Lucette Michaux-Chevry, ancienne ministre de Jacques Chirac, est morte – Le Monde

Lucette Michaux-Chevry lors d'une interview dans son bureau, à Basse-Terre, en Guadeloupe, en 2003.

Lucette Michaux-Chevry, femme politique guadeloupéenne et ancienne ministre de Jacques Chirac, est décédée des suites d’une longue maladie, a annoncé, jeudi 9 septembre, sa fille Marie-Luce Penchard sur les réseaux sociaux. Elle avait 92 ans.

« Ce soir (jeudi), à 19 h 48, entourée de ses proches, maman nous a quittés… j’ai mal… et notre chagrin est immense… », a-t-elle écrit sur sa page Facebook.

Née le 5 mars 1929 à Saint-Claude (Basse-Terre), Lucette Michaux-Chevry a marqué l’histoire politique de la Guadeloupe, où elle a occupé tous les mandats locaux et nationaux, parfois en même temps. Cette avocate de formation a connu sa première élection en 1959 en devenant conseillère municipale de sa ville, Saint-Claude, alors que son fils a à peine quelques jours. « Rien n’est fait aujourd’hui pour qu’une femme puisse à la fois prendre des responsabilités et offrir à ses enfants l’affection nécessaire », indiquait-elle à La Croix, en décembre 1999. Mariée très jeune et mère de deux enfants, elle mène néanmoins une carrière politique rare pour une femme de cette époque.

D’abord engagée au parti socialiste, elle soutient en 1981 le candidat à la présidentielle Valéry Giscard d’Estaing, marquant ainsi le début d’un engagement à droite qui ne la lâchera plus. Conseillère générale dès 1976, elle est élue maire de Gourbeyre en 1987, après avoir fondé son propre parti, Le Parti de la Guadeloupe (LPG). En 1982, elle devient la première femme à diriger un département et bientôt la première venue de l’outre-mer à entrer au gouvernement. Jacques Chirac, dont elle restera proche, la nomme secrétaire d’Etat chargée de la francophonie, de 1986 à 1988. Sous la seconde cohabitation, elle est nommée par Edouard Balladur ministre déléguée auprès des affaires étrangères, chargée de l’action humanitaire et des Droits de l’homme, de 1993 à 1995.

Spécialiste du cumule des mandats

Elle n’en délaissera pas pour autant sa Guadeloupe natale, où elle multipliera les mandats quasiment jusqu’à la fin de sa vie : elle aura été au total trois fois maire (Gourbeyre puis Basse-terre), deux fois sénatrice (de 1995 à 2011), deux fois députée (de 1986 à 1993) et deux fois présidente de région (1992 à 2004). En janvier 2019, elle démissionne de la présidence de la communauté d’agglomération Grand Sud Caraïbe et annonce, à près de 90 ans, mettre un terme à sa carrière politique.

Fin janvier 2019, celle qu’on surnomme « la dame de fer » ou « l’impératrice » et qui est alors présidente de la communauté d’agglomération du Sud Basse-Terre annonce sa démission et son retrait de la vie politique, à près de 90 ans, occasionnant un séisme localement.

Elle reste toutefois adjointe à la maire de Basse-terre, qui n’est autre que sa fille Marie-Luce Penchard, à qui elle avait laissé son siège en 2014.

« J’ai consacré près de soixante ans de ma vie au service de la Guadeloupe mais surtout au service de chacune et chacun d’entre vous », écrit Lucette Michaux-Chevry dans sa lettre aux Guadeloupéens pour annoncer sa démission. « Je l’ai fait à ma manière, parfois à mes dépens », ajoute-t-elle.

Des démêlés avec la justice

Sur l’île, elle était à la fois crainte et admirée, et les personnalités se pressaient dans sa maison de Gourbeyre pour lui demander conseil ou se faire adouber. « Je suis redoutable, expliquait-elle en 2017 à outre-mer la 1re, réseau de l’audiovisuel public en outre-mer. La politique m’a transformée complètement. Elle a fait de moi quelqu’un de capable de recevoir tous les coups, et d’attendre, d’attendre pour gagner. »

Durant cette longue carrière, Lucette Michaux-Chevry avait eu plusieurs démêlés avec la justice. Cultivant un pouvoir insulaire ne souffrant pas la contestation, elle est, à partir des années 90, plusieurs fois mise en examen. Elle sera notamment condamnée en 2002 pour favoritisme dans l’attribution de marchés publics. Plus récemment, en 2020, elle a été condamnée en appel à deux ans de prison avec sursis pour le manque de contrôle exercé sur une station de pompage et de distribution d’eau potable, dans une zone polluée par le chlordécone. Apparue totalement détendue lors de son procès, la « Dame de Guadeloupe » avait défendu haut et fort ses responsabilités.

Article réservé à nos abonnés Lire aussi Jacques Chirac et les outre-mer, une relation chaleureuse et ambiguë

Le Monde avec AFP

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *