Retraites : «Les Français pourront se faire leur opinion», promet Edouard Philippe – Le Parisien

Pour Édouard Philippe, c’est « le D-Day, le jour le plus long! », s’en amuse un de ses amis. Ce mercredi à midi, devant le Conseil économique social et environnemental (Cese), le Premier ministre n’a pas le droit à l’erreur, en dévoilant les contours précis de sa réforme des retraites, l’une des plus importantes du quinquennat. Dix-huit mois après le début des consultations, son discours est attendu au tournant – d’autant plus qu’une très forte incertitude règne sur les annonces – dans un pays qui tourne au rythme des grèves et des manifestations depuis jeudi dernier.

Ce mardi soir à l’Elysée, il doit présenter avec Emmanuel Macron les ultimes arbitrages de sa réforme aux ténors de la majorité. Le Premier ministre les restituera mercredi à la mi-journée, avant d’en assurer le service après-vente le soir au 20 Heures de TF1. Le choix du Cese, composé de représentants du monde économique et social, n’a rien d’anodin. Le 12 septembre déjà, Édouard Philippe y était venu délivrer des éléments de calendrier sur la réforme. « Et il revient vers eux ce mercredi pour leur réserver la primauté de ses annonces. C’est clairement un geste vis-à-vis des partenaires sociaux, des corps intermédiaires », défend-on à Matignon, soucieux de montrer que l’exécutif joue « à fond la carte de l’horizontalité ».

« Pas de baguette magique »

Ce texte, Philippe le prépare depuis plusieurs jours, aidé par les conseillers du pôle social et santé à l’Elysée et Matignon, puis de son conseiller en communication Charles Hufnagel. « Ce sera un discours d’annonces, il veut de la clarté », résume sans plus en dire ce dernier.

« Je sais que beaucoup de Français se posent des questions sur le régime universel de retraite. Je veux que dès demain ( NDLR, mercredi ), ils aient des réponses claires, simples et factuelles. Ils pourront se faire leur opinion en toute liberté », confiait ce mardi au Parisien le Premier ministre, entre deux réunions. Notamment celle avec les députés de la majorité qu’il a alertés sur la suite de la grogne sociale : « Ce n’est pas parce que je fais un discours que les manifestations vont cesser », leur a-t-il expliqué, lucide au point de dire qu’il n’allait pas arriver « avec une baguette magique ».

VIDÉO. Grève : « Je suis prêt à m’endetter pour continuer à me battre »

Au risque de décevoir ? « Je suis quelqu’un de raisonnable. Je crois dans le bon sens des gens, et je crois que les gens attendent du bon sens de leur gouvernement », nous explique-t-il. Il y aura bien deux volets, laisse-t-il aussi entendre : la réforme par points dite « systémique » et les mesures – « paramétriques » – permettant d’équilibrer à terme le futur régime unique de retraites.

« Edouard, c’est un animal à sang-froid »

Le week-end dernier, Édouard Philippe a passé beaucoup de temps au téléphone, pour sonder des amis, des maires ou des députés. « Il avait besoin de capteurs en temps réel, pour sentir au plus près l’état de l’opinion sur le terrain », résume le ministre des Collectivités locales Sébastien Lecornu, lui aussi contacté.

Dans son bureau à l’hôtel de Matignon, les réunions avec les partenaires sociaux se sont poursuivies, souvent en présence du haut-commissaire aux retraites Jean-Paul Delevoye. En jeu, les concessions que le gouvernement serait prêt à faire, notamment sur les mesures d’âge ou de durée de cotisation. « C’est un fin négociateur. Il sait tenir les deals. Il aime ça, mais il ne lâche pas facilement. Et pas vite », décrit un de ceux qui l’ont vu à la manœuvre ces dernières semaines. « Edouard, c’est un animal à sang-froid. Plus c’est difficile, moins il s’énerve. C’est plutôt une vertu dans ces moments-là », loue son meilleur ami, l’eurodéputé Gilles Boyer.

Des moments de tension que Philippe intériorise, au point d’en porter physiquement quelques stigmates, comme cette légère dépigmentation de la peau apparue récemment sur un coin de sa barbe. « Peut-être une marque de fatigue, mais il gère très bien le stress », balaie un proche. « Il m’étonne par son calme. Il continue même de faire des blagues et des imitations en réunion », raconte un collaborateur.

Tranquille, vraiment ? « C’est une réforme sur laquelle il joue sa place. Il peut sauter, il en a forcément conscience », relate un ténor du gouvernement. Ce que nuance Gilles Boyer : « Ce n’est ni le premier ni le dernier moment crucial. Il sait depuis le début qu’il joue sa place tous les jours. A n’importe quel moment, tout peut s’arrêter. »

Quel était le projet initial porté par Emmanuel Macron ?

Parmi les mesures vertement contestées dans le projet de réforme, l’instauration d’un âge pivot en dessous duquel les pensionnaires ne peuvent prétendre à une retraite complète. Une mesure jugée purement comptable. Alors que, candidat à la présidentielle de 2017, Emmanuel Macron affirmait que « le problème des retraites n’est pas un problème financier ».

À l’époque, son ambition était simple et claire : mettre sur pied un régime universel qui soit juste, transparent et fiable. Autrement dit, regrouper l’ensemble des régimes en un seul. Un système où chaque euro cotisé donne accès aux mêmes droits, « quel que soit le statut du travailleur et l’origine de cette cotisation », avec un âge légal de départ à la retraite maintenu à 62 ans.

Pour lui, il fallait construire « un système adapté aux parcours professionnels et de vie d’aujourd’hui », en tenant compte de la diversité des carrières et sans pénaliser les changements de voie au cours de la vie professionnelle. Il promettait également que les pénibilités et les congés maternité seraient toujours pris en compte dans le calcul des droits à la retraite.

Réponse ce mercredi midi lors du discours d’Édouard Philippe, pour voir si la copie rendue sera conforme à la promesse.

Leave a Reply

Discover more from Ultimatepocket

Subscribe now to keep reading and get access to the full archive.

Continue reading