Mal-logement : les femmes sont plus vulnérables que les hommes – Le Monde

Des enseignants et des bénévoles de l’organisation Droit au logement près de l’école élémentaire Sylvain-Dauriac, à Toulouse, le 8 décembre 2021.

« Je ne pensais pas qu’on pouvait être à la rue en étant Française, lâche, sans colère, Dominique (il s’agit d’un prénom d’emprunt). Et je pensais qu’avoir des enfants faciliterait la tâche pour avoir un hébergement d’urgence… » La jeune femme s’est séparée de son mari quelques années après qu’ils ont quitté la France, et y est revenue seule, avec deux de leurs enfants. Un temps hébergée par une connaissance à Paris, elle a ensuite connu les galères du 115, le numéro d’appel pour l’hébergement d’urgence.

Elle bénéficiait, parfois, de trois nuits d’hôtel. Le plus souvent, elle passait la nuit dans des campements de tentes, « sans vraiment dormir ». La jeune femme a obtenu une chambre en centre d’hébergement, partagée avec une autre mère et son enfant. Mais quand elle est partie chercher son troisième enfant, qui était « en danger », le centre a refusé d’héberger la famille agrandie. Elle a connu la rue, encore, avant d’être accueillie dans un T3 par le centre d’hébergement Rosalie Rendu de la Fondation Apprentis d’Auteuil, près de Melun. « C’est un nouveau départ », sourit-elle. Elle prépare le bac et souhaite ensuite se former « dans l’agroalimentaire, les cosmétiques ou peut-être la décoration d’intérieur ».

Dans son rapport annuel, publié mercredi 1er février, la Fondation Abbé Pierre s’est, pour la première fois, attachée à décrire en détail « le genre du mal-logement ». Les femmes y apparaissent un peu plus touchées que les hommes par la crise du logement, « parce qu’elles ont moins de ressources, et qu’elles vivent plus souvent seules, notamment quand elles sont âgées, ou seules avec des enfants », explique le directeur des études de la Fondation, Manuel Domergue.

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Alors que 20 % de la population subit de mauvaises conditions de logement, le taux atteint 40 % pour une femme célibataire avec un enfant, et 59 % si, comme Dominique, elle a trois enfants ou plus. La jeune femme n’est pas seule à avoir connu des difficultés d’hébergement d’urgence. « Il y a dix ou vingt ans, les mères à la rue avec des enfants étaient rapidement prises en charge. C’est beaucoup plus compliqué aujourd’hui, faute de places », constate Manuel Domergue.

Un écart de patrimoine qui se creuse

Qu’en est-il de l’accès à un logement durable ? S’appuyant sur les rares études disponibles, le rapport conclut que les mères seules semblent discriminées pour accéder à la location dans le parc privé. Dans le parc social, les familles monoparentales, constituées à 83 % de femmes seules avec enfant(s), « sont légèrement surreprésentées dans les attributions (29 %) par rapport à leur part dans la demande (25 %) », indique le rapport, mais c’est moins le cas dans les zones tendues, où ces familles ont pourtant moins les moyens de se loger dans le privé.

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