Pourquoi Emmanuel Macron a-t-il refusé une « aide active à mourir » à Alain Cocq ? – 20 Minutes

Dijon (Côte-d’OR), le 12 Août 2020. Handicapé, Alain Cocq a demandé à pouvoir bénéficier d’une aide active à mourir. — PHILIPPE DESMAZES / AFP
  • Âgé de 57 ans, Alain Cocq est atteint par une maladie tellement orpheline qu’elle n’a même pas de nom. Les parois de ses artères se collent les unes aux autres et son état se détériore.
  • Militant infatigable de la cause des personnes en situation de handicap, il a prévenu l’Elysée qu’il cesserait de s’alimenter et de s’hydrater à partir de ce vendredi si Emmanuel Macron ne légalise pas l’aide médicale à mourir.
  • Dans un courrier daté de jeudi, le président a indiqué qu’il ne pouvait pas accéder à sa requête, n’étant pas « au-dessus des lois ».

Un homme prévoit de mourir en direct sur Facebook,. Lourdement handicapé et atteint par une maladie incurable, Alain Cocq, 57 ans, a confirmé qu’il allait mettre, dès ce soir, son projet à exécution. En grande souffrance, il avait sollicité Emmanuel Macron ces dernières semaines afin de pouvoir bénéficier d’une aide active à mourir.

Dans un courrier daté de jeudi, le chef de l’État a refusé d’accéder à sa demande, expliquant que le suicide assisté n’était pas autorisé par la loi française. En conséquence, depuis son lit médicalisé à Dijon (Côte-d’Or), Alain Cocq a annoncé qu’il allait cesser de s’alimenter et de s’hydrater à partir de ce vendredi pour alerter sur la situation des personnes en fin de vie. 20 Minutes analyse pourquoi il n’a pas pu bénéficier d’une aide active à mourir.

De quelle pathologie souffre Alain Cocq ?

La maladie orpheline dont souffre le Dijonnais est tellement rare qu’elle n’a même pas de nom. D’après lui, seules trois personnes au monde en présentent les symptômes. « Et deux en sont décédées », affirme-t-il sans qu’il soit possible de le vérifier.

Concrètement, les parois des artères de cet homme de 57 ans se collent, ce qui entraîne une ischémie (arrêt ou insuffisance de la circulation du sang dans un tissu ou un organe). Si les médecins s’en sont aperçus lors d’une bénigne opération du genou consécutive à une chute en 1986, Alain Cocq assure en avoir ressenti les premiers symptômes quand il avait « 12 ou 13 ans ».

Aujourd’hui, il ressent des décharges électriques dans son corps « toutes les deux ou trois secondes », ne peut plus se lever de son lit médicalisé et perd peu à peu l’usage de la parole, de l’ouïe et de la vue.

Pourquoi ne peut-on pas dire qu’il est « en fin de vie » et qu’est ce que cela change ?

Même si Alain Cocq assure être en « phase terminale depuis 34 ans », il n’est aujourd’hui pas « en fin de vie ». En grande souffrance, cet ancien plombier est incapable, pour autant, de prouver que sa vie est menacée à très court terme.

Cela constitue une vraie différence. La loi Claeys – Leonetti (2015) prévoit, en effet, la possibilité « d’une sédation profonde et continue » pour les patients en souffrance et en « fin de vie ». Dans les faits, Alain Cocq ne peut donc pas bénéficier de cette disposition, au sens strict.

Toutefois, s’il met à exécution, ce vendredi soir, son projet de se laisser mourir de faim et de soif en cessant de s’alimenter et de s’hydrater, il passera rapidement en « fin de vie » et pourra disposer de la sédation prévue par la loi.

Dans ce cadre, pourquoi refuse-t-il de le faire ?

Militant infatigable de la cause handicapée, Alain Cocq a rapidement exclu l’idée de pouvoir bénéficier d’une sédation continue jusqu’à sa mort. D’abord, parce qu’il souhaite rester « conscient » et non pas « mourir après avoir passé plusieurs jours dans les vapes ».

Surtout, cet homme âgé de 57 ans veut alerter l’opinion publique sur la situation des personnes en fin de vie en France. Lui souhaite que la France aille plus loin sur l’euthanasie en permettant l’aide médicale à mourir, soit le suicide assisté. « Ce que je veux, c’est qu’un médecin me mette un puissant barbiturique dans la main, que je l’avale et que tout soit terminé », confie-t-il. Une option qu’a catégoriquement exclue Emmanuel Macron.

Pourquoi le gouvernement a-t-il refusé d’évoluer sur cette question ?

Que ce soit lors de la campagne de l’élection présidentielle ou depuis qu’il est à l’Elysée, Emmanuel Macron n’a jamais vraiment pris position en faveur de l’euthanasie active. « Et je ne crois pas que cela soit à l’ordre du jour », assure Alain Claeys, l’ancien député (PS) à l’origine de la loi de 2015.

Soucieux de ne pas raviver un épineux débat de société, l’exécutif souhaite plutôt que la loi de 2015 soit déjà bien appliquée et encourage les Français à rédiger leurs directives anticipées. « Parce que je ne me situe pas au-dessus des lois, je ne suis pas en mesure d’accéder à votre demande, a ainsi répondu le président à Alain Cocq dans une lettre datée de jeudi. Votre souhait est de solliciter une aide active à mourir qui n’est aujourd’hui pas permise dans notre pays. »

Alain Cocq a annoncé qu’il mettrait son projet à exécution ce vendredi au coucher. Il ne conservera que son traitement de morphine pour éviter de souffrir.

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