« Nous sommes enfin dans la rue » : les Colombiens contestent la politique sociale du gouvernement – Le Monde

Le mouvement populaire d’ampleur fait craindre au pouvoir en place une contagion des manifestations chiliennes.

Par Publié hier à 12h38, mis à jour hier à 13h08

Temps de Lecture 3 min.

Des manifestants antigouvernementaux défilent à Bogota, la capitale colombienne, le 21 novembre.

Dans une Amérique Latine agitée, c’était jeudi 21 novembre au tour des Colombiens de descendre dans la rue. Les syndicats, les partis d’opposition, les étudiants, les organisations indiennes, les écolos, les féministes avaient appelé à une journée de grève et de manifestations, pour protester contre la politique sociale du président Ivan Duque et pour défendre l’accord de paix signé avec la guérilla en 2016. Une fois n’est pas coutume, l’Eglise catholique elle-même avait exprimé son soutien à la mobilisation.

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Partout, les manifestations se sont déroulées dans le calme et la gaîté, avant l’arrivée, ici et là, de groupes de casseurs et de la police anti-émeutes. Une quarantaine de civils et presque autant de policiers ont été blessés, selon les autorités. A Cali, au sud-ouest de la capitale Bogota, le couvre-feu a été déclaré à partir de 19 heures.

Tintement de casseroles

Pour ne pas laisser la journée se terminer sur ces violences, un appel à un « cacerolazo » a été lancé sur les réseaux sociaux. Dans toutes les villes du pays et dans tous les quartiers de la capitale, le tintement des cuillères sur les casseroles a résonné avec force dans la nuit, pour la première fois dans l’histoire de la Colombie. Le bilan du gouvernement fait état de 207 000 manifestants au niveau national, un chiffre peu crédible au regard de l’ampleur de la mobilisation dans toutes les villes et les villages. A Bogota, la grande Plaza de Bolivar du centre-ville débordait de manifestants en début d’après-midi.

« La Colombie se réveille enfin », se réjouit une manifestante de 72 ans. Le pays qui sort – avec difficulté – d’un long conflit armé n’est pas un habitué des grandes manifestations de rue. Les organisateurs se sont félicités du succès de la grève et de la mobilisation. « Par son ampleur et son langage, ce mouvement est sans précédent », considère l’activiste pour la paix Camilo Gonzalez.

« Sans peur et avec espoir »

« Aujourd’hui, les Colombiens ont parlé. Nous sommes à l’écoute. Le dialogue social que nous devons approfondir avec tous les secteurs de la société a été la bannière principale de ce gouvernement », a déclaré Ivan Duque dans la soirée. Mais le chef de l’Etat n’a pas répondu aux organisations du Comité national de grève qui demandent à le rencontrer. Au pouvoir depuis dix-huit mois, Ivan Duque est crédité de 69 % d’opinions défavorables par un récent sondage.

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« Je suis convaincu, comme beaucoup, qu’il faut changer la Colombie, explique en défilant Juan Carlos Florez, conseiller municipal à Bogota. Nous sommes des millions à avoir attendu pendant des années le moment de réaliser ce changement de manière pacifique. Aujourd’hui, nous sommes enfin dans la rue sans peur et avec espoir. »

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