Mort de Michel Fourniret : condamné pour huit meurtres, le tueur en série était soupçonné d’avoir commis de no – franceinfo

La justice ne pourra plus compter sur ses aveux. Le tueur en série Michel Fourniret est mort lundi 10 mai à l’âge de 79 ans, a annoncé le procureur de Paris. Il était hospitalisé depuis le 28 avril à la Pitié-Salpêtrière, à Paris, et un protocole de fin de vie avait été mis en place. Le détenu, atteint notamment de la maladie d’Alzheimer, a été condamné pour huit meurtres et était mis en examen dans quatre dossiers, dont celui de la disparition d’Estelle Mouzin. Il était également soupçonné dans plusieurs dizaines de “cold cases”. Tour d’horizon du parcours judiciaire de celui que l’on surnomme “l’ogre des Ardennes”.

Condamné pour huit meurtres

Lorsque Michel Fourniret est arrêté en juin 2003 en Belgique, pour avoir tenté d’enlever une jeune fille de 13 ans sur le chemin de l’école, son parcours criminel en France est déjà bien entamé. Celui qui a été libéré en 1987, après une condamnation à sept ans de prison pour des agressions sexuelles commises contre plusieurs jeunes femmes dans la région parisienne, n’a pourtant pas eu affaire à la justice pendant seize ans. Placée en garde à vue comme lui, sa femme, Monique Olivier, rencontrée en prison, avoue aux enquêteurs belges plusieurs meurtres commis entre 1987 et 1990 par son époux, obsédé par la virginité.

Michel Fourniret, alors âgé de 66 ans, est condamné cinq ans plus tard, en mai 2008, par la cour d’assises de Charleville-Mézières (Ardennes), à la perpétuité incompressible – la peine maximale du Code pénal – pour trois agressions de jeunes filles ayant réussi à lui échapper et le meurtre de sept autres : Isabelle Laville, 17 ans, Fabienne Leroy, 20 ans, Jeanne-Marie Desramault, 22 ans, Elisabeth Brichet, 12 ans, Natacha Danais, 13 ans, Céline Saison, 18 ans, et Manania Thumpong, 13 ans. 

En novembre 2018, Michel Fourniret est condamné à la perpétuité pour un huitième meurtre, crapuleux cette fois : celui de Farida Hammiche, âgée de 30 ans, femme d’un ex-codétenu, en avril 1988 près de Clairefontaine-en-Yvelines (Yvelines). L’objectif était de s’emparer du butin du “gang des postiches”, avec lequel il s’est offert le domaine du Sautou, dans les Ardennes. 

Mis en examen dans quatre dossiers

Le tueur en série était poursuivi depuis peu dans quatre autres affaires, instruites à Paris par la juge d’instruction Sabine Khéris, qui a donné un coup d’accélérateur considérable aux investigations le visant. En février 2018, il a ainsi avoué dans son bureau les meurtres de Joanna Parrish et Marie-Angèle Domece, en 1988 et 1990, dans l’Yonne. Il avait été mis en examen en mars 2008 pour ces deux meurtres avant de bénéficier en septembre 2011 d’un non-lieu, plus tard annulé. Monique Olivier est également mise en examen pour “complicité” dans ces deux affaires. 

En novembre 2019, cette dernière fait voler en éclats l’alibi de Michel Fourniret dans l’affaire Estelle Mouzin : un coup de fil passé à son fils que Monique Olivier reconnaît avoir passé elle-même le soir de la disparition de la fillette de 9 ans, le 9 janvier 2003, à Guermantes (Seine-et-Marne). Soupçonné depuis plusieurs années, Michel Fourniret est mis en examen pour “enlèvement et séquestration suivis de mort”. Monique Olivier l’est pour “complicité”. Un ADN partiel de l’enfant est retrouvé sur un matelas chez la sœur de Michel Fourniret dans les Ardennes. Malgré des fouilles intenses en début d’année, le corps de la fillette n’a pas été retrouvé.

>> RECIT. Affaire Estelle Mouzin : une enquête interminable passée trop longtemps à côté de Michel Fourniret

Entre décembre 2020 et janvier 2021, le couple est mis en examen dans l’affaire Lydie Logé, lui pour “enlèvement et séquestration suivis de mort”, elle pour “complicité”. Cette jeune femme de 29 ans avait disparu le 18 décembre 1993 dans l’Orne et son ADN a été identifié parmi les prélèvements effectués par les policiers belges dans la camionnette blanche du tueur en série à l’époque de son arrestation en 2003. “On n’a pas pu aller au bout des interrogatoires dans le dossier Lydie Logé”, regrette auprès de franceinfo Didier Seban, l’avocat en charge de ces quatre dossiers côté parties civiles.

Dans un communiqué publié après sa mort, les avocats de Michel Fourniret remettent en cause “la valeur des déclarations” faites par leur client au cours de ces deux dernières années “compte tenu de l’altération manifeste de ses facultés mentales”. La mort de Michel Fourniret entraîne de toute façon l’extinction de l’action publique, autrement dit des poursuites, à son encontre dans ces affaires. Un procès reste toutefois possible avec le renvoi de son ex-femme devant la justice pour “complicité”.

“C’est une part de vérité qui s’en va pour les familles.”

Didier Seban, avocat des parties civiles

à franceinfo

Soupçonné dans de nombreux “cold cases”

Michel Fourniret avait déclaré aux enquêteurs avoir eu besoin de “chasser au moins deux vierges par an”. Un décompte macabre qui permet d’évaluer à une trentaine le nombre de passages à l’acte présumés entre 1987 et 2003. Or, l’intéressé n’a reconnu sa responsabilité que dans douze affaires. La justice s’intéresse à une “période blanche” de dix ans, entre 1990 et 2000, pendant laquelle aucune victime ne lui est imputée. Entendu lors du procès de l’assassinat de Farida Hammiche, un enquêteur belge avait confié à la barre son intime conviction qu’il existe “d’autres crimes commis par le couple”, lui attribuant “neuf tentatives d’enlèvement sur des gamines” sur cette période. “Fourniret est tellement orgueilleux, je le vois mal rester dix ans sur des échecs”, avait-il relevé.

Comme le rappelle Le Monde (article payant), une liste de soixante-dix “victimes potentielles” avait été constituée et confiée à l’Office central pour la répression des violences aux personnes (OCRVP). Parmi elles, la petite Marion Wagon, enlevée à Agen le 14 novembre 1996, à l’âge de 10 ans. Mais selon le quotidien, les policiers de l’OCRVP n’ont pas eu l’idée de rapprocher les empreintes génétiques de ces affaires non-élucidées de celles, inconnues, contenues dans les scellés du dossier Fourniret. “Ça montre bien qu’on ne sait pas enquêter sur les ‘cold cases’ et les tueurs en série en France”, relève Didier Seban. C’est pourquoi le pénaliste et sa consœur Corinne Herrmann demandent la création d’un pôle consacré aux cold cases à Paris, avec des juges spécialisés, et d’un fichier ADN des personnes disparues. Ils ont également sollicité des vérifications vis-à-vis de Michel Fourniret dans neuf dossiers irrésolus.

Les deux avocats ont notamment eu gain de cause dans l’affaire Virginie Bluzet, retrouvée morte ligotée en 1997 dans la Saône. Fin 2020, la Cour d’appel de Dijon a demandé de “nouvelles investigations” dans cette affaire, qui fait partie des dossiers dits des “disparues de l’A6”. De son côté, la gendarmerie nationale a lancé un vaste appel à témoins dans l’espoir d’obtenir de nouvelles informations sur des “enquêtes judiciaires en cours” pouvant impliquer Michel Fourniret et Monique Olivier. Selon Le Parisien, une trentaine d’ADN inconnus prélevés sur des effets de Michel Fourniret sont en cours d’analyse et font l’objet de rapprochements avec au moins 21 affaires non-élucidées de meurtres ou disparitions.

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