Ministres candidats aux législatives : pour qui c’est (presque) gagné, pour qui ce sera plus dur ? – France Inter

L’Élysée indique que les ministres qui ne seront pas élus députés dans leurs circonscriptions devront quitter le gouvernement. Pour certains, la partie semble déjà gagnée, mais pour d’autres, ça s’annonce plus compliqué.

Elisabeth Borne, Gérald Darmanin, Stanislas Guerini, Amélie de Montchalin et Clément Beaune sont candidats aux élections législatives.
Elisabeth Borne, Gérald Darmanin, Stanislas Guerini, Amélie de Montchalin et Clément Beaune sont candidats aux élections législatives. © AFP / Ludovic Marin / Bertrand Guay / Dursun Aydemir / Julien de Rosa

Bien que non écrite, c’est une règle appliquée depuis 2007 et qu’Emmanuel Macron avait déjà réaffirmée en 2017. Les ministres candidats aux élections législatives des 12 et 19 juin devront démissionner s’ils ne sont pas élus dans leur circonscription. La porte-parole du gouvernement, Olivia Grégoire, l’a d’ailleurs rappelé lundi : “Si jamais certains d’entre nous ne reçoivent pas la confiance du peuple, ils devront en tirer les leçons et se retirer du gouvernement”. La règle s’applique aussi à Élisabeth Borne.

En 2017, seuls 6 ministres du premier gouvernement d’Édouard Philippe s’étaient frottés aux urnes. Cette année, ils sont 15, y compris la cheffe du gouvernement. Quelles sont leurs chances de l’emporter ? Qui pourrait rendre son portefeuille ? Nous faisons le point, à la lumière des résultats aux dernières élections législatives et présidentielle.

Ils devraient être (ré)élus facilement

Élisabeth Borne, Première ministre, candidate dans la 6e circonscription du Calvados. Pour la nouvelle cheffe du gouvernement, cette première élection devrait bien se passer, si l’on en croit les chiffres des précédents scrutins. Au premier tour de l’élection présidentielle, sa circonscription a voté à 30,8% pour Emmanuel Macron, contre 26,8% pour la seconde, Marine Le Pen. Aux dernières élections législatives, son prédécesseur Alain Tourret, candidat LREM, avait largement battu le candidat RN Jean-Philippe Roy (69 % des suffrages).

Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur, candidat dans la 10e circonscription du Nord. Pour le ministre reconduit Place Beauvau, ce scrutin législatif ne devrait pas poser de difficultés non plus. Déjà élu en 2012 dans cette circonscription sous bannière UMP, les Républicains ne présenteront pas de candidat contre lui. Son suppléant, Vincent Ledoux est l’actuel député. Il a été élu en 2017 sous l’étiquette du parti de droit pro-Macron “Agir”, avec 55 % des suffrages, face à la République en Marche. Lors de la dernière élection présidentielle, la 10e circonscription du Nord a voté Macron au premier tour à 28,9 %, contre 26,2 % pour Marine Le Pen. Le Nord est le seul département des Hauts-de-France qui n’a pas placé Marine Le Pen en tête.

Olivier Véran, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement, candidat dans la 1re circonscription de l’Isère. Déjà élu député en 2012 et 2017 dans cette circonscription, d’abord sous les couleurs socialistes puis LREM, Olivier Véran est en bonne posture pour l’emporter. En 2017, il avait obtenu 47 % des suffrages exprimés, soit près de la moitié, dès le premier tour. Lors de la présidentielle, sa circonscription a voté Emmanuel Macron au premier tour, talonné tout de même par Jean-Luc Mélenchon, qui a fait 27,3 %, plus de 7 points au-dessus de la moyenne nationale.

Gabriel Attal, ministre délégué chargé des comptes publics, candidat dans la 10e circonscription des Hauts-de-Seine. L’ancien porte-parole du gouvernement se présente dans une circonscription acquise aux Macronistes. Lors de sa première élection en 2017, il avait remporté 60 % des suffrages contre le candidat UDI. Lors de la dernière élection présidentielle, Emmanuel Macron a fait 37 % dès le premier tour dans les Hauts-de-Seine, 12 points devant le second, Jean-Luc Mélenchon.

Olivia Grégoire, Porte-parole du gouvernement, candidate dans la 12e circonscription de Paris. La nouvelle porte-parole du gouvernement est aussi en bonne voie pour une réélection, après sa victoire surprise en 2017, face au député sortant Philippe Goujon, figure de la droite et maire du 15e arrondissement (56 % des voix pour elle au second tour). À la dernière élection présidentielle, Emmanuel Macron a largement dominé dans cette circonscription (42 % des voix au premier tour contre 17 % pour Jean-Luc Mélenchon, arrivé 2e).

Marc Fesneau, ministre de l’Agriculture, candidat dans la 1re circonscription du Loir-et-Cher. Pas de difficulté particulière pour Marc Fesneau, nouveau ministre de l’Agriculture. C’est un élu local implanté en région Centre. Il avait remporté les élections législatives de 2017 avec près de 70 % des suffrages contre le candidat Rassemblement National. Au premier tour de l’élection présidentielle, Emmanuel Macron est arrivé en tête avec 29 % des voix dans sa circonscription, contre 23 % pour la seconde Marine Le Pen.

Yaël Braun-Pivet, ministre des Outre-mer, candidate dans la 5e circonscription des Yvelines. La nouvelle ministre des Outre-mer, issue de la société civile, brigue un second mandat dans les Yvelines. Il y a cinq ans, elle l’avait emporté face au candidat sortant des Républicains, avec 59 % des suffrages. Lors du premier tour de la présidentielle, Emmanuel Macron est arrivé largement en tête avec 36,8 % des voix, contre 21,5 % pour le second Jean-Luc Mélenchon. Sauf surprise, elle devrait donc rester ministre des Outre-mer.

Ça ne sera pas si simple

Stanislas Guerini, ministre de la Transformation et de la Fonction publiques, candidat dans la 3e circonscription de Paris. Au vu des précédentes élections, Stanislas Guerini est en bonne position pour être réélu au Parlement. En 2017, il avait remporté haut la main la 3e circonscription face à la candidate UDI (45 % des voix dès le premier tour). Cinq ans après, le territoire est toujours acquis aux macronistes : Emmanuel Macron est arrivé en tête au premier tour de la présidentielle avec 37 % des suffrages, soit dix points de plus qu’au niveau national et 7 points devant Jean-Luc Mélenchon (30 %). Le fidèle du président réélu pourrait tout de même pâtir de son soutien à Jérôme Peyrat il y a quelques jours, candidat aux législatives en Dordogne condamné pour violences conjugales, et qui s’est finalement retiré.

Clément Beaune, ministre délégué chargé de l’Europe, et candidat dans la 7e circonscription de Paris . Selon les derniers scrutins, Clément Beaune est donné favori, pour sa première candidature aux élections législatives. Il y a cinq ans, son prédécesseur chez LREM s’était imposé contre le candidat PS avec 55% des suffrages. Lors de la dernière élection présidentielle, sa circonscription, qui s’étale sur les 4e, 11e et 12e arrondissements, a voté en majorité pour Emmanuel Macron au premier tour (36,4%), devant Jean-Luc Mélenchon (31,3%), qui réalise tout de même un gros score.

Oliver Dussopt, ministre du Travail, candidat dans la 2e circonscription de l’Ardèche. Qu’en sera-t-il pour Olivier Dussopt ? Difficile à dire, puisqu’il a récemment rejoint le parti LREM, après une carrière de député PS. Il a été élu sous la bannière rose par deux fois dans sa circonscription, en 2012 et 2017. Il y a cinq ans, il l’avait emporté de justesse contre la candidate LREM. À la dernière élection présidentielle, Emmanuel Macron était légèrement en tête avec 25 % des suffrages dans sa circonscription au premier tour, devant Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon.

Ils vont devoir se battre

Brigitte Bourguignon, ministre de la Santé, candidate dans la 6e circonscription du Pas-de-Calais. Vent plutôt favorable pour la nouvelle ministre de la Santé, issue du PS. Elle a été réélue députée dans cette circonscription lors d’élections législatives partielles en 2021 (première victoire pour LREM lors d’une élection partielle) et 10 points devant la candidate du Rassemblement national, Marie-Christine Bourgeois. Elle l’avait déjà largement devancée en 2017 (60,84 %), dans un contexte de forte abstention. Mais rien n’est gagné, car l’orientation des voix a changé au premier tour de la présidentielle : sa circonscription a voté en majorité pour Marine Le Pen, à 37 %, 7 points devant Emmanuel Macron (25 %).

Franck Riester, ministre délégué chargé du Commerce extérieur, candidat dans la 5e circonscription de Seine-et-Marne. Même configuration pour Franck Riester, pour qui l’élection législative s’annonce serrée. Déjà élu en 2012 contre le PS dans cette circonscription, il avait remporté la mise facilement face au candidat du Rassemblement national en 2017. En tant qu’ancien maire de Coulommiers, c’est un élu local ancré. Mais à la présidentielle, c’est Marine Le Pen qui est arrivée en tête au premier tour dans sa circonscription, avec 27,4 % des suffrages contre 25,8 % pour Macron.

Amélie de Montchalin, ministre de la Transition écologique, candidate dans la 6e circonscription de l’Essonne. Pour la nouvelle figure de l’écologie au gouvernement, la bataille s’annonce plus serrée avec la Nupes. En 2017, elle avait été largement élue contre sa concurrente UDI, remportant 61% des voix aux élections législatives. Son adversaire socialiste, Jerôme Guedj, n’avait fait que 13% au premier tour. Mais cette fois, celui-ci se présente avec l’étiquette Nupes. Et lors du premier tour de l’élection présidentielle, c’est Jean-Luc Mélenchon qui est arrivé en tête dans la circonscription avec 30,7% des suffrages, légèrement devant Emmanuel Macron (29,9%).

Justine Benin, Secrétaire d’Etat chargée de la Mer, candidate dans la 2e circonscription de la Guadeloupe. La nouvelle secrétaire d’Etat, apparentée Modem, est fortement ancrée localement, ce qui devrait l’aider à être réélue. En 2017, elle avait remporté les élections législatives dans sa circonscription, avec 64 % des suffrages, contre la candidate LREM. Mais maintenant qu’elle a rejoint le gouvernement de la majorité, la tâche peut s’avérer plus complexe. D’autant qu’à la dernière élection présidentielle, il y a eu en Guadeloupe un très fort vote anti-Macron. Au premier tour, Jean-Luc Mélenchon est arrivé en tête (56 %), suivi de Marine le Pen (17 %). Emmanuel Macron n’a fait que 13%. Ce qui pourrait tout de même l’aider : pas de candidat Nupes en Guadeloupe, mais deux noms à gauche : Christian Baptiste, divers gauche, et Michel Tolla, LFI.

Damien Abad, ministre de l’autonomie, candidat dans la 5e circonscription de l’Ain. Avant même les élections législatives, le nouveau ministre de l’Autonomie voit son poste remis en question, après les révélations de Mediapart concernant deux accusations de viol à son encontre. Tous juste arrivé dans la famille LREM, l’ancien président des députés LR à l’Assemblée devra se battre dans l’Ain, s’il maintient sa candidature aux législatives. En 2017, il avait largement remporté la mise (67% des voix), mais sous mandat LR, et contre LREM (32%). Cette fois, il devra affronter Julien Martinez, le nouvel investi LR, depuis son départ du parti. Autre obstacle : au premier tour de la la présidentielle, c’est Marine Le Pen qui est arrivé en tête avec 27,4% des voix, près de 5 points devant Emmanuel Macron (22,7%).

Plusieurs ministres ne se présentent pas aux élections législatives, dont Catherine Colonna, ministre des Affaires étrangères, Bruno le Maire, ministre de l’Economie, Pap Ndiaye à l’Éducation ou encore Agnès Pannier-Runachet, à la Transition énergétique. Celle-ci avait longuement hésité à se présenter dans le Pas-de-Calais en 2017, avant de renoncer, face au très haut score du RN dans ce département.

[[Mise à jour avec l’ajout de résultats des élections passées dans certaines circonscriptions, dont la 6ème circonscription de l’Essonne. Ces chiffres, en concordance avec le reste de l’article, ont mené au passage d’Elisabeth Borne de la catégorie “Ils devraient être (ré)élus facilement” a “Ce ne sera pas si simple”. Modifié le 23/05/2022.]]

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