Préfecture de Paris: Macron veut une «société de vigilance» face à l’islam radical – Le Figaro

Dans son discours d’hommage, le chef de l’État a appelé à la mobilisation contre l’«hydre islamiste».

Les attentats islamistes succèdent aux attentats islamistes, les discours d’hommage succèdent aux discours d’hommage. Emmanuel Macron en a prononcé un nouveau mardi dans la cour d’honneur de la Préfecture de police de Paris, là même où, quatre jours plus tôt, un fonctionnaire de police radicalisé avait tué quatre de ses collègues.

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«Vos collègues sont tombés sous les coups d’un islam dévoyé et porteur de mort qu’il nous revient d’éradiquer», a dénoncé le président de la République en reconnaissant que «l’administration seule et tous les services de l’État ne sauraient venir à bout de l’hydre islamiste (…) Une société de vigilance, voilà ce qu’il nous revient de bâtir». Une société où il faudra désormais, selon le chef de l’État, «savoir repérer à l’école, au travail, dans les lieux de culte, près de chez soi, les relâchements, les déviations, ces petits gestes qui signalent un éloignement avec les lois et les valeurs de la République».

Avant lui déjà, en août 2016, François Hollande avait souligné «la nécessité d’une vigilance de tous les instants» face au terrorisme islamiste. C’était après les attentats islamistes de Nice et de Saint-Étienne-du-Rouvray. À son côté ce jour-là pour visiter une école de gendarmerie, le premier ministre Manuel Valls mettait en garde: «Vaincre l’islamisme radical prendra du temps. C’est le défi d’une génération.» Comme en écho trois ans plus tard, Emmanuel Macron lui a répondu lundi: «C’est un travail de longue haleine toujours trop lent mais un travail là aussi nécessaire dont nous ne céderons rien, bien au contraire.»

«Cinquante-neuf attentats ont été déjoués grâce à eux depuis maintenant six ans» 

Emmanuel Macron

Sauf qu’à force de se répéter d’attentat en attentat, ces discours distillent comme un sentiment d’impuissance de l’État face à la menace terroriste qui pèse sur le pays depuis la tuerie de Charlie Hebdo, en janvier 2015. Par nature secrète, la lutte contre le terrorisme contraint le pouvoir à tenter de compenser par les mots ce qu’il ne peut afficher en public: les victoires remportées dans l’ombre par les forces de sécurité et de renseignement. «Cinquante-neuf attentats ont été déjoués grâce à eux depuis maintenant six ans», a dévoilé lundi le président de la République. «Leurs succès sont souvent discrets et peu spectaculaires mais ils sont réels, a ensuite assuré le premier ministre Édouard Philippe dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale. Leurs échecs, il y en a. Dans une guerre comme celle que nous livrons, il y en a et ils sont toujours dramatiques.» Celui de la préfecture de police de Paris en est un. Il marque un tournant. Un attentat au cœur même de la machine policière en charge de la lutte contre le terrorisme islamiste, c’était jusqu’à présent du jamais vu.

De quoi nourrir la colère et l’angoisse du pays qui progressent d’un cran après chaque attaque. De quoi alimenter aussi les discours anti-musulmans. «Ce n’est en aucun cas un combat contre une religion, a mis en garde Emmanuel Macron, mais bien contre son dévoiement et ce qui conduit au terrorisme.» Si le président de la République a durci le ton, le fond de sa pensée reste le même. Pour lui, une partie de la lutte contre le terrorisme islamiste passe par la restauration des valeurs fondamentales de la République. Dans son discours, Emmanuel Macron assure vouloir lutter contre «le terreau sur lequel prospèrent le terrorisme islamiste et ses vocations mortifères». «Terreau.»

«Le terreau» de la défiance

Le terme n’est pas nouveau dans la bouche d’Emmanuel Macron. Il l’avait déjà utilisé en décembre 2015 après les attentats islamistes du Bataclan, des terrasses de café et du Stade de France. Lors d’un colloque au Conseil économique et social, celui qui était alors ministre de l’Économie avait provoqué une intense polémique en jugeant que la société française portait «une part de responsabilité» dans la radicalisation des terroristes à l’origine des massacres du 13 novembre. «Le terreau sur lequel les terroristes ont réussi à nourrir la violence, à détourner quelques individus, c’est celui de la défiance», avait-il alors assuré en pointant les discriminations à l’encontre des musulmans notamment. «Je ne suis pas en train de dire que tous ces éléments sont la cause première du djihadisme. C’est la folie des hommes, et l’esprit totalitaire et manipulateur de quelques-uns, avait-il alors nuancé. Mais il y a un terreau, ce terreau est notre responsabilité.»

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Quatre ans plus tard, le «terreau» est toujours là. Emmanuel Macron n’a pas réussi à transformer suffisamment la société pour le faire disparaître. C’est l’objectif de ses réformes. D’ici à ce qu’elles produisent les résultats espérés, le président de la République en appelle à l’union nationale face au terrorisme. «Faisons bloc pour l’unité de la nation en sachant rassembler tous les Français, lance-t-il. Opposons à la haine l’intransigeance républicaine ; à la terreur, l’irréductible esprit français de résistance ; à l’obscurantisme, l’amour de la raison et son exigence.» En attendant le prochain discours d’hommage.

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