Météo : “La plume de chaleur est une langue d’air chaud qui se détache du Sahara”, explique le climatologue Ch – franceinfo

Le climat change, les mots aussi. Alors que l’ensemble de l’Hexagone sera confronté à des températures extrêmes, comprises entre 35 et 40 °C, à partir de mercredi 15 juin, le climatologue Christophe Cassou a évoqué le terme de “plume” pour qualifier cette vague de chaleur exceptionnellement précoce.

Cette image, utilisée par l’un des auteurs principaux du sixième rapport du Giec, vient en fait de l’expression anglaise “heat plume”, que l’on peut traduire en français par “panache” ou “plume de chaleur”. Loin d’être anodine, cette nouvelle dénomination permet de qualifier un phénomène directement lié à l’activité humaine et au dérèglement climatique, comme l’explique Christophe Cassou à franceinfo.

Franceinfo : Qu’est-ce qu’une “plume” de chaleur ?

Christophe Cassou : Il existe plusieurs dynamiques atmosphériques pour générer des vagues de chaleur sur une région et en particulier sur l’Europe. Par exemple, il y a le dôme de chaleur, qui a été rendu populaire l’année dernière au moment de la canicule au Canada, et la plume de chaleur – ou le panache de chaleur. Ces termes permettent d’aborder de manière plus précise les processus physiques qui sont à l’origine de ces phénomènes, même si on ne les utilise pas au sein de la communauté scientifique.

Le panache de chaleur est une langue de chaleur qui se détache du Sahara, du Maghreb ou de la Méditerranée, qui remonte vers le Nord, aspiré par une petite “goutte froide” [une masse d’air froid qui se déplace à plus de 5 000 m d’altitude, avec des températures allant de -20 à -10 °C] qui se place au large de la France (sur la côte Atlantique) ou de l’Espagne, qui joue le rôle d’un engrenage qui va transporter l’air chaud et sec qui vient du sud vers le nord. Cet air chaud génère une vague de chaleur (ou un épisode de chaleur) là où elle se développe. 

Mais d’où vient ce terme ?

L’expression “plume de chaleur” est une traduction de l’expression anglaise “heat plume”, qui peut également se traduire par “panache de chaleur”.

“J’ai gardé le mot ‘plume’ car je le trouve plus poétique et qu’il est important d’utiliser des images pour communiquer des processus physiques au grand public.”

Christophe Cassou, climatologue

à franceinfo

En quoi est-ce différent d’un dôme de chaleur ?

A la différence d’un dôme de chaleur, la plume est une dynamique atmosphérique qu’on dit advective. C’est-à-dire qu’il s’agit d’une dynamique de transport, qui prend de l’air du sud qui l’amène vers le nord, alors que le dôme de chaleur est une dynamique de blocage. Dans ce cas, une masse d’air se bloque dans une région. En été, elle devient de plus en plus chaude, elle s’auto-alimente, les vents circulent autour de ce dôme sans pénétrer à l’intérieur. 

“Avec un dôme de chaleur, une vague de chaleur se met en place de manière locale et statique, à l’opposé de la plume, qui est une dynamique de transport.”

Christophe Cassou, climatologue

à franceinfo

Est-ce que cela veut dire qu’une plume de chaleur n’a pas vocation à durer ?

Généralement, les plumes de chaleur sont plus courtes, dans la mesure où elles correspondent à des dynamiques atmosphériques très marquées et très actives. Le challenge est de comprendre comment la petite goutte froide, qui joue le rôle d’engrenage va évoluer puis balayer cette plume de chaleur qui s’est mise en place.

Comme il est plus statique, le dôme de chaleur est généralement plus long, c’est pour ça qu’on appelle cette situation atmosphérique “une situation de blocage”, parce que ce dôme se crée jour après jour (il peut durer une, voire deux semaines durant les événements extrêmes).

Tout le challenge est de savoir comment cette plume de chaleur va évoluer et conditionner la fin d’un épisode de canicule.

“Aujourd’hui, l’incertitude est profonde sur la façon dont cette vague de chaleur va se terminer ou durer. Est-ce qu’elle va déborder sur le week-end ou s’arrêter samedi ou dimanche ?”

Christophe Cassou, climatologue

à franceinfo

En quoi ces plumes de chaleur ont-elles un lien avec le dérèglement climatique ?

Nos études montrent qu’il est incontestable que les activités humaines sont à l’origine du changement climatique et qu’elles rendent les phénomènes climatiques extrêmes (on parle de canicule, de pluies diluviennes, de sécheresse) plus courants. Aujourd’hui, ils sont plus fréquents et plus graves, dans le sens où ils durent plus longtemps, sont plus intenses, et où leur saisonnalité est modifiée : les canicules apparaissent plus tôt et plus tard [dans l’année].

“La saison estivale s’est étalée dans la durée. C’est une signature du changement climatique.”

Christophe Cassou, climatologue

à franceinfo

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