Procès de l’attentat de Nice : quatre minutes et dix-sept secondes d’horreur brute – Le Monde

Une dernière fois, jeudi 15 septembre, peu après 13 heures, le président de la cour Laurent Raviot prévient : « Je tiens à dire qu’il s’agit d’images terribles. Je mets en garde à nouveau les personnes qui vont les visionner des conséquences que ça pourrait avoir. On n’est pas obligé de rester dans la salle si on ne souhaite pas voir l’intégralité de ces vidéos. » Trois personnes se lèvent et sortent. La salle d’audience est loin d’être pleine, mais elle n’avait jamais accueilli autant de monde depuis l’ouverture du procès.

Les lumières s’éteignent. L’écran géant est abaissé. Après plusieurs jours de discussion sur l’opportunité de les diffuser, de nombreux avertissements sur leur impact psychique potentiel, et un récit détaillé, à la barre, par un enquêteur qui les avait vues, les images enregistrées le soir du 14 juillet 2016 par la vidéosurveillance de la promenade des Anglais, où 86 personnes ont été tuées par Mohamed Lahouaiej Bouhlel au volant de son camion, vont être projetées devant la cour d’assises spéciale de Paris.

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La majorité des parties civiles étaient favorables à cette diffusion, afin de saisir dans sa globalité la réalité de l’attentat qu’elles ont vécu ou dans lequel elles ont perdu un proche – certaines, aussi, pour mieux comprendre quel était le dispositif de sécurité en place. Pour les magistrats, cela devait aussi permettre de se faire une idée précise de la trajectoire du 19 tonnes, et de mieux définir qui, parmi les 25 000 personnes présentes sur la promenade des Anglais ce soir-là, est recevable en tant que partie civile.

Esquives miraculeuses, corps tamponnés

Pas de promenade des Anglais sur la première image de vidéosurveillance projetée à l’écran, mais le boulevard Vérany, plus au nord. Il est 21 h 34. Sur la gauche de l’écran, un camion blanc garé sous les arbres, le long du trottoir. Sur la droite arrive un homme à vélo, en danseuse : Mohamed Lahouaiej Bouhlel. Il charge son vélo dans le camion, grimpe dans la cabine, met son clignotant à gauche, démarre, s’éloigne. Dans moins d’une heure, après avoir circulé puis stationné un moment dans les rues de Nice, il entamera son carnage.

Les quatre minutes et dix-sept secondes qu’a duré sa course meurtrière sur la promenade des Anglais ont été enregistrées par six caméras différentes. Mis bout à bout, ces enregistrements silencieux qui vont s’enchaîner à l’écran durent une dizaine de minutes. Dix minutes d’horreur brute. Dix minutes d’apnée collective dans la salle d’audience, au cours desquelles on n’entendra que deux bruits : le grincement du sol sous les pas des policiers veillant à ce que personne ne filme l’écran, et les cris d’effroi de certaines parties civiles réagissant aux images les plus dures – quelques spectateurs ne resteront pas jusqu’au bout.

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