Pas assez de formations dans l’IA en France, qu’est-ce qui fait défaut ?

Pas assez de formations dans l'IA en France, qu'est-ce qui fait défaut ?

D’ici 2023, 7 500 postes seront à pourvoir en France dans les métiers liés à l’intelligence artificielle (IA) et à l’analyse des données, estimait en 2019 une étude réalisée par l’Opiiec pour le compte de Syntec Numérique. Mais ce sont 7 500 profils dont la France ne dispose sans doute pas pour l’heure.

Des profils compétents en intelligence artificielle s’avèrent difficiles à dénicher sur le marché, voire impossibles dans certaines spécialités. C’est ce constat d’alerte qui a conduit à la mise sur pied du deuxième volet de la stratégie du gouvernement en matière d’intelligence artificielle, trois ans après un premier volet stratégique plutôt orienté vers la recherche, et qui avait débouché sur la création de quatre instituts pluridisciplinaires de l’IA.

Où en sommes-nous aujourd’hui ? Visiblement, la main-d’œuvre qualifiée s’est raréfiée et les besoins en formation n’ont fait que s’accentuer jusqu’à atteindre un point critique : dans une économie de la donnée qui progresse d’environ 10 % par an, le déficit de profils pourrait doubler et atteindre 160 000 à l’horizon 2025, peut-on lire dans un document de travail ministériel que ZDNet s’est procuré.

Mais les innovations n’attendent pas. Alors que le décollage de l’IA applicative a engendré partout de fortes pénuries de profils, près de 75 % des grands groupes affichent par exemple des besoins en recrutement pour les prochaines années.

publicité

Les data engineers manquent à l’appel

Globalement, c’est toute l’offre de formation française qui reste quantitativement trop faible. On peut toutefois déceler des cas où la pénurie est particulièrement critique, à l’instar par exemple des profils d’ingénieurs des données et des ingénieurs d’intégration logicielle des systèmes d’IA. « Toute la phase en amont n’est pas bien couverte », indique Stéphane Roder, CEO d’AI Builders, à ZDNet. Le même constat aussi se fait du côté du traitement automatique du langage naturel et du MLOps, ajoute l’expert.

Au contraire, le rapport identifie un métier pour lequel les formations ne manquent pas : celui de data scientist. « Nous avons plutôt réussi cette partie » confirme Stéphane Roder, qui ajoute que toute la partie « stratégie/conseil » est aussi « bien couverte » avec « de très bons profils à double compétence, avec à la fois une vision marché et une compréhension technique ».

D’ailleurs, le plan du gouvernement veut développer des enseignements pluridisciplinaires, et pas uniquement au niveau master ou grande école, mais aussi en BTS, DUT, et licences (le plan cible au moins 2 000 étudiants en premier cycle, 1 500 étudiants en master et 200 thèses supplémentaires par an). L’idée du plan est aussi d’accélérer sur les formations de profils dits « intermédiaires », qui ont vocation à transposer, commercialiser ou utiliser des technologies d’IA.

Diagnostic à mi-parcours

Le gouvernement veut mettre le paquet pour réduire les tensions à l’embauche et la pénurie de profils, en consacrant au total 781 millions d’euros (dont 776 millions d’euros proviennent de l’Etat et 5 millions du privé) à ce plan de formation massif, qui sera déployé sur cinq ans.

Ce surinvestissement dans la partie formation un peu tardif révèle, en creux, un demi-échec de la première phase du plan national de l’IA, amorcée en 2018. Même si « les objectifs de doublement du volume des profils formés ont été tenus, cela ne suffit toujours pas pour couvrir les besoins des entreprises et des services publics », souligne le rapport.

Pour s’assurer du bon déroulement du plan, un diagnostic national sera conduit en 2022 pour évaluer l’impact de la stratégie nationale sur l’offre de formation initiale depuis la publication du Rapport Villani. Par la suite, le gouvernement envisage aussi de créer un portail de recensement de tous les établissements qui forment à la data science, à l’IA et à la robotique.

Pour Stéphane Roder, il y a dès maintenant urgence à penser la « troisième phase » fictive de ce plan stratégique, celle tournée vers les besoins des entreprises. « Maintenant, il manque une stratégie industrielle. Le défi, c’est le taux d’équipement des entreprises », dit-il. « On peut faire de la recherche, on peut faire de la formation, mais le but ultime, c’est que cela serve à l’industrie pour maintenir son niveau de compétitivité. »

Leave a Reply

Discover more from Ultimatepocket

Subscribe now to keep reading and get access to the full archive.

Continue reading