Pourquoi les autorités craignent une reprise de l’épidémie de Covid-19 en France – Le Journal du dimanche

La barre symbolique des 30.000 morts du Covid-19 vient d’être dépassée. Et toute cette semaine, les figures officielles de la lutte contre le coronavirus, de Jérôme Salomon, directeur général de la Santé, à Jean-François Delfraissy, président du conseil scientifique, ont multiplié interviews et prises de parole. Objectif : rappeler aux Français que l’épidémie est loin d’être terminée. Si tous les voyants étaient au vert depuis le déconfinement, certains indicateurs passent à l’orange. Dans son point hebdomadaire portant sur la semaine du 29 juin au 5 juillet, l’agence Santé publique France explique que la circulation virale se maintient “à un niveau bas” mais note une “nouvelle tendance à l’augmentation de la circulation du Sars-CoV-2”.

En cause, le fameux “R effectif”. Basé sur les tests virologiques positifs, il correspond au nombre de personnes infectées par un malade. Pour la première fois depuis plusieurs semaines, il est repassé au-dessus de la barre du 1 en métropole. “Ce frémissement nous préoccupe et d’autres indicateurs contribuent à cette préoccupation, avance Daniel Lévy-Bruhl, responsable de l’unité des infections respiratoires de Santé publique France. On a plus de cas diagnostiqués cette semaine que les précédentes. Ça ne va pas dans le bon sens.”

Moins de gestes barrière

Si le nombre des hospitalisations reste stable, celui des consultations chez SOS médecins pour des suspicions de Covid-19, lui, a augmenté de plus de 40 %, passant de 1 082 à 1 523 en métropole. “Ce n’est pas forcément inquiétant mais cette hausse doit conduire à une certaine vigilance, précise Franck Chauvin, président du Haut Conseil de la santé publique et membre du conseil scientifique. Et il y a des raisons conjoncturelles, comme la sortie de l’état d’urgence, le pont du 14-Juillet, le début des vacances, qui vont conduire à des brassages importants de population, facteurs de risque dans les épidémies.” Une menace d’autant plus présente que les Français respectent moins les gestes barrière. D’après Santé publique France, l’application de la distance d’un mètre entre deux personnes a reculé de 15 % depuis la levée du confinement.

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Outre la Guyane, où la situation est critique, c’est la Mayenne qui concentre toutes les attentions. Dans ce département de l’Ouest, sept foyers de contamination représentant au total 91 cas ont été identifiés dans trois villes différentes, à Laval, Craon et Château-Gontier. L’un d’eux, parti d’un abattoir, présente une “diffusion communautaire”. “Ça veut dire que, parmi les cas identifiés, certains ne sont pas rattachables au cluster d’origine, décrypte Daniel Lévy-Bruhl. Quand des gens qui n’ont aucun rapport entre eux sont malades au même moment, on commence à s’inquiéter. Jusqu’où le virus a-t‑il déjà essaimé?”

Le taux de tests positifs sur le nombre total réalisé s’élève à près de 9 % en Mayenne contre 1,3 au niveau national. Reste à savoir si ce territoire rural fait face à un cluster à maîtriser ou à une circulation à bas bruit du Covid-19. Ce dernier scénario serait un “cauchemar” aux yeux du conseil scientifique. “C’est une course contre la montre, il faut tester, prévient Franck Chauvin. On a les capacités de le faire, mais il peut y avoir un obstacle si les personnes ayant des symptômes ou ayant été en contact avec des gens positifs ne vont pas suffisamment se faire diagnostiquer.” D’après les données de Covidnet, une cohorte gérée par l’Inserm, il n’y a que 17% des personnes ayant présenté des symptômes du virus qui ont bénéficié d’une prescription pour un test diagnostique, et 12% seulement ont rapporté avoir été testées.

Des tests systématiques

“La suite ne dépend que de nous, et de nos comportements dépendra l’état du pays à la rentrée ou même pendant les vacances, poursuit le professeur Chauvin. Quand on a un signe, il faut aller se faire tester. Même pour un mal de gorge, un rhume ou de la fièvre.” En Mayenne, une campagne de dépistage se met en place. L’agence régionale de santé (ARS) espère atteindre 1.000 prélèvements par jour en fin de semaine prochaine. D’après l’ARS, aucun plan de confinement local n’est à l’étude à l’heure actuelle. Dans le reste du pays, sur les 350 foyers de contamination identifiés depuis la mi-mai, 80 sont encore en cours d’investigation. Avant-hier, 11 de plus ont été découverts.

Dernière source d’inquiétude : l’augmentation des cas importés, c’est‑à-dire des voyageurs positifs au Covid-19 arrivant sur le territoire. À l’hôpital Robert-Ballanger d’Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), non loin de l’aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle, comme dans plusieurs établissements parisiens, des malades venus de l’étranger ont été hospitalisés ces derniers jours. Et des médecins en viennent à se demander pourquoi la France ne réclame pas la présentation d’un test PCR négatif de moins de soixante-douze heures à l’entrée sur son territoire.

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