Sortie perturbée de Macron au théâtre : le reporter Taha Bouhafs présenté à un juge d’instruction – Le Parisien

Le journaliste et militant Taha Bouhafs, qui avait signalé sur Twitter la présence d’Emmanuel Macron vendredi au théâtre parisien des Bouffes du Nord, est sorti de garde à vue ce samedi soir.

Le parquet de Paris a ouvert dans la foulée une information judiciaire pour « participation à un groupement formé en vue de commettre des violences ou des dégradations » et « organisation d’une manifestation non-déclarée ». Le juge d’instruction doit se prononcer dans la soirée sur son éventuelle mise en examen.

Pour rappel, la représentation à laquelle assistait le chef de l’Etat a été brièvement perturbée par une tentative d’intrusion de manifestants dans le théâtre, au 44e jour de grève contre la réforme des retraites.

« Si vous informez, vous risquez la prison »

« Par cette demande, l’objectif du Parquet est de garder le portable de Taha Bouhafs et le bénéfice du secret de l’instruction, pour masquer le vide du dossier… », a déclaré Me Arié Alimi, selon le journaliste indépendant proche de Taha Bouhafs, David Dufresne.

« C’est un message adressé par l’exécutif et le parquet à tous les journalistes. Si vous informez, vous risquez la prison », a ajouté l’avocat. Dans la soirée, un collectif rassemblant des médias (L’Humanité, Mediapart…), des syndicats et des associations (Attac, LDH) a également dénoncé cette procédure judiciaire. « Il est inconcevable que le procureur de la République de Paris, Rémy HEITZ, prenne la décision de priver ce journaliste de sa liberté à la demande de l’Elysée et du GSPR alors même qu’il n’a commis aucune infraction », peut-on lire dans ce communiqué.

Retour sur les faits. Avant le début de la pièce de théâtre, Taha Bouhafs avait expliqué sur Twitter se trouver « trois rangées derrière le président de la République ». À noter qu’il n’est pas le seul internaute, et pas le premier, à avoir signalé sur les réseaux sociaux la présence du président de la République.

« Des militants sont quelque part dans le coin et appellent tout le monde à rappliquer. Quelque chose se prépare… la soirée risque d’être mouvementée », avait-il ajouté.

Il avait ensuite demandé à ses dizaines de milliers d’abonnés s’il devait ou non lancer ses chaussures sur le président, à l’image du célèbre geste d’un journaliste irakien contre le président américain Georges W. Bush en 2008. « Je plaisante […] la sécu me regarde bizarre là », avait-il ensuite lâché.

L’arrestation de Taha Bouhafs, qui filme les mouvements sociaux pour le site d’information Là-bas si j’y suis, a suscité de nombreuses réactions. « On arrête un journaliste pour avoir tweeté sur la présence du Méprisant au théâtre. Bienvenue en #Macronie », a réagi sur Twitter la député France Insoumise Danièle Obono.

« Il n’a commis aucun délit. Du coup ce qui lui est fait en devient un. Étrange silence des éditorialistes ! Ils ont peur eux aussi ? », a déclaré ce samedi soir Jean-Luc Mélenchon sur Twitter.

Son statut de journaliste mis en cause

À l’image des députés de la majorité LREM (Aurore Bergé, Célia de Lavergne), de nombreuses personnalités politiques ont refusé de qualifier de journaliste ce jeune homme de 22 ans, anciennement militant de la France insoumise. « Taha a informé, comme n’importe quel journaliste l’aurait fait, qu’il se trouvait dans la même salle que le président de la République et que des manifestants se trouvaient à l’extérieur », a répondu le site d’information Là-bas si j’y suis, par la voix de son fondateur Daniel Mermet.

En 2019, il indiquait à Libération ne plus être impliqué dans le parti insoumis. Et réfute désormais le terme de « journaliste militant » en expliquant à Libération : « L’étiquette militant je serais OK, si on la donne aux autres. Quand ce n’est que pour moi, ça veut dire que je suis journaliste mais pas trop quand même ».

Taha Bouhafs, aussi connu pour avoir filmé Alexandre Benalla en train de violenter un couple à Paris le 1er mai 2018, avait déjà été placé en garde à vue en juin alors qu’il couvrait une manifestation en banlieue parisienne, s’attirant le soutien d’une partie de la profession. Il doit être jugé le 25 février à Créteil pour « outrage et rébellion ».

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