Morts sur le Pont-Neuf à Paris : « Les meurtriers, ce ne sont pas nous… » Les policiers dans la rue pour la présomption de légitime défense – 20 Minutes

« Soyons clairs, le problème de la police, c’est la justice. » Le slogan, lancé depuis la tribune par le secrétaire général du syndicat Alliance, Fabien Vanhemelryck, a beau dater de l’an dernier, il a été chaudement applaudi par les quelque 300 policiers réunis ce lundi midi, sur la place Saint-Michel, en plein cœur de Paris. Tous manifestaient contre la mise en examen pour « homicide volontaire » d’un des leurs.

Le drame s’est déroulé à quelques pas de là, sur le Pont-Neuf, le soir de l’élection d’Emmanuel Macron : un gardien de la paix de 24 ans a ouvert le feu contre une voiture qui selon, son récit, tentait de se soustraire à un contrôle et aurait manqué de percuter un des policiers. Le conducteur et son passager avant sont décédés, l’homme sur la banquette arrière a été grièvement blessé.

Devant la fontaine Saint-Michel, les manifestants estiment que la qualification ne correspond pas à la réalité de l’intervention. Et ce, d’autant plus que les juges sont allés au-delà des réquisitions du parquet. « Les conditions étaient claires, on avait un véhicule qui allait percuter nos collègues, il y avait clairement une menace pour leur intégrité physique », insiste Julien Schenardi, secrétaire général dans le Val-de-Marne du syndicat Alliance, à l’initiative de la manifestation à laquelle se sont joints Synergie et l’Unsa-Police. « Dans cette qualification, il a la volonté et l’intention de tuer, mais ce policier a exécuté un tir de riposte, c’est une aberration, ça ne colle pas avec ce qui s’est passé », ajoute Jérôme Jimenez, responsable Île-de-France de l’Unsa Police, qui estime que la légitime défense ne peut pas être niée.

Une « justice de bon sens »

La présomption de légitime défense pour les forces de l’ordre​, c’est justement la revendication phare du rassemblement de ce lundi. Selon ce principe, ce ne serait plus aux policiers de prouver qu’ils étaient en état de légitime défense lorsqu’ils ont fait usage de leur arme mais à la personne visée de démontrer qu’elle a fait l’objet d’un usage abusif de la force. « Si un policier fait usage de son arme, c’est bien pour se défendre, pour mettre fin à un danger grave pour lui et pour les autres. Aujourd’hui, la réponse de la justice, c’est une suspicion sur la police nationale », explique Benoît Barret, secrétaire national province d’Alliance. Et le syndicaliste – qui avance qu’il y a un refus d’obtempérer toutes les trente minutes en France – d’insister : « Quand on utilise notre arme, on veut être certain que ça ne va pas se retourner contre nous. Les meurtriers, ce ne sont pas nous. »

Face aux critiques sur l’instauration d’une présomption de légitime défense, considérée par certains comme « un permis de tuer », les policiers se défendent : « La présomption de légitime défense, ce n’est en aucun cas une exonération de la responsabilité de notre collègue, c’est juste l’inversion de la charge de la preuve », explique Patrice Ribeiro, le secrétaire national du syndicat Synergie Officiers. « Quand un policier utilise son arme, dans 100 % des cas, il estime qu’il est dans son bon droit, qu’il est dans le cadre de la légitime défense. C’est à la partie adverse de prouver que ce n’est pas le cas », complète Olivier Varlet, secrétaire général de l’UNSA Police.

Une manifestation qui ne pas l’unanimité

« Une décision de mise en examen n’est pas une condamnation ; la personne mise en examen n’est jamais présumée coupable mais toujours présumée innocente », a réagi à la mi-journée le Syndicat de la magistrature. De son côté, l’Union syndicale des magistrats (USM) a estimé que « l’appel à manifester contre une décision de justice est particulièrement nuisible et dangereux dans une démocratie ». Et les dissonances s’observent jusque dans les rangs de la police. Alors que des élections syndicales sont prévues fin 2022, cette affaire a exacerbé les tensions entre représentants des gardiens de la paix. Le syndicat Unité SGP Police, concurrent d’Alliance, a ainsi décidé de ne pas appeler à manifester et de ne pas « prendre des positions pouvant porter préjudice » au collègue mis en examen, rappelant qu’il est présumé innocent.

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