Quel avenir pour la gestion privée ?

Quel avenir pour la gestion privée ?

Cette tendance, qui s’accentue aujourd’hui, est pourtant loin d’être nouvelle : cela fait plus d’une décennie que la gestion privée est en perte de vitesse constante. Sous l’influence d’une réglementation de plus en plus stricte, difficile pour les acteurs installés de rester compétitifs face à la concurrence de technologies innovantes proposant un service moins cher et plus personnalisé. Cela a contraint la plupart d’entre eux à tenter de jouer la carte de l’innovation pour tirer leur épingle du jeu.

Mais dans le contexte actuel, il ne suffira plus de s’adapter pour survivre. L’avenir de la gestion privée ne doit pas être envisagé comme une simple évolution technologique, mais comme une véritable révolution reposant sur deux piliers principaux.

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Replacer les objectifs des clients au cœur du métier de gérant privé

Aujourd’hui, un banquier privé consacre 80 % de son temps à la gestion administrative de ses dossiers. C’est autant de temps qu’il ne passe pas à accompagner sa clientèle dans ses problématiques patrimoniales. Nous sommes loin de l’époque où des relations privilégiées se tissaient au fil des ans, voire des générations, entre clients et conseillers.

Comment en sommes-nous arrivés là ? Pour les établissements historiques, respecter les nouvelles réglementations en matière de conformité, de traçabilité et de transparence passe par des processus non dématérialisés, chronophages et coûteux. Résultat : la rentabilité du modèle s’amenuise, alors que les coûts fixes, eux, restent élevés !

Une seule solution pour préserver la rentabilité : augmenter le nombre de portefeuilles gérés par chaque conseiller, diminuant d’autant la personnalisation de leurs conseils. Cela passe par la création de profils génériques au sein desquels plusieurs centaines de clients aux situations différentes et aux objectifs variés sont gérés suivant le même niveau de risque. Tout ceci s’accompagne parfois d’une hausse des frais, difficilement justifiable.

Le gérant privé de demain doit pouvoir se reposer sur la technologie pour automatiser les tâches à faible valeur ajoutée. Cela lui permettra d’abord de se libérer des opérations chronophages, mais nécessaires. Cela lui permettra surtout d’utiliser la puissance des algorithmes pour proposer des placements ultra personnalisés, prenant en compte avec précision l’environnement patrimonial et matrimonial ainsi que les projets personnels de ses clients et les horizons de ces derniers. Il pourra donc, enfin, cesser de mettre ses clients dans des cases et les aider à bâtir des portefeuilles uniques pour la réalisation de leurs propres objectifs.

Proposer des services, et non des produits

Aujourd’hui, la recommandation d’investissement d’un banquier privé est nécessairement biaisée par des consignes commerciales. D’une part, car la rémunération des conseillers est liée à des objectifs en produit net bancaire (PNB). Autrement dit : ils sont naturellement incités à proposer en priorité les produits les plus rentables pour l’établissement auquel ils appartiennent.

D’autre part, l’entrée en vigueur de la directive MIF 2, en mettant fin au système de rétrocessions, a incité de nombreux acteurs à abandonner la distribution des fonds externes pour rediriger leurs clients vers leurs propres produits “maison”, là encore pour des raisons de rentabilité. Cela ne fait que restreindre l’objectivité de leur conseil.

Pourra-t-on, demain, délivrer un conseil financier totalement objectif ? Il est humainement impossible d’émettre un avis non biaisé en présence d’un enjeu financier. Mais il est possible de supprimer cet enjeu financier, lié à la vente de produits plus ou moins rémunérateurs pour l’établissement qui les commercialise. Comment ? En s’appuyant sur des fonds indiciels (ETF) pour remplacer les OPCVM et Sicav traditionnellement utilisés par les banquiers privés.

Au lieu de chercher à battre les marchés, comme le font les fonds dits “actifs” avec un succès mitigé, les ETF investissent dans les indices boursiers sur toutes les classes d’actifs et toutes les zones géographiques. Leurs frais sont 5 à 10 fois inférieurs à ceux des fonds traditionnels et leur fonctionnement ne permet pas de rétrocéder une partie de ces frais aux distributeurs.

Par conséquent, dans une allocation en ETF, le choix des produits utilisés n’a pas d’impact sur la rentabilité ou la rémunération du conseiller. De plus, ces allocations délivrent une performance toujours conforme à celle du marché, sans que le conseiller n’ait à consacrer un temps précieux à l’élaboration de stratégies complexes (et souvent perdantes) pour y parvenir.

Grâce à cette approche, le gérant privé de demain disposera du temps et de la liberté d’esprit nécessaires pour proposer à ses clients ce qu’ils attendent de lui : des services et non des produits. Il pourra leur apporter un accompagnement patrimonial à forte valeur ajoutée, allant au-delà de la simple gestion de leurs portefeuilles financiers.

Il pourra leur fournir le bon conseil, au bon moment, que ce soit en matière de structuration patrimoniale, d’investissement immobilier, de gestion des actifs professionnels, de fiscalité, d’accès au crédit …

Pour les problématiques les plus complexes, il pourra faire appel à des experts externes, comme des avocats ou des courtiers en crédit. Il pourra, enfin, facturer ces services suivant une tarification juste et adaptée aux besoins de chacun : un système beaucoup plus personnalisé que le forfait dont s’acquittent aujourd’hui tous les clients de banques privées, quel que soit le niveau de conseil auquel ils ont effectivement accès.

Être au service des objectifs de chaque client, apporter un conseil personnalisé à forte valeur ajoutée … ce sont ces mêmes valeurs qui ont fait la force dans la profession dans les années 1970. La gestion privée de demain doit s’appuyer sur l’innovation pour renouer avec ces fondamentaux.

Avec toutefois, un progrès de taille rendu possible par les nouvelles technologies : la réduction des coûts, qui permettra de baisser le seuil d’accessibilité tout en améliorant à la fois le rendement des placements et la qualité du conseil.

Cette transition a déjà eu lieu dans la plupart des industries. Prenons l’exemple de l’électronique : l’écran plat, luxe réservé aux plus aisés il y a encore 20 ans, est désormais accessible au plus grand nombre. La gestion privée ne peut plus demeurer l’un des seuls secteurs où les prix grimpent alors que la technologie ouvre le champ des possibles.

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