Procès de la «démembreuse» de Toulouse : 27 ans de prison pour Sophie Masala – Le Parisien
À l’énoncé du verdict, elle regarde ses enfants et leur sourit. Après plus de trois heures de délibéré, Sophie Masala, 55 ans, a été condamnée à vingt-sept ans de réclusion criminelle pour le meurtre de sa collègue de travail, Maryline Planche, 53 ans, tuée le 12 mai 2016 à Toulouse avant d’être dépecée. La cour d’assises de Haute-Garonne a retenu la question supplémentaire de « la particulière vulnérabilité » de la victime, qui souffrait notamment d’un handicap visuel. Sophie Masala encourait du coup la perpétuité – requise par l’avocat général — et non plus trente ans de prison. Elle a aussi été condamnée à cinq ans de suivi socio judiciaire, au lieu des dix requis.
Au-delà du crime, la dimension sordide des gestes accomplis sur la dépouille de sa victime – qu’elle a découpée avant d’en disséminer les morceaux le long du canal du Midi et d’enterrer la tête près de son balcon – a imprégné les débats. Mais la peine maximale n’a pas été retenue. Au dernier jour de son procès, Sophie Masala est apparue épuisée, tremblante de nervosité. « Je regrette ce que j’ai fait, je ne voulais pas ôter la vie de Maryline », a-t-elle réaffirmé. « Je suis un monstre », avait-elle lâché la veille, en confiant sa « honte ». Pas une fois, lors du réquisitoire, elle n’a levé les yeux, sinon pour un regard désespéré à ses enfants après le prononcé de la sentence sollicitée par l’avocat général : la réclusion criminelle à perpétuité et dix ans de suivi socio-judiciaire », avait demandé David Sénat – que les jurés n’ont donc pas suivi.
« Vous avez ôté la vie. Vous devez l’accepter et cessez de vous mentir »
Durant deux heures, le représentant du ministère public a campé le portrait, accablant, d’une femme « perverse et manipulatrice » dont « les mensonges permanents » marqueraient « la dangerosité sociale ». D’une femme « envieuse et harceleuse » s’en étant « pris sciemment à une personne en état de faiblesse ». Si la préméditation n’a pas pu être étayée, Sophie Masala s’est introduite au domicile de sa collègue « avec des intentions violentes », jauge-t-il, en vilipendant « un meurtre de sang-froid ». « Quand on frappe à la tête ( NDLR : avec une bouteille ), c’est qu’on veut tuer », a-t-il asséné, en écartant le scénario, défendu par l’accusée, de « coups mortels » intervenus lors d’une violente dispute.
« Non, vous n’étiez pas de bonnes amies », a balayé David Sénat, en retraçant la genèse des relations entre les deux femmes, « conseillères en prestation » au sein de l’Agefiph, une structure de soutien à l’emploi des handicapés. Embauchée fin 2015, Sophie Masala, « en moins de deux mois », « va créer les conditions d’un conflit et d’une haine avec sa collègue de travail, décrit-il. Son obsession de savoir quelle est la vie privée (de Maryline Planche), cette quête maladive, c’est entrer en voie de possession et déjà de destruction », avance-t-il. Une obsession qui perdure après le crime : « Le dépeçage, c’est faire comme si Maryline n’avait jamais existé […]. La tête enterrée sous dix centimètres de sable, un trophée macabre! », analyse-t-il.
Stipendiant les outrances de l’accusation, les avocats de Sophie Masala, Mes Axelle Chorier et Pierre Dunac, avaient appelé les jurés à écarter « le chiffon rouge de l’hystérie » et à « ne pas exagérer la peine. On a passé plus de temps à vous parler des suites de l’acte fatal, des atteintes au corps de Maryline Planche, que juridiquement vous ne pouvez sanctionner, que des faits », ont-ils critiqué. « Coupable, elle l’est ; elle vient prendre condamnation. Si ses aveux ont été changeants, carencés, ils doivent vous rassurer », avait avancé Me Chorier. Les faits, ont-ils plaidé, sont liés « à une histoire personnelle très ancienne » ; à « un mal-être profond » ; à « un jeu de miroirs » entre deux femmes dont la rencontre a réveillé chez l’une « colère et frustrations. » Tourné vers Sophie Masala, Me Dunac avait conclu en s’adressant à elle : « Vous ne l’avez pas voulu, mais vous avez ôté la vie. Vous devez l’accepter et cessez de vous mentir. »