“Relève féministe”: quel est ce collectif qui s’est mobilisé pour la démission de Julien Bayou? – BFMTV

Créé à l’occasion de l’affaire Quatennens, ce collectif féministe a médiatisé le signalement de l’ex-compagne de Julien Bayou, qui a depuis démissionné de la présidence du parti. Relève féministe veut désormais “lancer une Nupes féministe” et prévoit “des actions d’ampleur”.

Le hashtag a fleuri sur Twitter en quelques heures à côté de dizaines de noms: #RelèveFéministe. Né dans le sillage de l’affaire Quatennens, ce collectif de 500 féministes dit refuser que ses “combats politiques soient représentés” “par des auteurs de violence”.

Ce sont elles qui ont interpellé ces derniers jours Europe Écologie-Les Verts sur le manque de réaction du parti après les accusations visant Julien Bayou, le patron des écologistes, qui a fini par démissionner ce lundi de la présidence du parti.

“Face à une solidarité masculine qui protège les agresseurs pullulant dans nos sphères politiques, nous appelons à une relève féministe”, écrivent-elles dans un tribune publiée dans Libération mardi dernier.

Des féministes engagées à gauche

Parmi les signataires: des visages identifiés de l’action féministe comme Alice Coffin, conseillère de Paris, et des élues qui ont l’habitude des médias comme la porte-parole du PS Gabrielle Siry-Houari. On trouve encore des dizaines de militantes encartées à gauche, dans les luttes syndicales, et les combats LGBT.

“On a un point commun: on est toutes des féministes qui soutenons la Nupes”, explique Laure Botella, militante socialiste, auprès de BFMTV.com. “C’est notre ADN.”

“On ne pouvait pas laisser croire que le tweet de soutien de Jean-Luc Mélenchon représentait les valeurs que veut défendre la gauche”, poursuit cette signataire de la tribune.

Le communiqué de presse d’Adrien Quatennens qui reconnaissait avoir giflé son épouse le 18 septembre, suivi du message de soutien du patron de la France insoumise qui saluait “son courage et sa dignité”, ont eu l’effet d’un catalyseur.

“Ne pas résumer la colère à Quatennens”

Dans les heures qui suivent, plusieurs dizaines de féministes, souvent impliquées dans l’association Nous Toutes, lancent une boucle Telegram pour organiser la riposte médiatique. Très vite, le principe d’un tribune est acté. “Rédigée de façon collective”, elle est publiée deux jours plus tard.

Ce texte cite plusieurs personnalités qui ont été mises en cause pour des violences comme l’économiste Thomas Piketty, qui a reconnu des faits de violence sur son ex-compagne, l’ancienne ministre Aurélie Filippetti – il a récemment été condamné en appel pour diffamation contre elle en 2022, après l’avoir qualifié de “personne extrêmement violente” vis-à-vis de ses filles.

“En échangeant entre nous, on s’est dit qu’on ne pouvait pas résumer notre colère à l’affaire Quatennens et que ça concernait plusieurs cas à gauche que l’on devait médiatiser”, avance Marie Coquille-Chambel.

Cette doctorante, qui a lancé le mouvement MeToo dans le théâtre en 2021, est l’une de celles qui a incarné Relève féministe dans les médias ces derniers jours. Mais “nous sommes un mouvement horizontal et personne ne cherche à se mettre en avant”, assure-t-elle.

Médiatiser le cas Bayou

Dans le viseur du collectif: Julien Bayou, le numéro 1 des écologistes. Le lendemain du texte d’Adrien Quatennens, des dizaines de comptes s’adressent à Europe-Écologie Les Verts, à l’instar du collectif Nous toutes.

“Bonjour EELV, la cellule de lutte contre les violences sexuelles et sexistes a été saisie en juillet après des accusations de violences commises par Julien Bayou sur son ex compagne. Comment s’assurer que les militantes soient en sécurité? Aucune mesure ne semble avoir été prise. Pourquoi?”

L’affaire n’est pas nouvelle: Le Figaro, en juillet dernier, indiquait que l’ex-compagne du député avait saisi la commission dédiée d’EELV contre lui, sans plus de précisions sur la nature des accusations. “La commission a été saisie suite à une rupture douloureuse et difficile”, assure alors Julien Bayou, évoquant “une rancœur” à son encontre et “une forme d’instrumentalisation”.

La mobilisation de Relève féministe a cependant remis la lumière sur le dossier. Interviewée sur France 5 le jour-même de la campagne de tweets, Sandrine Rousseau est interpellée sur le sujet. La députée écologiste raconte avoir “reçu longuement” chez elle son ex-compagne “très déprimée”, évoquant des “comportements de nature à briser la santé morale des femmes”.

L’éco-féministe assure qu'”elles sont manifestement plusieurs” à être concernées par les comportements de Julien Bayou, objet selon elle d’une “enquête journalistique en cours”.

“On ne veut pas toujours passer par le judiciaire”

Sous pression, le patron des écologistes consent d’abord à se mettre “en retrait” de la co-présidence de son groupe à l’Assemblée avant de finalement démissionner de la direction du parti ce lundi. Non sans pointer du doigt Relève féministe, sans nommer le collectif.

“C’est Kafka à l’heure des réseaux sociaux”, juge l’élu, dénonçant “un contexte délétère” qui “semble empêcher tout discernement, dans un moment où la société bascule et cherche le point d’équilibre pour cette si nécessaire révolution féministe”.

Les faits reprochés à Julien Bayou ne sont pas clairement connus, aucune plainte n’a été déposée et aucune enquête judiciaire n’a été ouverte. Sur les bancs de Relève féministe, on assume la méthode.

“Il n’y a aucune plainte concernant Taha Bouhafs et pourtant, on lui a refusé son investiture. On ne veut pas toujours passer par le judiciaire”, indique Marie Coquille-Chambel.

“Chez les LR, le RN, à Renaissance, des cas aussi”

La militante fait référence au candidat LFI qui s’est retiré à la course aux législatives en mai dernier, officiellement en se disant victime de harcèlement raciste. Clémentine Autain avait ensuite expliqué avoir reçu “des témoignages circonstanciés d’agressions sexuelles graves” le visant. Le parti lui avait donc demandé de retirer sa candidature “par principe de précaution”, même si Taha Bouhafs a dit “ignorer ce dont on (l’)accuse”.

Parmi les autres figures dont le cas pose problème pour Relève féministe, le député LFI Thomas Portes. Selon Mediapart, la cellule contre les violences sexuelles de LFI a été saisie le 4 juillet d’un signalement, qui évoque des épisodes rapportés par des tiers, évoquant des textos jugés inappropriés.

Si le collectif a interpellé le mouvement insoumis, l’élu assure n’être “absolument pas au courant” et “ne pas avoir d’éléments” sur ces accusations.

La majorité a également été interpellée au sujet de Damien Abad. L’ancien ministre des Solidarités – toujours apparenté au groupe Renaissance – est accusé de viols par 4 femmes et visé par une enquête pour tentative de viol.

“Les noms qui circulent sous le manteau quand on te dit’ fais attention à lui’, ‘évite l’ascenseur quand il est dans le coin’, il y a en dans tous les partis. On en parle plus à gauche parce que les féministes y sont nombreuses. Mais chez les LR, à Renaissance, au RN, aussi, il y a bien sûr des cas”, juge une militante écologiste, signataire de la tribune.

“Lancer une Nupes féministe”

Le collectif se fixe une seule limite: n’interpeller les partis qu’au sujet des cas qui sont déjà sortis dans la presse. La manœuvre vise à éviter toute plainte pour diffamation tout en permettant au mouvement de s’installer dans la longue durée. “On veut lancer une Nupes féministe avec des actions d’ampleur à venir”, avance Laure Botella, promettant “des actions d’ampleur à venir”.

Marie-Pierre Bourgeois

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