Scandale Orpea : l’Etat saisit la justice et va réclamer la restitution de certaines dotations publiques – Le Monde

Logo du groupe Orpea à l’entrée de l’Ehpad de Rezé, le 2 février 2022.

Après six semaines d’enquête, l’inspection générale des affaires sociales (IGAS) et l’inspection générale des finances (IGF) ont rendu leurs conclusions sur le groupe d’hébergement de personnes âgées Orpea. Relevant des « dysfonctionnements graves » ainsi que des « manquements sur le plan humain et organisationnel », la ministre déléguée chargée de l’autonomie, Brigitte Bourguignon, a annoncé samedi 26 mars sur France Inter que l’Etat va déposer plainte contre le groupe et réclamera le remboursement des dotations publiques présumées détournées de leurs fins.

« Au regard de dysfonctionnements graves, nous sommes en mesure de vous dire que l’Etat porte plainte et saisit le procureur de la République », a dit la ministre, en s’appuyant sur les rapports des inspections administratives.

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Le rapport d’enquête établi par l’IGF et l’IGAS, saisies par le gouvernement le 1er février, fait état de « dysfonctionnements significatifs dans l’organisation du groupe, au détriment de la prise en charge des résidents », a précisé le ministère dans un communiqué. Très attendu depuis des semaines, ce rapport ne sera cependant pas rendu public, car couvert par le « secret des affaires », a précisé à l’AFP le cabinet de Mme Bourguignon. Le 11 mars, le ministre de la santé, Olivier Véran, avait pourtant affirmé qu’il comptait publier une partie de ce document, plus exactement « la totalité, à l’exception de ce qui est couvert par le secret des affaires ».

Comment l’IGF et l’IGAS ont enquêté sur Orpea

La campagne éclair aura duré moins de six semaines. Mandatées par une lettre de mission datée du 1er février, paraphée par quatre ministres, les inspections générales des finances (IGF) et des affaires sociales (IGAS) avaient jusqu’au 14 mars pour faire la lumière sur les « graves accusations », selon le premier ministre, Jean Castex, contenues dans le livre de Victor Castanet sur Orpea, Les Fossoyeurs (Fayard, 400 pages, 22,90 euros). La double expertise devait permettre de passer au crible tous les faits relatés dans l’ouvrage. La méthode utilisée s’est située à trois niveaux.

Premier niveau : les inspections ont enquêté au sein du groupe. Au siège d’Orpea, à Puteaux (Hauts-de-Seine), ont été saisis des documents comptables. Dix Ehpad du groupe, au hasard dans six régions différentes, ont fait l’objet de visites inopinées des inspecteurs. Ces derniers ont passé en revue aussi bien les stocks de protection contre l’incontinence que les menus, décortiqués les plannings, les contrats de travail…

Pour vérifier la sincérité des informations d’Orpea sur l’utilisation de l’argent public, les inspecteurs ont confronté les données des directeurs d’établissement et celles des directions régionales du groupe. Mais aussi les documents du siège et ceux transmis aux agences régionales de santé (ARS) et aux conseils départementaux.

Deuxième niveau : l’IGF et l’IGAS se sont rapprochées des ARS. Les deux inspections ont examiné 41 rapports réalisés par les agences sur des Ehpad Orpea de 2018 à 2021. L’exécutif a demandé, début février, aux ARS de multiplier les inspections au sein des établissements du groupe : 150 établissements ont été contrôlés depuis fin janvier. L’IGF et l’IGAS ont établi des sondes dans ces inspections en cours.

Dernière dimension : les inspecteurs ont comparé Orpea avec d’autres groupes privés ou Ehpad publics pour établir des parallèles sur plusieurs indicateurs : le nombre de personnels pour 100 résidents, le nombre de CDD…

La publication en février du livre-enquête Les Fossoyeurs, dans lequel le journaliste Victor Castanet accuse le groupe privé d’avoir mis en place un « système » pour optimiser ses bénéfices au détriment du bien-être des résidents et employés, avait créé un véritable séisme au sein du secteur.

Alors qu’il estime que 10 % des établissements d’hébergement pour les personnes âgées dépendantes (Ehpad) font l’objet d’une inspection des agences régionales de santé (ARS) chaque année, le ministère de la santé a annoncé mardi le lancement d’une campagne qui vise à « contrôler les 7 500 Ehpad de France dans les deux ans à venir ». Les effectifs des ARS vont être renforcés grâce à une centaine de recrutements.

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Le Monde avec AFP

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