Référendum en Nouvelle-Calédonie : une drôle de non-campagne – Le Monde

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Publié aujourd’hui à 18h00, mis à jour à 19h49

Au grand rond-point de la voie express, à l’entrée de Nouméa, les militants indépendantistes ont déployé des banderoles sur lesquelles est inscrit : « Le 12 décembre 2021, nous ne votons pas ». Au-dessus flotte le drapeau kanak. Une présence passive : ils ne cherchent pas à interpeller les conducteurs qui empruntent ce nœud stratégique. Sous une chaleur accablante, ils sont une quinzaine, réfugiés à l’ombre des manguiers, canette de bière fraîche à la main. A quelques dizaines de mètres, deux camions de gendarmes mobiles et de militaires stationnent en plein cagnard.

« Ils surveillent nos banderoles et, nous, on veille sur eux », plaisante Dawera Dianou, laissant entendre que la présence voyante des forces de l’ordre pourrait attiser les réactions des jeunes Kanak dans ce quartier populaire de la Vallée du Tir. Dawera est le fils d’Alphonse Dianou, chef du commando qui organisa en 1988 la prise d’otages d’Ouvéa, tué lors de l’assaut militaire. Il avait rencontré Emmanuel Macron lorsque le président de la République s’était rendu à Ouvéa, le 5 mai 2018, en signe de réconciliation. Un moment d’échange, à l’abri des regards, et d’intense émotion.

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A présent, il n’a pas de mots assez durs vis-à-vis du chef de l’Etat qui « a renié la parole de l’Etat ». Comme toutes les composantes du mouvement indépendantiste, ce militant radical dénonce « l’entêtement de l’Etat à maintenir coûte que coûte la date de la consultation du 12 décembre » alors que la crise sanitaire a frappé le territoire début septembre, provoquant 280 morts, dont plus de la moitié dans la communauté kanak, et qu’un an de deuil kanak a été décrété par le Sénat coutumier pour la période de septembre 2021 et septembre 2022.

Seuls les loyalistes font campagne car les independantistes ont décidé de ne pas aller voter, respectant une période de deuil pour leurs morts du Covid-19. Ils ont appelé à la non-participation au référendum.

Etrange campagne, où les partisans de l’indépendance refusent de prendre part au troisième référendum sur l’accession à la pleine souveraineté dont ils avaient demandé l’organisation après que les deux premiers avaient donné une majorité au non. Ils font campagne, sur les réseaux sociaux, mais aussi en mobilisant leurs structures locales, pour appeler… à ne pas voter. Ce qui suscite parfois quelques interrogations dans leur base : « Ça fait trente ans qu’on attend. C’est quoi cette pirouette ? Moi j’irai voter oui », réagit ainsi un militant aux consignes du Front de libération nationale kanak et socialiste (FLNKS).

« On n’a plus personne en face »

Les dirigeants indépendantistes ne nient pas quelques tensions. « Il y a des gens qui ne comprennent pas », admet Johanito Wamytan, directeur du cabinet du groupe Union calédonienne (UC)-FLNKS au Congrès. Tensions accentuées par l’obligation vaccinale qui sera mise en œuvre sur le territoire à compter du 31 décembre. Une décision adoptée par le Congrès de Nouvelle-Calédonie, à majorité indépendantiste, et qui a déclenché de vives réactions. Samedi 4 décembre, plusieurs milliers de personnes ont manifesté dans les rues de Nouméa, la plupart sans masque.

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