Syrie : plus de 60 000 déplacés par l’offensive turque, une réunion de l’ONU attendue – Le Monde

A la frontière turco-syrienne, jeudi 10 octobre.

Les forces kurdes en Syrie luttent, jeudi 10 octobre, pour contenir un assaut de la Turquie, au lendemain du lancement de l’offensive d’Ankara dans le nord-est du pays en guerre, faisant craindre une nouvelle crise humanitaire. L’offensive de la Turquie a provoqué un tollé international et une réunion d’urgence du Conseil de sécurité de l’ONU est prévue jeudi.

Alors que les Occidentaux craignent une résurgence du groupe Etat islamique (EI), dont la défaite en Syrie est en grande partie due aux forces kurdes, le président français, Emmanuel Macron, a appelé la Turquie à « mettre un terme le plus rapidement possible » à son offensive.

L’une des conséquences attendues de l’offensive de la Turquie a notamment été la fuite de plus de 60 000 civils, précipités sur les routes de l’exode, fuyant des secteurs directement à la frontière, a rapporté l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH). Ces déplacés fuient « les secteurs à la frontière, en particulier les zones de Ras Al-Aïn et Derbassiyé », a précisé l’Observatoire, expliquant que ces civils se dirigeaient vers des territoires plus à l’est, notamment la ville de Hassaké.

Juchés sur des camionnettes, emportant avec eux frigidaires, bonbonnes de gaz, matelas et gros sacs de jute bourrés d’affaires, des femmes et des enfants sont arrivés dans la ville de Tall Tamr, plus au sud et épargnée par les combats, a constaté un correspondant de l’Agence France-Presse (AFP) sur place. L’ONG Save The Children a mis en garde contre « un désastre humanitaire imminent ». « Avec l’hiver qui approche, ils devront faire face à des défis supplémentaires », prévient-elle.

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Des civils tués

Après des heures de bombardements, l’armée turque et ses supplétifs syriens ont pénétré, mercredi, dans le nord-est de la Syrie dans les territoires contrôlés par les Forces démocratiques syriennes (FDS) – une coalition de combattants dominés par les Kurdes –, qui, alliées aux Américains dans la région depuis 2015, ont payé un lourd tribut à la lutte contre l’organisation Etat islamique (EI).

« Les forces armées turques et l’Armée nationale syrienne [le nouveau nom des rebelles syriens soutenus par Ankara] ont commencé l’opération “Source de paix” dans le nord de la Syrie. » C’est par ce message, rédigé en turc, en anglais et en arabe, sur le compte Twitter du président turc, que le nouveau front s’est ouvert dans cette région jusqu’ici plutôt stable grâce aux efforts conjoints des FDS et de leurs alliés occidentaux – américains, français et britanniques.

Dès mercredi après-midi, l’aviation et l’artillerie turques ont pris pour cibles plusieurs localités frontalières du nord de la Syrie – Tall Abyad, Ras Al-Aïn, Kamechliyé, Ayn Issa et Kobané. Depuis mercredi, au moins 23 combattants des forces kurdes et 9 civils ont été tués par les frappes aériennes et les tirs d’artillerie de l’armée turque, selon l’OSDH. Des équipes humanitaires ont déclaré être en train d’évacuer le nord-est de la Syrie.

Au moins quatre civils, dont un bébé, ont été tués et 46 autres blessés jeudi par des projectiles tirés sur des villes frontalières turques par une milice kurde syrienne qui fait l’objet d’une offensive d’Ankara, selon les autorités locales.

Tollé international

L’offensive de la Turquie a provoqué un tollé international, plusieurs pays craignant une résurgence de l’organisation djihadiste Etat islamique (EI). Une réunion d’urgence du Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations unies (ONU) doit avoir lieu jeudi.

Le président français, Emmanuel Macron, a appelé jeudi la Turquie « à mettre un terme le plus rapidement possible » à son offensive qui « risque d’aider Daech [acronyme arabe de l’Etat islamique] à reconstruire son califat ». « Elle doit cesser », a également martelé le ministre des affaires étrangères français, Jean-Yves Le Drian.

De son côté, la Ligue arabe a convoqué une réunion d’urgence samedi pour discuter de l’offensive lancée par la Turquie contre les forces kurdes en Syrie, a fait savoir l’organisation panarabe tard mercredi.

De son côté, Téhéran, puissant allié du pouvoir de Bachar Al-Assad, a réclamé une « cessation immédiate » de l’opération. La Russie, principal soutien de Damas, a souligné la « nécessité d’établir un dialogue » entre Ankara et le régime syrien. Damas, qui a dénoncé les « ambitions expansionnistes » de la Turquie, voit d’un mauvais œil l’autonomie de facto établie par la minorité kurde, qu’elle s’est dit prête à accueillir dans son giron.

Les Kurdes syriens ont été aux avant-postes de la lutte contre l’organisation djihadiste avec le soutien aérien de la coalition internationale anti-EI. En mars 2019, les Forces démocratiques syriennes (FDS), coalition à majorité kurde, se sont emparées de l’ultime bastion syrien de l’EI à Baghouz. Mais le groupe djihadiste reste actif dans la clandestinité.

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