Retraites: Édouard Philippe joue la pédagogie – Le Figaro

Le premier ministre veut que le projet de loi soit voté avant l’été 2020 et promet une transition progressive.

Soucieux de déminer le terrain explosif de la réforme des retraites, le premier ministre a joué la carte de la pédagogie jeudi matin, face aux représentants de la société civile réunis au Conseil économique, social et environnemental (Cese). «Nos convictions sont fortes et notre détermination est entière, mais la réforme n’est pas écrite», a déclaré Édouard Philippe, affirmant vouloir adopter «la méthode de l’acte II» du quinquennat, soit «plus d’écoute» et «plus de dialogue».

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Le premier ministre a arrêté le nouveau calendrier: «Le projet de loi devra être voté avant la fin de la session parlementaire de l’été prochain», a-t-il indiqué, c’est-à-dire avant juillet 2020. D’ici là, la concertation engagée depuis 18 mois avec les partenaires sociaux va se poursuivre, mais va aussi s’engager avec les Français. «Il ne s’agit pas de faire un «copier-coller» du grand débat, mais nous en reprendrons l’esprit», a indiqué Édouard Philippe. Mais le gouvernement va organiser des réunions publiques autour d’élus locaux ou d’associations et lancer d’ici à fin septembre une plateforme en ligne où chacun pourra s’exprimer.

Le premier ministre s’est voulu rassurant alors qu’une grande grève à la RATP bloque les transports ce vendredi, que les professions libérales appellent à manifester lundi, suivies par Force ouvrière le 21 et la CGT le 24. Conscient des inquiétudes, le chef du gouvernement a réaffirmé quatre grands principes. Le système universel ne concernera «ni les retraités, ni les actifs proches de la retraite» mais uniquement les actifs nés après 1963.

«Nous sommes prêts à nous donner tout le temps nécessaire»

Édouard Philippe

Par ailleurs, «les droits acquis dans l’ancien système seront conservés à 100 %», a-t-il réaffirmé. Sans toutefois préciser comment s’effectuera cette conversion complexe à mettre en œuvre. D’autre part, la convergence entre les anciens systèmes et le nouveau sera longue. «Nous sommes prêts à nous donner tout le temps nécessaire», a affirmé Édouard Philippe. Le haut-commissaire Jean-Paul Delevoye a parlé de 15 ans. Cela signifie que le nouveau système ne s’appliquerait entièrement qu’à partir de 2040.

Enfin, s’il n’entend céder à aucune revendication catégorielle, le premier ministre se dit prêt à étudier les difficultés posées par la réforme profession par profession. «Si, pour certaines professions, la période de transition» entre l’ancien et le nouveau système «doit être plus longue, nous l’allongerons».

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Édouard Philippe est également revenu sur plusieurs sujets qui ont émaillé le débat ces dernières semaines. Alors que Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT, estime que le régime des retraites est quasiment à l’équilibre et qu’il n’y a donc pas de nécessité budgétaire à réformer, le premier ministre a indiqué que «les départs à la retraite resteront très nombreux dans les années à venir et tout porte à croire que ce déficit va fortement se dégrader». Alors que le régime comptait 4 actifs pour 1 retraité en 1960, ils n’étaient plus que 2 actifs pour 1 retraité en l’an 2000, et l’on tombera à 1,5 actif pour 1 retraité en 2040. Pour que le débat s’engage sur des bases «incontestables», le premier ministre a annoncé qu’il allait, dès la semaine prochaine, saisir le Conseil d’orientation des retraites (COR) sur la situation financière du régime afin qu’il indique «d’ici au mois de novembre, quelle sera selon lui, la situation financière de notre système de retraites durant la prochaine décennie».

«Réforme courageuse»

D’autre part, sur le sujet de l’âge du taux plein (celui qui permet de partir avec une retraite complète), le premier ministre s’est refusé à trancher entre partisans de l’âge pivot et partisans de la durée de cotisation. «Il existe un certain nombre d’outils qui permettent de conjuguer durée et âge», a-t-il indiqué, ajoutant que «les concertations doivent évaluer avec soin les avantages et les inconvénients de chaque option».

Mais, durée ou âge, parce qu’il faudra travailler plus longtemps, le premier ministre a insisté sur la nécessité de réfléchir au maintien dans l’emploi des séniors et au passage de l’activité à la retraite.

Ce discours a été bien accueilli par les partenaires sociaux. Le patronat, qui soutient globalement la réforme, s’est montré satisfait. «La méthode est la bonne. Il faut poursuivre la convergence des régimes et remettre le système à l’équilibre», a indiqué Patrick Martin, président délégué du Medef. «La situation après la réforme sera sans doute moins favorable qu’avant, personne n’est dupe. Mais si l’on veut garantir une retraite à nos enfants, il faut le faire. C’est une réforme courageuse, on ne peut qu’accompagner», a renchéri François Asselin président de la CPME. «Il a coché toutes les cases. Il est prêt à faire une transition profession par profession pour que le bouleversement ne soit pas trop violent», s’est félicité Alain Griset, président de l’U2P qui représente les artisans et commerçants.

Côté syndicats, Philippe Pihet (FO) s’est inquiété que «dans la période de transition, les salariés du privé basculent en premier, avant les autres» tandis que Dominique Corona (Unsa) se félicitait du choix d’une «période de transition longue». Quant à Frédéric Sève (CFDT), qui défend que le régime est presque à l’équilibre, il s’est réjoui que le premier ministre saisisse le COR. «Je dis “chiche!” Le fait que le gouvernement ne supprime plus 120.000 fonctionnaires, comme prévu initialement, fait que l’équilibre du régime se rapproche», a-t-il affirmé.

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