Rouen: trois ans après le drame du Cuba Libre, les gérants en procès – Le Figaro

Quatorze personnes ont trouvé la mort après un incendie survenu dans un bar de Rouen (Seine-Maritime) lors de la nuit du 5 au 6 août 2016. Deux frères quadragénaires encourent cinq ans de prison.

Brahim. David. Donatienne. Florian. Jennifer. Julie. Karima. Mavrick. Mégane. Ophélie. Romain. Sarah. Steeve. Zacharia. À partir de ce lundi 9 septembre et pour une dizaine de jours, leurs prénoms résonneront dans la salle des audiences solennelles du palais de justice de Rouen, où se tient le procès dit du «Cuba Libre». Il y a trois ans, dans la nuit du 5 au 6 août 2016, les quatorze jeunes gens étaient réunis dans ce bar situé sur la rive gauche de Rouen. Ce soir-là, Ophélie fêtait son vingtième anniversaire dans le sous-sol de l’établissement, une cave transformée en piste de danse dans laquelle officiait Zacharia en tant que DJ.

Le drame est survenu peu après minuit. Des témoins ont vu Sarah venir chercher le gâteau d’anniversaire au rez-de-chaussée, avant de redescendre l’étroit escalier menant au sous-sol. Sur le gâteau, des bougies – type feux de Bengale – éteintes. Quelques instants plus tard, des flammes sortaient de la cave sous les yeux horrifiés des fêtards. Treize des quatorze personnes citées plus haut y ont laissé la vie; la dernière, Karima, est morte des suites de ses brûlures un mois plus tard à l’hôpital. Six autres personnes ont été blessées. Entre 50 et 80 pompiers, ainsi que 40 policiers, ont été mobilisés sur les lieux du sinistre.

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L’issue de secours était verrouillée

Trois ans après le drame, Nacer et Amirouche B. Comparaissent cette semaine devant le tribunal correctionnel de Rouen. En août 2016, Amirouche était le gérant du Cuba Libre, mais son frère aîné Nacer, ancien gérant, restait le «patron», selon de nombreux témoignages. Placés sous contrôle judiciaire depuis septembre 2016, les deux frères encourent cinq ans de prison et 75.000 euros d’amende pour homicides involontaires et blessures ayant entraîné ou non une interruption temporaire de travail par violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement.

L’enquête a démontré que si l’incendie était purement accidentel, le terrible bilan humain de cette soirée résulte d’une série de «négligences». Parmi ces dernières, la faible hauteur du plafond au-dessus de l’escalier menant à la cave, l’utilisation de longues bougies, la présence d’un isolant acoustique pour les murs extrêmement inflammable, l’absence de système d’alarme, la non-déclaration aux autorités de la transformation de cette pièce en salle de danse… La défaillance «la plus problématique» est cependant ailleurs. Le soir du drame, la porte menant à l’issue de secours du sous-sol était verrouillée.

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«L’un des plus grands incendies de l’histoire récente de France»

Au vu de l’émotion suscitée par le drame, le procès du Cuba Libre est particulièrement attendu. Le tribunal examinera la personnalité des prévenus et s’intéressera à l’historique du bar, avant de se plonger dans le déroulé de la nuit du 5 au 6 août 2016 à l’aide d’experts. Les juges consacreront plusieurs journées à l’audition des victimes et familles de victimes, nombreuses à s’être portées parties civiles. La parole reviendra ensuite aux avocats de ces parties civiles, puis au procureur et enfin aux avocats de la défense – Me Akli Aït Taleb pour Nacer, Me Éric Dupond-Moretti pour Amirouche.

«Ce sinistre est l’un des plus grands incendies de l’histoire récente de France», souligne auprès du Figaro Me Gérard Chemla, conseil de la famille de Karima et de la Fédération nationale des victimes d’attentats et accidents collectifs (Fenvac). «Il ressemble terriblement à celui du 5-7, une discothèque iséroise qui avait été ravagée par les flammes le 1er novembre 1970, causant la mort de 146 jeunes âgés de 14 à 27 ans». L’avocat espère que le procès du Cuba Libre permettra de rappeler que «toute faute en matière de sécurité incendie est grave».

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