Pourquoi Emmanuel Macron a choisi de nommer Pap Ndiaye à l’Éducation nationale – Le Journal du dimanche

À peine nommé et déjà violemment attaqué. Il n’aura pas fallu plus de quelques heures pour que l’historien Pap Ndiaye, nouveau ministre de l’Éducation d’Emmanuel Macron, devienne la cible d’une violente campagne de dénigrement. De Marine Le Pen, qui voit dans cette nomination « la dernière pierre de la déconstruction de notre pays, de ses valeurs et de son avenir », à Éric Zemmour, qui le décrit comme un « indigéniste, wokiste et obsédé par la race », l’extrême droite, à l’unisson, a attaqué d’emblée. Les Républicains (LR) n’ont pas été en reste : « On sait déjà où se situe le ministre de l’Éducation nationale : adepte de l’islamogauchisme et militant anti-flic ! Terrifiant », s’est offusqué Éric Ciotti sur Twitter.

Une défiance exprimée

En cause : les prises de position de Pap Ndiaye sur certains sujets de société, comme les discriminations raciales ou les violences policières. Agrégé d’histoire, normalien et spécialiste des États-Unis, mais aussi de « la condition noire », titre de l’un de ses essais, cet universitaire internationalement reconnu avait critiqué la notion d’« islamo-gauchisme ». À l’exact l’opposé de son prédécesseur Jean-Michel Blanquer, qui avait contribué à institutionnaliser le concept et notamment participé à un colloque consacré à cette notion à la Sorbonne, en février.

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Un surprenant contrepied dans la succession Rue de Grenelle, donc, mise en scène par Emmanuel Macron – qui avait déjà installé Pap Ndiaye en 2021 à la tête du Musée national de l’histoire de l’immigration – afin de remettre au goût du jour la « notion de dépassement » qui lui est chère, selon un conseiller ministériel : « C’est la force du Président. Il ne veut pas enfermer les gens dans des cases, ni se laisser lui-même enfermer dans des cases. » Mais certains macronistes ont déjà publiquement exprimé leur défiance envers le nouveau ministre. À l’instar du député LREM Jean-Louis Bourlanges, qui a estimé sur Franceinfo que « la nomination de Pap Ndiaye pose problème ».

Dans l’entourage présidentiel, on démine : « Ce n’est pas Blanquer le laïcard contre Pap Ndiaye le communautariste. Ce qui compte, c’est d’avoir des personnalités profondément républicaines et universalistes. » À trois semaines des élections législatives, la nomination d’une figure marquée à gauche, par ailleurs première personnalité noire à occuper un ministère de premier plan après Christiane Taubira à la Justice, ressemble fort à un gage donné à l’électorat de gauche. Cette triangulation ne fait pourtant pas l’unanimité chez les soutiens du Président. « Il faut faire attention aux retours de boomerang, s’inquiète un proche d’un ministre. Les gens qui voyaient Macron comme un président de centre droit et laïque pourraient être déçus avant les législatives. » À peine nommé et déjà sur un champ de mines.

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