Millenium 3 : celle qui a pu relever la tête

Millenium 3 : celle qui a pu relever la tête

Revenue de son tour du monde, Lisbeth est obligée d’affronter son père et ses protecteurs, non seulement pour ne pas mourir, mais également pour ne pas finir en prison le reste de ses jours. Pour prouver son innocence, tous les moyens sont bons.

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Smartphone et infiltration

Après tant d’années à ne pas être crue, Lisbeth a enfin trouvé quelqu’un prêt à croire son histoire, mais comment la raconter quand on est enfermé dans une chambre d’hôpital ? Avec un peu d’ingéniosité — ce qui tend à prouver que faire équipe avec un journaliste est une bonne chose — Blomkvist arrive à faire entrer en douce le smartphone de Lisbeth. Grâce à cela, elle peut écrire son histoire, avec ses mots à elle, de manière froide, rationnelle, presque mathématique, mais également reprendre le contact avec La Hacker Republic.

La description de l’accès à cet espace de discussion, dont on devine qu’il s’agit d’un canal IRC même si ce n’est pas dit ainsi, est assez intéressante et fait référence à une technique très élégante : la stéganographie. Utilisée pendant la Seconde Guerre mondiale, il s’agit d’un procédé de dissimulation d’un message dans une image. Dans Millenium, le lien pour accéder à l’espace d’authentification est caché dans une image banale, elle-même hébergée sur un site Web totalement anodin et sans intérêt pour le commun des mortels. Une fois arrivée dans Hacker Republic, elle peut demander de l’aide ou plutôt donner ses instructions : déployer Asphyxia.

Mal en a pris au docteur Teleborian : il tombera dans le panneau de ce RAT comme Obélix dans la marmite de potion magique, permettant ainsi à Plague — un des acolytes de Lisbeth — de fournir des informations à Blomkvist, qui les fournira à sa sœur et avocate de Lisbeth. Teleborian entraînera avec lui dans sa chute l’ensemble de la Section, ce groupe secret de la SÄPO.

L’ombre de la guerre froide

Zalachenko, le père de Lisbeth, n’aurait pas pu œuvrer aussi longtemps sans être protégé et le génie de Larsson tient au fait qu’il arrive à rendre crédible et même intéressant, une histoire de conspiration. Larsson s’est inspiré de plusieurs faits réels, notamment l’affaire Bergling. Ce policier et officier de réserve de la police suédoise travaillait comme agent de liaison pour les services secrets suédois, mais il s’est découvert des affinités avec l’URSS. Il a donc joué les agents doubles pour le compte du GRU. Le cas s’était déjà présenté en 1951 avec Ernst Hilding Andersson, en 1964 avec Stig Wennerström et dans une moindre mesure, avec Fritiof Enbom, en 1951.

La chute de l’URSS ne paraît pas avoir adouci les relations entre la SÄPO et le GRU puisqu’en 2015, l’agence des services secrets suédois a accusé la Russie de s’être livrée à des opérations d’espionnage. Il y a un terreau historique qui permet à cette histoire de conspiration de prendre corps, mais également le fait que la Suède connaît malheureusement un gros problème de trafic sexuel.

En effet, comme décrit dans le roman, des trafiquants se livrent à la prostitution de jeunes femmes et d’enfants en Suède, en les faisant venir des pays baltes, avec un cas particulier concernant la Lituanie, qui est une plaque tournante : elle est une source, un état de transit pour les victimes en provenance de Biélorussie, mais aussi une destination. Avec la pénalisation du recours à la prostitution en Suède, les hommes ayant certaines ressources se contentent de prendre un bateau pour se rendre directement à Tallin, Riga ou une ville côtière de Lituanie. En mariant avec brio plusieurs faits réels, Larsson a donné vie à Millenium.

La fin d’un cycle

Larsson est décédé quelque temps après la remise du dernier manuscrit, laissant ses fans orphelins. Tout n’était pas dit, il restait quelques zones d’ombres, des pistes à explorer. Devant le succès de la trilogie, la maison d’édition suédoise a fait le pari de continuer la saga, sous la plume de David Lagercrantz.

C’était un pari audacieux, d’autant que certains esprits chagrins ou snobs, ont pris de haut cet auteur, car son dernier ouvrage à l’époque, était la biographie d’un footballeur. Pourtant, il n’a pas dénaturé l’œuvre originale, bien au contraire. Il s’est inspiré du matériel existant, mais a fait évoluer Lisbeth, vers une forme intéressante. Cette progression est le plus bel hommage qu’on pouvait rendre à Larsson.

C’est un autre décès qui a amorcé la fin d’un cycle : celui des adaptations cinéma de qualité. Noomi Rapace avait dit qu’elle ne souhaitait pas tourner le quatrième Millenium, mais même si elle l’avait voulu, il y aura eu un grand vide : Michael Nyqvist. celui qui interprétait Mikael Blomkvist est décédé en 2017. Il était écrit que nous n’aurions pas de suite au cinéma de qualité.

Dites au revoir à l’ancienne Lisbeth, la nouvelle arrive et elle est plus puissante que jamais.

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