« On ne veut pas devenir une théocratie » : en Israël, des dizaines de milliers de manifestants contre le gouvernement – Le Monde

Des manifestants israéliens lors d’un rassemblement contre le nouveau gouvernement de Benyamin Nétanyahou, à Tel-Aviv, le 14 janvier 2023.

Le retour de Benyamin Nétanyahou au pouvoir, c’est aussi la reprise des manifestations hebdomadaires après shabbat, le samedi soir, en Israël. En 2020, la mobilisation avait duré des mois contre le premier ministre en procès pour corruption ; elle renaît, encore plus massive, depuis que le nouveau gouvernement d’extrême droite a prêté serment le 29 décembre 2022. Un décompte officieux dénombrait quelque 80 000 manifestants ce samedi 14 janvier – la semaine précédente, ils étaient 30 000.

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La plupart concentrent leurs griefs contre la réforme de la justice présentée le 4 janvier par le garde des sceaux, Yariv Levin. La nouvelle coalition prévoit notamment d’affaiblir le pouvoir de supervision de la Cour suprême et de politiser les nominations des juges et des conseillers légaux.

De la place Habima, au cœur de Tel-Aviv, le cortège débordait dans les rues environnantes, marée de drapeaux israéliens blancs et bleus sous les averses d’orage. L’ancienne magistrate de la Cour suprême Ayala Frocaccia, première personnalité à s’exprimer, a déploré le « commencement d’une nouvelle ère avec une nouvelle définition de la démocratie : non pas une démocratie basée sur des valeurs, mais une démocratie tronquée qui repose entièrement sur la “volonté de l’électeur” ».

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Les dirigeants de l’opposition se sont faits discrets – à la demande des organisateurs, selon le journal Haaretz –, le premier ministre sortant, Yaïr Lapid, était absent. L’ex-ministre de la défense Benny Gantz, qui a brièvement fait coalition avec Nétanyahou entre 2020 et 2021, a toutefois pris rapidement le mégaphone, promettant d’user de « tous les moyens légaux pour éviter un coup d’Etat ». D’autres manifestations, plus restreintes, ont eu lieu à Jérusalem et Haïfa, grande ville du nord du pays.

La crainte d’un changement de régime

Le rassemblement de samedi était le point d’orgue d’une semaine de fronde contre la réforme de la justice qui risque de déstabiliser l’équilibre des pouvoirs institutionnels en Israël, en accordant notamment aux parlementaires le droit de modifier les lois à la majorité absolue, sans que la Cour suprême ne puisse réellement s’y opposer. La présidente de l’institution, Esther Hayut, a sévèrement condamné, jeudi 12 janvier, la tentative du gouvernement de réduire la justice à « une institution silencieuse ».

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« Il s’agit d’une attaque débridée contre le système judiciaire, comme s’il représentait un ennemi qui devait être combattu et écrasé », a tancé la magistrate lors d’une conférence à Haïfa. Une telle sortie, de la part de la juge en chef, est inédite en Israël. Plusieurs centaines d’avocats ont manifesté contre la réforme et une dizaine d’anciens procureurs ont publié une lettre de protestation.

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