Procès Lelandais : la famille de Maëlys face aux silences de l’accusé – Le Monde

Comment dire le chagrin à la barre d’un tribunal ? Comment décrire l’absence d’un enfant et d’une sœur devant une cour d’assises ? Comment parler de la douleur à un jury ? Jennifer Cleyet-Marrel, la maman de Maëlys, a apporté un album photo et préparé une sorte d’hommage à la mémoire de sa fille tuée le 27 août 2017 à Pont-de-Beauvoisin (Isère). Joachim de Araujo, le papa, a posé un portrait peint de Maëlys. Et Colleen, la sœur aînée, a lu un texte. Lundi 7 février, au sixième jour du procès de Nordahl Lelandais, qui comparaît à Grenoble pour le meurtre de leur fille et sœur, ces trois-là se sont succédé dans le prétoire, appesantis par ce fardeau qu’ils portent avec leurs mots.

Jennifer, 42 ans, n’a pas flanché. Elle attendait ce moment. Elle raconte sa fille qui n’a pas grandi et qui aurait 11 ans et demi aujourd’hui. « Je ne connaîtrai jamais ton premier amoureux, le métier que tu aurais fait – agricultrice ou pompier… » Plus de quatre ans après, elle s’en veut toujours de ne pas avoir « su la protéger ». « Des fois, je me demande si on n’est pas dans un cauchemar et si on va se réveiller un jour », déclare-t-elle. Ce matin du 26 août 2017, quand la famille Araujo est partie pour le mariage du cousin de Jennifer, tout le monde était content. « On s’était préparées. On était allées chez le coiffeur. On s’était toutes fait belles », se souvient-elle.

Un père dévasté

Maëlys avait choisi sa robe. Une robe blanche avec des bretelles aux épaules. Toute la soirée, elle a joué, couru avec les autres enfants et, vers 2 h 30, elle est venue vers sa mère. « La dernière fois que je l’ai vue », souligne cette dernière. « On avait dansé sur la piste », explique-t-elle. A l’heure où dans les mariages les hommes ont tombé leurs cravates et déboutonné le haut de leurs chemises blanches, on aperçoit sur une vidéo Maëlys qui danse dans les bras de son père et sa mère à côté. C’est leur dernier moment ensemble. Ils ne la reverront plus.

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Juste avant, la petite fille de 8 ans lui avait parlé d’un monsieur qui lui avait montré ses chiens. Puis vers 3 heures, elle n’a plus vu l’enfant. Tout le monde s’est mis à la chercher. Maëlys avait disparu. Jennifer a immédiatement tenté de retrouver l’homme aux chiens, mais celui-ci n’est réapparu que plus tard, peu après 3 h 30. Quand la maman pétrie d’inquiétude lui demande s’il a vu sa fille, il a répondu « non, d’un ton blasé », précise-t-elle.

Dans la famille Araujo, personne, ni la mère, ni le père, ni la sœur, n’imagine une seule seconde que Maëlys ait pu partir seule avec un inconnu dans une voiture, en pleine nuit. « On lui avait fait la leçon plusieurs fois », insiste Jennifer. De plus, sur une image de vidéosurveillance captée alors qu’elle est à bord de l’Audi A3, on l’aperçoit sur le siège passager avant, sans ceinture de sécurité, appuyée – quasi recroquevillée – contre la portière. « Elle ne montait jamais devant dans une voiture », poursuit sa mère, convaincue qu’à cet instant Maëlys a peur.

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