Manifestation contre la loi Sécurité globale : toujours des casseurs… – Le Parisien

Un cortège disloqué au bout d’une centaine de mètres seulement de parcours, des barricades dressées, des véhicules brûlés, des poubelles incendiées, des devantures de banques et d’agences immobilières saccagées… Comme samedi 28 novembre, la marche organisée à Paris par les opposants au projet de loi sur la sécurité globale a été émaillée de scènes de vandalisme et de violence, ponctuée par 42 interpellations dont 21 gardes à vue. Avec cette fois, l’impossibilité pour une grande partie des manifestants de parvenir au bout du parcours, place de la République.

Les manifestations, organisées en France pour protester notamment contre cette proposition de loi, accusée par ses détracteurs de porter « atteinte à la liberté de la presse, à la liberté d’expression et à la liberté de manifester », ont rassemblé 52350 personnes en France, dont 5000 dans la capitale, selon le ministère de l’Intérieur. Une mobilisation en recul par rapport à celle de la semaine dernière qui avait vu 133000 personnes défiler en France, dont 46000 à Paris, selon l’Intérieur.

VIDÉO. Manifestation contre la Loi sécurité globale : plusieurs incidents à Paris

Mais dans la capitale notamment, policiers et gendarmes ne sont pas parvenus, une fois encore, à contenir les black blocs, ces individus vêtus de noir et très mobiles qui s’attaquent en bloc aux forces de l’ordre. Une équation devenue insoluble pour les autorités. « Pendant combien de semaines encore Emmanuel Macron et son ministre de l’Intérieur vont-ils regarder impuissants 400 casseurs mettre le feu dans les rues de Paris? […] » a lancé Bruno Retailleau, le patron des sénateurs LR, reprochant au pouvoir « son incapacité à assurer l’ordre dans notre pays » et « les discours contradictoires de l’exécutif ».

Des véhicules incendiés, des agences bancaires visées

Ce samedi, un peu plus d’un demi-millier de casseurs a semé la panique dans le vingtième arrondissement de Paris, notamment avenue Gambetta où un camion, et au moins six voitures ont été incendiés et plusieurs exactions ont été commises contre des cibles « capitalistes » : agences bancaires et immobilières. Installés cette fois en tête de cortège, les émeutiers sont passés à l’action, environ une heure trente après le départ du cortège. Une tactique visant à contourner la stratégie des forces de l’ordre qui consistait à encadrer la manifestation tout au long du parcours pour intervenir dès les premiers incidents et effectuer ainsi des interpellations.

« Ils sont entraînés et très bien organisés, à chaque fois, ils savent s’adapter aux stratégies de maintien de l’ordre mis en place, et ils nous font déjouer, relève un haut gradé de la préfecture de police de Paris. Ils observent le parcours, et élaborent très vite sur place leur stratégie. Ce qui rend les imprévisibles. » La semaine dernière, les forces de l’ordre étaient restées en attente, et les débordements avaient eu lieu essentiellement en fin de manifestation, place de la Bastille. Une fois encore, les casseurs ont trouvé leurs armes en piochant dans les chantiers — en l’occurrence ceux de la porte des Lilas et du début de l’avenue Gambetta.

« Ils n’ont même plus besoin de venir cacher des outils en amont sur le parcours. Ils trouvent tout sur place », déplore un policier en civil. « Un marteau suffit pour casser des vitrines de magasin, un tournevis pour dépaver la rue. Il suffit de sortir un ou deux pavés du sol, et tout vient ensuite. Tout peut faire arme pour eux. »

Paris, ce samedi. Des véhicules ont été incendiés./LP/Philippe de Poulpiquet
Paris, ce samedi. Des véhicules ont été incendiés./LP/Philippe de Poulpiquet  

Les forces de l’ordre remarquent des changements de rythme dans les chants des casseurs qui donnent à chaque fois un signal pour passer à l’action ou se replier. Ils utilisent des parapluies noirs pour se protéger des bombes lacrymogènes, des canons à eau mais aussi des vidéos de surveillance. « Ils changent de vêtement pour ne pas être identifié en fin de manif. Ils sont gantés pour éviter de laisser ADN et traces papillaires », relève le policier en civil.

Ce samedi, les forces de l’ordre sont parvenues néanmoins à limiter la dispersion des casseurs en petits groupes. Une technique de guérilla qui consiste à saturer les forces de l’ordre adversaires, avant de se rassembler à nouveau au sein du bloc pour se défendre.

Des militants antifa avaient annoncé leur venue

La semaine dernière les casseurs interpellés étaient âgés de 16 à 27 ans, dixit une source à la préfecture de police de Paris. Des militants plutôt issus de la mouvance « ultra-jaune », selon l’expression policière pour désigner les Gilets jaunes radicalisés. Mais, cette fois, des militants du collectif antifa avaient annoncé sur les réseaux sociaux leur venue à la marche.

Ainsi l’acronyme de l’anglais Acab « All cops are bastards » (« Tous les flics sont des salauds »), symbole du mouvement anarcho-autonome bien connu des policiers, a été tagué à plusieurs reprises sur des arrêts de bus, murs ou façades de bâtiments au cours du parcours de la manifestation.

Selon le ministère de l’Intérieur, le samedi 28 novembre, 98 policiers avaient été blessés, dont plusieurs grièvement. Ce samedi, deux CRS ont été blessés à Nantes (Loire-Atlantique), dont l’un a été touché par un cocktail molotov. « Aujourd’hui, lorsque l’on part pour une manifestation, on ne sait pas si on va revenir », nous a confié un gardien de la paix de 25 ans, lynché au sol voilà une semaine.

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