« Troisième tour » à suspense et tractations pour élire le nouveau maire de Marseille – Le Monde

Après une semaine folle à Marseille, le conseil municipal doit élire, samedi 4 juillet, celui ou celle qui succédera à Jean-Claude Gaudin dans une ambiance tendue, marquée par des tractations âpres autour de la sénatrice ex-PS Samia Ghali et le départ théâtral des élus RN dès les premières minutes de la séance.

En fin de matinée, la candidate de l’union de la gauche Michèle Rubirola est arrivée en tête du premier tour de vote et a fait le plein de ses voix (42 bulletins), mais n’a pas obtenu la majorité absolue nécessaire pour devenir maire de la deuxième ville de France. Le député LR Guy Teissier a lui aussi fait le plein (41 bulletins). Forte de neuf élus, la sénatrice ex-PS des quartiers Nord Samia Ghali n’a par contre drainé que huit bulletins. Un vote blanc a été comptabilisé. Un deuxième tour est donc nécessaire.

Négociations et bain de foule

Une suspension de séance a été demandée avant le deuxième tour par Michèle Rubirola et Samia Ghali pour entamer de nouvelles discussions. La chef de file du Printemps marseillais en a profité pour aller à la rencontre de ses sympathisants, rapportent nos journalistes à Marseille. La séance devrait reprendre à 14 h 15, après la « pause déjeuner ».

La séance avait débuté, samedi matin à à 9 h 30, dans une atmosphère électrique : quelque 200 manifestants, en majorité des soutiens de la liste d’union de la gauche du Printemps marseillais, étaient rassemblés devant l’hôtel de ville. Sur leurs pancartes, « Michèle maire sont des mots qui vont très bien ensemble », « Ne nous laissons pas voler la victoire » ou « On veut des écoles rénovées, pas des fachos réchauffés ».

Le départ des élus RN

Coup de théâtre dès l’ouverture du conseil : Stéphane Ravier, leader du Rassemblement national (RN), et les neuf élus regroupés autour de lui ont quitté l’hémicycle :

« Nous ne présenterons pas de candidat, nous ne participerons pas au vote (), nous laissons les magouilleurs, les marchands de tapis et ceux qui confisquent la démocratie, nous vous laissons entre vous », a tonné le sénateur RN Stéphane Ravier.

Samia Ghali était directement dans le collimateur de M. Ravier : « La ville de Marseille est prise en otage par une élue qui ne représente que 2,89 % des Marseillais », a-t-il fustigé. Dans son viseur, les négociations qui ont duré toute la semaine autour de la sénatrice des quartiers Nord, dont les neuf sièges sont essentiels pour décrocher une majorité.

Après le départ des élus RN et le renoncement, samedi matin, de Lionel Royer-Perreaut (LR), il ne reste plus que trois candidats en lice : Michèle Rubirola pour l’union de la gauche du Printemps marseillais, Guy Teissier pour LR et la sénatrice Samia Ghali.

Samia Ghali en arbitre

Tous les regards sont, désormais, tournés vers la sénatrice ex-PS, réélue dimanche soir dans son fief des quartiers Nord de la ville, qui exigeait le poste de première adjointe pour prix de son soutien au Printemps marseillais. Une demande sèchement refusée par la chef de file de l’union de la gauche et des écologistes, Michèle Rubirola.

Depuis, le torchon brûle entre les deux camps, et Mme Ghali, après avoir dans la nuit revendiqué sa liberté de vote, a fustigé samedi matin les « oukases » de Mme Rubirola et de Benoît Payan, son porte-parole, lui aussi élu dimanche soir dans un secteur du centre-ville.

Malgré ses 38,3 % obtenus au second tour, loin devant les listes LR (30,8 %), Michèle Rubirola, 63 ans, médecin dans des quartiers populaires et écologiste de la première heure, est loin d’être assurée de devenir la première femme à la tête de la deuxième ville de France.

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« Ce sera à pile ou face »

Loi PLM (Paris-Lyon-Marseille) oblige, l’élection se fait par secteurs. Et aucune majorité absolue n’est sortie des urnes : 42 élus pour le Printemps marseillais, 41 à droite en comptant les deux sièges restant au dissident LR Bruno Gilles. Loin, donc, des 51 voix nécessaires, sur 101, pour conquérir l’hôtel de ville et sa vue imprenable sur le Vieux-Port et la « Bonne Mère ».

Mais tous ces calculs ont été bouleversés par le retrait des élus RN : la majorité absolue nécessaire pour élire le maire aux deux premiers tours de scrutin ne concerne que les suffrages exprimés, soit 47 voix sans le RN, à supposer qu’il n’y ait aucune autre abstention.

En tout cas, l’échec apparent des négociations du Printemps marseillais avec Mme Ghali pourrait barrer la route définitivement à Mme Rubirola. L’élu communiste Jean-Marc Coppola, membre du Printemps marseillais, s’est déclaré avant la séance « plutôt confiant », même s’il a reconnu ne pas pouvoir prédire « le degré d’inconscience de certains », une allusion à peine voilée à Samia Ghali et ses huit colistiers. « Ce sera à pile ou face », a lâché, de son côté, Sophie Camard, une autre élue du Printemps marseillais.

Côté Les Républicains, l’appui de Samia Ghali est également essentiel. Car eux aussi sont loin de la majorité absolue, et le retrait du Rassemblement national les prive d’éventuelles voix de ce côté – une opportunité que tous leurs leaders avaient, de toute façon, écartée.

Pour les représenter, le parti, plombé par une campagne marquée par l’ouverture d’une enquête sur des soupçons de fraudes aux procurations, a changé son fusil d’épaule. Battue dans les 6e et 8e arrondissements, considérés comme acquis à la droite, Martine Vassal, dauphine désignée de Jean-Claude Gaudin, a cédé la place à Guy Teissier, 75 ans, un vieux routier issu de la droite dure.

Avantage supplémentaire pour le député LR : prime au doyen oblige, il l’emporterait au troisième tour, disputé à la majorité relative, si deux candidats étaient à égalité…

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Le Monde avec AFP, AP et Reuters

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