Neuf choses à savoir sur le procès des attentats du 13 novembre – Les Échos

Publié le 7 sept. 2021 à 16:00Mis à jour le 7 sept. 2021 à 16:37

C’est un procès historique qui s’ouvre, ce mercredi 8 septembre, dans le vieux Palais de Justice de Paris, sur l’Ile de la Cité. Six ans après les attentats du 13 novembre 2015, qui ont fait 130 morts et plus de 1.300 blessés, à Paris et Saint-Denis, ce dernier promet d’être inédit par sa durée mais aussi sa charge émotionnelle.

Deux ans ont été nécessaires à sa préparation. Qui sont les accusés ? Combien de temps va-t-il durer ? Voici ce qu’il faut savoir sur la plus grande audience criminelle jamais organisée en France.

1. Vingt personnes sur le banc des accusés

Au total, 20 hommes sont jugés lors de ce procès. Onze, déjà en détention provisoire, vont comparaître dans l’immense box vitré conçu pour l’occasion. Trois autres, placés sous contrôle judiciaire, vont se présenter libres à l’audience. Les six autres, dont cinq présumés morts, seront jugés par défaut.

Tous sont présumés complices des attaques du 13 novembre 2015. Les regards se tourneront notamment vers Salah Abdeslam, accusé le plus connu de ce procès et seul membre des commandos à avoir survécu. L’homme de 31 ans, emprisonné à Fleury-Mérogis, se mure dans le silence depuis le début de l’instruction. Beaucoup espèrent qu’il fasse preuve d’une attitude plus conciliante lors de son audition, prévue en janvier 2022.

Les neuf autres membres des commandos terroristes ne seront, eux, pas jugés. Ils sont tous décédés et l’action judiciaire s’est éteinte avec leur mort.

2. Près de 1.800 parties civiles

L’ampleur de ce procès réside surtout dans le nombre de victimes. Vendredi 13 novembre 2015, 130 personnes sont mortes lors des attentats les plus meurtriers que la France ait jamais connus. Plus de 350 personnes ont également été blessées, aux abords du Stade de France, sur des terrasses parisiennes ou au Bataclan. Nombreux sont également les survivants traumatisés.

Face aux accusés, près de 1.800 personnes se sont constituées partie civile. Un nombre inédit. C’est six fois plus qu’au procès des attentats de janvier 2015. Ils livreront leurs témoignages à partir du 28 septembre, et pendant cinq semaines complètes.

3. Quelque 330 avocats mobilisés

A nombre de victimes exceptionnel, nombre d’avocats proportionnel. Plus de 300 avocats sont mobilisés du côté des parties civiles.

A cela s’ajoute une trentaine d’avocats pour la défense. Parmi eux, des étoiles montantes du barreau parisien, dont Me Olivia Ronen, 31 ans, avocate de Salah Abdeslam.

Les accusés ne seront pas jugés par un jury populaire mais par cinq magistrats professionnels. La cour d’assises est présidée par un magistrat d’expérience, Jean-Louis Périès, 65 ans. Il s’agira de son dernier procès avant la retraite, après quarante ans en tant que magistrat.

Trois avocats généraux porteront l’accusation au nom de la société française. Le trio sera composé de Nicolas Braconnay, Nicolas Le Bris et Camille Hennetier, respectivement 39, 42, et 48 ans. Tous ont travaillé sur ce dossier fleuve : plus de 500 tomes regroupant plus de 47.000 procès-verbaux et qui atteindrait 53 mètres de hauteur.

4. Neuf mois de procès

Ce procès promet d’être également inédit dans la durée. Au total, 145 jours d’audience sont prévus. Le délibéré est attendu fin mai 2022. « Neuf mois d’audience, on n’a jamais fait ça, personne n’a jamais fait ça, pas plus le président de la cour d’assises que les avocats généraux », a souligné, sur France Inter, Me Jean Reinart, avocat d’une centaine de parties civiles.

Les débats débuteront mercredi 8 septembre à 12 h 30. Ils commenceront ensuite à la même heure du mardi au vendredi pendant toute la durée de l’audience.

Les premiers témoins sont attendus à la barre à partir du lundi 13 septembre. Puis viendra, en janvier, le tour des accusés présents. Plusieurs personnalités, comme François Hollande, président de la République à l’époque des faits, ou Bernard Cazeneuve, alors ministre de l’Intérieur, seront également entendus.

Si la lecture du délibéré est prévue les 24 et 25 mai 2022, nul ne peut prédire sa date exacte, au vu du nombre de personnes appelées à témoigner, et des éventuels rebondissements à venir.

5. La peine maximale encourue

Les peines encourues par les accusés vont de 6 ans de prison à la réclusion criminelle à perpétuité. Salah Abdeslam encourt ainsi la peine maximale, tout comme dix autres des accusés.

Huit autres sont accusés d’association de malfaiteurs terroriste, rappelle France Inter. Ils encourent une peine de 20 ans de réclusion. Un dernier homme est accusé de recel de terroriste. Il risque une peine de 6 ans de prison maximum.

6. Une salle construite pour l’occasion

Ce procès exceptionnel est également un véritable défi logistique. Pour accueillir les accusés, les parties civiles mais aussi les centaines de journalistes accrédités, et le public, une salle spéciale a été créée. Aucune salle en France n’était assez grande pour accueillir autant de monde. Plus de 3.000 personnes sont attendues lors des journées les plus suivies du procès.

C’est au sein du hall des pas perdus du Palais de Justice historique de Paris que cette salle a été montée de toutes pièces. Un an et demi de travaux aura été nécessaire à la construction de la salle des « Grands Procès ». Cette dernière mesure 750 m2, longue de 45 mètres et large de 15. Elle peut accueillir jusqu’à 550 personnes et est dotée de huit écrans de retransmission pour les rangs situés les plus au fond et les gradins. 

7. Une sécurité maximale

Pour accéder à cette salle, un parcours spécial a été pensé. Chaque jour, les accusés seront amenés sous très haute sécurité dans leur box.

Ils seront escortés par la police et la gendarmerie, dans des fourgons blindés, depuis leurs prisons franciliennes, avec un hélicoptère à l’appui, relate France Inter. Sur le chemin prévu, certaines rues seront entièrement bloquées, et la circulation des voitures sera interdite sur l’Ile de la Cité jusqu’au début des audiences.

Au sein même du Palais de Justice, un chemin spécifique a été conçu pour rejoindre leurs cellules, puis le box des accusés. C’est notamment à cause de ce dispositif de sécurité très lourd que les audiences ne commencent pas le matin, mais à 12 h 30. Cet horaire permettra également aux avocats et parties civiles de bénéficier de la matinée, pour travailler ou se reposer, alors que le procès s’annonce éprouvant.

8. Un procès filmé pour l’histoire

Historique, ce procès l’est aussi car il sera filmé, comme celui des attentats de Charlie Hebdo et de L’Hyper Cacher.

Dix caméras ont été placées dans la salle. Les bandes-vidéo ne seront visibles que dans cinquante ans. Il s’agit du 13e procès filmé en France depuis 1985, date à laquelle le dispositif a été autorisé par la loi.

9. Un coût de plusieurs millions d’euros

Construction de la salle, mise en place d’une webradio, défense des avocats ou des parties civiles… une grande partie de ce procès sera financée par l’Etat. Et la facture promet d’atteindre plusieurs millions.

Dans le détail, le coût de la construction de la salle « Grands Procès » est de 8 millions d’euros. Un montant qui atteint 10 millions en ajoutant des frais annexes, comme ceux de conceptions.

Autre singularité de ce procès qui a un prix : une webradio sécurisée. Elle permettra aux victimes, qui ne peuvent pas ou ne souhaitent pas se rendre sur place, de suivre les débats à distance. Coût de la mesure : 250.000 euros.

A ces sommes s’en ajoutent d’autres, en raison de la nature du procès. Les victimes du terrorisme ont, de droit, accès à l’aide juridictionnelle, une prise en charge par l’Etat des frais liés à une procédure judiciaire habituellement réservée aux justiciables plus modestes.

En clair, leurs avocats, mais aussi leurs frais de déplacements pour assister au procès sont payés par l’Etat. Avec plus de 130 jours d’audience prévus, la facture devrait atteindre plusieurs millions. La somme finale déprendra du nombre de personnes présentes, de la durée du procès, mais aussi, in fine, du nombre de parties civiles, certaines pouvant encore se manifester.

Enfin, les accusés devraient également bénéficier de l’aide juridictionnelle, en raison de leurs revenus. Chaque demi-journée d’audience coûte 272 euros. Si un accusé bénéficie de plusieurs avocats, ils se partagent la somme.

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