a rendu quinze cartons.

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Après examen, la police fédérale a estimé qu’il en conservait probablement d’autres dans sa luxueuse résidence de Mar-a-Lago, en Floride. Des agents du FBI y ont mené le 8 août une perquisition spectaculaire, s’appuyant sur un mandat pour « rétention de documents classifiés » et « entrave à une enquête fédérale », et ont saisi une trentaine d’autres boîtes. Une intense bataille judiciaire s’est alors ouverte pour déterminer la nature des documents saisis – classifiés, personnels, déclassifiés ? –, ce qui a ralenti la procédure, mais, là encore, une inculpation fédérale reste possible.

Après avoir réuni tous les éléments, le procureur spécial « exercera son jugement professionnel de manière indépendante pour décider s’il doit y avoir une inculpation », dans l’un ou l’autre de ces dossiers, a précisé M. Garland. M. Smith ne sera toutefois chargé que d’émettre une recommandation et il reviendra au ministre de trancher. S’il devait finalement inculper Donald Trump sur cette base, sa décision sera plus difficile à attaquer. L’ouverture de poursuites n’empêcherait pas le magnat de l’immobilier de concourir, mais jetterait une ombre sur sa candidature.

Procureur vétéran

Donald Trump a estimé dans un entretien avec Fox que cette nomination était « injuste » et « politique ». Dénonçant « la pire politisation de la justice » de l’histoire américaine, le républicain a ajouté qu’il ne participerait pas aux investigations. « C’est honteux, ils font ça juste parce que je suis en tête des sondages », a poursuivi l’ancien président. La porte-parole de la Maison Blanche, Karine Jean-Pierre, a fait savoir que Joe Biden n’avait pas été averti « à l’avance » de la nomination d’un procureur indépendant, et n’avait pas été « impliqué » dans la décision.

Jack Smith est un procureur vétéran. Il a servi au ministère comme chef de la section de l’intégrité publique, dirigeant une trentaine de personnes chargées de mener des poursuites en matière de corruption et d’élections, ainsi qu’à la Cour pénale internationale. Depuis 2018, il est le procureur principal du Tribunal spécial pour le Kosovo.

Dans le passé, Donald Trump a déjà fait l’objet d’une enquête supervisée par un procureur spécial : Robert Mueller avait été chargé en 2017 d’établir s’il y avait eu une collusion entre son équipe de campagne et la Russie. Après deux ans d’enquête, il avait jugé ne pas avoir assez de preuves attestant un complot entre Moscou et l’équipe de Donald Trump, mais avait relevé une série de pressions troublantes exercées par le locataire de la Maison Blanche sur son enquête. Il s’était dit incapable de le blanchir des soupçons d’entrave à la justice.

Le Monde avec AP et AFP

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