Lubrizol: à Rouen, Macron cherche à rassurer la population – Le Figaro

Envoyé spécial à Rouen

Il se savait très attendu. Plus d’un mois après l’incendie qui a ravagé l’usine Lubrizol – classée Seveso -, le 25 septembre dernier à Rouen, Emmanuel Macron s’est rendu sur place mercredi après-midi. Le chef de l’État, dont l’agenda public n’indiquait pourtant aucun rendez-vous en cette veille de week-end prolongé de la Toussaint, a décidé d’organiser cette visite au tout dernier moment. Avec un objectif clair: tenter de rassurer la population, très inquiète par les conséquences encore inconnues du sinistre.

Car plus d’un mois après l’événement, les enquêteurs ignorent toujours quelle en est la cause, et d’où les flammes sont parties. Tout juste sait-on que quelque 9 500 tonnes de produits chimiques seraient parties en fumée. Une situation extrêmement floue, donc, qui a poussé 545 personnes à déposer plainte, selon le recensement établi par le parquet.

Accompagné de son ministre chargé des Collectivités territoriales, Sébastien Lecornu, Emmanuel Macron est arrivé sur place en fin de journée, mercredi. Accueilli sur le parvis de l’Hôtel de Ville par le maire, Yvon Robert, il l’a suivi dans son bureau pour une petite heure d’entretien en tête-à-tête. «Le rôle symbolique du président est important. On ne va pas révolutionner la Terre en une heure… Mais il fallait qu’il vienne écouter ce que j’ai à lui dire, prévenait l’édile socialiste, quelques minutes avant l’arrivée du chef de l’État. Il a pleine conscience du fait que ce qu’il s’est passé ici n’est ni banal ni anodin.»

Macron promet les premières indemnisations

À l’issue de son entrevue avec le maire, Emmanuel Macron s’est exprimé lors d’un point de presse. Balayant les critiques sur sa venue supposément trop tardive, il a félicité à plusieurs reprises «les services de l’État (qui) ont agi avec compétence, avec beaucoup de sang-froid, (et) beaucoup de professionnalisme». «De là où je suis, je n’ai pas vu de défaillance, au contraire», a-t-il ajouté, alors que la gestion de la situation par l’exécutif a été vivement critiquée par l’opposition.

«Je comprends une chose, c’est l’émotion de la population. Quand on vit ce qui a été vécu à Rouen, quand on respire pendant des jours des odeurs désagréables dont on ne connaît pas la dangerosité, même si on vous dit le contraire, c’est très déstabilisant. Et donc ça nourrit de l’inquiétude, mais il ne faut pas que ça devienne de la défiance parce que de fausses informations circulent et qu’on dit tout et son contraire», a lancé le chef de l’État. Il s’est aussi voulu rassurant en évoquant «les premières indemnisations qui seront versées» dans «les prochains jours» aux «agriculteurs et aux commerçants».

Et d’ajouter: «J’organiserai, en 2020, un événement international à Rouen… Un sommet, pour montrer combien la ville est belle et redonner leur fierté à tous les Rouennais». Selon l’entourage du président, il devrait a priori s’agir d’un événement diplomatique.

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Le président chahuté

S’il a délibérément choisi de ne pas se rendre sur le site du sinistre, à Lubrizol, Emmanuel Macron a préféré prendre le temps d’aller longuement à la rencontre des commerçants et des habitants, pour échanger avec eux. Il faut dire que ces derniers l’attendaient de pied ferme. À la sortie de l’hôtel de ville, il a d’ailleurs été accueilli par une grosse centaine de manifestants qui scandaient des «Macron, démission!». Il a toutefois décidé de les contourner, préférant aller dialoguer avec ceux qui sont ouverts à la discussion plutpôt que de se confronter à «ceux qui invectivent».

Résultat, il s’est lancé dans une très longue déambulation – exercice qu’il affectionne particulièrement – dans une rue piétonne. Aux terrasses de cafés, les jeunes Rouennais l’interpellent. Ils lui parlent de leurs études. Ou lui proposent de boire une bière. «Je vais en prendre une», répond le président à l’un d’entre eux. Il multiplie les selfies. Il est ravi de serrer des mains.

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«Mes enfants, je préfère les éloigner»

Même quand ses détracteurs parviennent à le rattraper, leurs propos ne sont pas cohérents. C’est le cas d’une jeune femme, qui lui reproche pêle-mêle de «voler» les plus démunis et de vouloir «faire une guerre civile» dans le pays. «Vous cherchez à faire quoi…?», souffle le président en retour.

S’attardant sur les lieux, il prend le temps de répondre aux interrogations des uns et des autres. À leurs paniques, aussi, ainsi que leurs peurs. Une femme lui avoue qu’elle est très inquiète. «Rester à Rouen, pour moi, aujourd’hui, n’est pas la solution. Et pour mes enfants, je préfère les éloigner.» Elle lui dit ensuite que, bien qu’elle ait voté pour lui en 2017, elle ne compte pas le refaire en 2022. Preuve que la politique nationale n’est jamais loin.

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Le préfet plaide pour un système d’information plus efficace

Le préfet de Normandie, Pierre-André Durand, a appelé de ses vœux, mercredi, la mise en place d’un système d’information des populations plus efficace, par message téléphonique plutôt que par sirène, comme c’est le cas actuellement en cas de crise.

Lors d’une audition devant la mission d’information de l’Assemblée nationale, il est revenu sur la communication aux populations lors de l’incendie de l’usine Lubrizol du 26 septembre, «éminemment perfectible», selon lui. «Nous ne pouvons pas gérer des crises du XXIe siècle avec un outil du XXe siècle», a-t-il déclaré. «Il y a eu des évolutions technologiques sur le sujet (…), il nous faudra passer à des systèmes de “cell broadcast”», de diffusion cellulaire, qui permettent «par le bornage des téléphones portables d’envoyer d’office des messages à tous les téléphones qui dépendent d’une zone (…) en étant certain que toutes les personnes seront touchées avec un message adapté», a-t-il affirmé devant les députés.

Revenant sur sa décision de ne pas sonner les 31 sirènes du plan particulier d’intervention (PPI) de Rouen le 26 septembre, Pierre-André Durand a jugé avoir pris la «moins mauvaise décision», expliquant avoir choisi d’attendre 7 h 51 pour sonner les deux sirènes les plus proches du site et de communiquer dans l’intervalle sur Twitter et les radios.

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