Pourquoi la mise en place du contrôle technique deux-roues ne sera pas immédiate – BFMTV

Le Conseil d’Etat vient d’annuler le décret gouvernemental abrogeant le contrôle technique des deux-roues motorisés mais l’application de cet examen s’annonce complexe en raison du manque de préparation des contrôleurs.

C’est un nouveau rebondissement qui en appelle sûrement d’autres dans les mois à venir. Le Conseil d’Etat a réinstauré ce lundi le contrôle technique des deux-roues motorisés en abrogeant le décret du gouvernement qui annulait son application prévue au début de l’année 2023. La plus haute juridiction administrative a avancé deux arguments pour justifier cette décision vis-à-vis de ce qu’elle considère comme un “excès de pouvoir”.

D’une part, elle reproche l’absence de consultation du public dans le cadre de cette suppression du contrôle technique malgré son incidence directe et significative sur l’environnement. D’autre part, elle estime que les mesures alternatives que doit appliquer le gouvernement en contre-partie sont insuffisantes par rapport aux exigences de la directive européenne de 2014 qui instaure ce contrôle technique périodique, notamment pour améliorer la sécurité des motards sur la route.

“D’autres mesures ne peuvent être utilement prises en compte, car elles sont encore à l’état de projets ou constituent de simples réflexions”, ajoute le Conseil d’Etat.

Des circonstances encore peu propices

Cependant, cette décision pose immédiatement la question de la mise en place effective de ce contrôle technique. Au printemps dernier déjà, Eric Thiollier, représentant de la Fédération française des motards en colère (FFMC), pointait du doigt un manque de préparation alors que le décret devait alors s’appliquer dès le début de l’automne – avant que le gouvernement n’intervienne durant l’été. “Rien n’est prêt, les contrôleurs ne sont pas formés, les éléments qui vont être contrôlés ne sont pas connus. C’est irréalisable pour le 1er octobre”, s’était alors indigné Eric Thiollier.

Un défaut également souligné par Vincent Thommeret, directeur général de Yamaha France, qui estime que le contrôle technique ne pourrait être qu’un “contrôle visuel” en l’état, faute d’infrastructures adaptées aux deux-roues dans les réseaux de contrôle.

“Nous avons un doute sur la pertinence d’un contrôle technique tous les deux ans et préconisons plutôt un contrôle de conformité à la revente pour que les concessionnaires valident par exemple l’achat d’un deux-roues d’occasion en certifiant sa conformité”, nous indique-t-il.

Pas d’entrée en vigueur immédiate selon le gouvernement

Pour le gouvernement, c’est la douche froide alors que le ministère des Transports souhaitait justement privilégier des mesures alternatives au contrôle technique des deux-roues motorisés, lesquelles avaient été notifiées à la Commission européenne. Emmanuel Macron avait par ailleurs justifié son opposition à cette application pour ne “pas rajouter des contraintes” aux Français dans le sillage de la crise sanitaire.

Le gouvernement n’a pas tardé à réagir en indiquant “prendre acte de la décision du Conseil d’Etat” :

“Cette décision ne conduit pas à une entrée en vigueur immédiate du contrôle technique, compte-tenu de la nécessité de publier préalablement des textes d’application du décret du 9 août 2021, explique-t-il. Une consultation sera lancée par le ministre chargé des Transports avec l’ensemble des parties concernées dans les prochains jours afin de déterminer les mesures à mettre en œuvre”.

Ce dernier a indiqué ce mardi sur France 2 “qu’il faudra très probablement mettre en place un contrôle technique. Clément Beaune note que le juge n’a pas fixé de délais et qu’une “large place de manœuvre est laissée au gouvernement”. Le “calendrier reste à définir mais il n’y aura pas d’application immédiate”, a-t-il ajouté.

La juridiction a d’ailleurs ouvert la porte à “un échelonnement dans le temps de la mise en oeuvre du dispositif de contrôle technique” avec “une différenciation selon l’ancienneté du véhicule”. Des mesures d’application devraient aussi préciser “les conditions de mise en œuvre de ce contrôle, notamment s’agissant des normes techniques et de l’agrément des centres de contrôle technique.”

Une action punitive nécessaire?

Parmi les acteurs satisfaits de la dernière décision du Conseil d’Etat, figurent les associations qui l’avaient saisi au coeur de l’été, dans la foulée de l’annulation gouvernementale de l’application du contrôle technique. “Le Conseil d’Etat siffle la fin de la récré. Le contrôle technique est enfin en vigueur et c’est une victoire pour l’écologie et la santé publique”, se réjouit Tony Renucci, directeur général de Respire, dans un communiqué.

“Le gouvernement n’est plus en mesure de jouer la montre. Il doit cesser de voir la santé et la sécurité routière comme des variables d’ajustement de ses calculs électoraux et passer aux actes”, a renchéri dans le même document Gaël David, président de Ras Le Scoot.

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De son côté, Vincent Thommeret appelle surtout le ministère de l’Intérieur à faire sa part du travail alors qu’une infime partie des accidents de deux-roues sont imputables à des problèmes d’ordre mécanique : “Il faut que les forces de l’ordre procède à des contrôles et des saisies pour lutter contre le fléau des deux-roues non-conformes.”

Timothée Talbi

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