Loi « sécurité globale » : une photo d’un « policier en feu » à Paris trompeuse – Le Monde

Samedi 5 décembre, alors que la manifestation parisienne contre la loi « sécurité globale » a été une nouvelle fois émaillée de heurts, le cliché est devenu viral. Car, l’instantané pris par la photographe de l’Agence France-Presse (AFP), Anne-Christine Poujoulat, témoigne de l’extrême violence de certains protestataires à l’encontre des forces de l’ordre.

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Mais l’histoire n’est pas tout à fait celle qui saute immédiatement aux yeux des observateurs.

Des membres de la brigade française de répression des actions violentes (BRAV) sont encerclés par un feu, lors d’une manifestation pour les « droits sociaux » et contre le projet de loi « sécurité globale », dont l’article 24 criminaliserait la publication d’images de policiers en service, à Paris, le 5 décembre.

L’image, prise sur l’avenue Gambetta, dans le 20e arrondissement, montre des membres des brigades de répression de l’action violente (BRAV), repliés contre un mur et « encerclés par un feu ». L’un des policiers a la moitié de son corps caché par une boule de flammes et, à travers celle-ci, on distingue son bouclier…

« Il n’est pas en feu, il a reçu un projectile qui s’est enflammé, dont il s’est protégé », fait valoir la photographe Anne-Christine Poujoulat.

« Cela a été extrêmement furtif. J’ai eu l’impression qu’il y avait quelque chose qui arrivait des airs au niveau de leurs jambes [des policiers], c’est pour cela que j’ai pris la photo. J’ai vu des flammes très furtivement, je ne pensais même pas les avoir à l’image. »

Une vidéo publiée sur Twitter par le journaliste indépendant Clément Lanot illustre, par ailleurs, la même scène, mais sous un autre angle : on y voit un projectile exploser devant les forces de l’ordre, les flammes apparaissant brièvement à l’image.

« La contextualiser davantage »

Ce samedi, peu après 16 heures, l’AFP décide d’envoyer une alerte sur les « sérieux incidents » constatés par ses journalistes en marge du cortège parisien. Dans la foulée, la cellule réseaux sociaux de l’agence a tweeté cette alerte, l’illustrant de trois photos – non légendées –, dont le cliché controversé, donnant l’impression que le policier est en proie de flammes.

La machine virale se met alors en marche : des internautes accusant l’AFP de minimiser la portée des « incidents » ou, au contraire, de chercher à manipuler l’opinion.

Plusieurs, comme le Syndicat des cadres de la sécurité intérieure (SCSI), s’indignent de voir un « policier en feu ». Une expression largement reprise. Les élus Les Républicains, Eric Ciotti et Bruno Retailleau, ont, quant à eux, fait part de la « honte » qu’ils avaient éprouvée à la vue de cette image.

« On n’aurait pas dû diffuser sur Twitter cette photo sans sa légende », sans « la contextualiser davantage », regrette le rédacteur en chef investigation numérique de l’agence, Grégoire Lemarchand. Récusant toute volonté de « manipulation », il fait ainsi valoir : « Quand on fait une erreur [factuelle], on fait une correction, mais là il n’y en avait pas » – l’AFP n’ayant jamais écrit que ce policier était la proie de flammes.

Ce qui ne retire rien, évidemment, à la violence des attaques subies par les forces de l’ordre, samedi, en marge de certains cortèges et que le geste immortalisé sur ce cliché n’en est pas moins criminel et possiblement traumatisant. 67 membres des forces de l’ordre ont été blessées, selon le bilan définitif du ministère de l’intérieur, dont 48 policiers et gendarmes à Paris.

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Le Monde avec AFP

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