Passe sanitaire et licenciements : des syndicats dénoncent les dispositions du projet de loi anti-Covid – Le Monde
« Dérapage énorme », « atteinte à la liberté de travailler »… plusieurs organisations syndicales ont dénoncé vendredi 23 juillet les dispositions du projet de loi anti-Covid-19 qui ouvre la voie à de possibles licenciements pour les personnes qui n’auraient pas de passe sanitaire.
Le texte, adopté en première lecture par l’Assemblée nationale vendredi matin, et qui doit désormais être examiné au Sénat, prévoit pour les salariés et agents publics qui se retrouveraient sans passe sanitaire à des postes où celui-ci va devenir obligatoire une procédure de suspension du contrat de travail sans rémunération. Celle-ci prendra fin lorsque le salarié produira « les justificatifs requis ». Le salarié peut poser des jours de congés ou de RTT, ou encore voir avec l’employeur s’il peut être affecté temporairement sur un autre poste.
Le texte ajoute que « le fait pour un salarié de ne plus pouvoir exercer son activité pendant une durée cumulée supérieure à l’équivalent de deux mois de journées travaillées en raison du non-respect de l’obligation de présentation des justificatifs, certificats et résultats requis peut être un motif spécifique constituant une cause réelle et sérieuse de licenciement ». Le dispositif est similaire pour les salariés soumis à l’obligation vaccinale.
Dans un communiqué, la CFE-CGC a dénoncé vendredi un « dérapage ». « C’est transgressif, dangereux et inquiétant de voir apparaître pour la première fois un motif de licenciement à la charge du salarié pour une raison relevant de sa vie privée », écrit le syndicat, exhortant le gouvernement à « revenir à la raison ».
Force ouvrière conteste également que « la politique mise en œuvre pour accélérer et élargir la vaccination ou s’assurer des protections requises, nécessaires face à la survenue du variant Delta, s’appuie sur la menace de sanctions allant jusqu’au licenciement des salariés ».
Dans un communiqué publié vendredi soir, Solidaires « se positionne contre le passe sanitaire qui se construit contre les travailleuses et les travailleurs, avec des menaces fortes (pertes de salaires, mises à pied, licenciements…), et qui met en danger le secret médical ». « Ceux et surtout celles qui étaient premier-es de corvées, travaillant sans aucune protection lors de la première vague, seront cette fois-ci les premier-es sanctionné-es », dénonce l’union syndicale.
Olivier Véran « pense que ça n’arrivera pas »
Mercredi, la CGT avait aussi jugé dans un communiqué que « la cible à combattre doit être le virus, pas les salariés », dénonçant un texte « qui porterait atteinte à leur liberté de travailler ». « Nous interpellons les parlementaires pour qu’ils mesurent toutes les conséquences sociales que cette loi, si elle était votée, ferait peser, quasi exclusivement, sur les salariés en imposant des sanctions. Des sanctions qui pourraient aller jusqu’à la suspension de leur rémunération, voire leur licenciement », avait écrit le syndicat.
Devant les députés, jeudi, le ministre de la santé, Olivier Véran, s’est au contraire dit confiant : « Je vais vous dire ma conviction, je pense que ça n’arrivera pas. Vu le nombre de vaccinations que nous enregistrons ces derniers jours, le passe sanitaire sera respecté par l’ensemble des salariés de ce pays. »
« C’est à l’employeur de s’assurer que ses salariés sont en conformité avec la loi. Il devra contrôler la validité de leur passe chaque jour, sauf pour les salariés qui lui fourniront, sur la base du volontariat, une attestation de vaccination », a précisé la ministre du travail, Elisabeth Borne, dans une interview à Ouest France.
« Quoi qu’il en soit, nous souhaitons qu’il y ait systématiquement un entretien entre l’employeur et le salarié pour échanger sur la manière de régulariser un maximum de situations en amont », a-t-elle insisté, annonçant également la création d’« une autorisation d’absence sur le temps de travail pour permettre aux salariés de se faire vacciner, sans perte de salaire ».