« L’Etat nous jette des gens » : les habitants de Pantin et d’Aubervilliers ulcérés par la réponse des autorités au problème du crack – Le Monde

Rassemblement contre le mur érigé entre Paris et Pantin, à Pantin, le 29 septembre.

Est-ce le camp, est-ce le mur ? Difficile de dire ce qui a causé le plus de colère, mercredi 29 septembre, à Pantin. Le camp, c’est celui d’une cinquantaine de consommateurs de crack déplacés vendredi par la Préfecture de police depuis la rue Riquet, dans le nord-est de Paris, vers un square de la porte de la Villette collé au périphérique ; le mur, c’est un ensemble de parpaings érigé le même jour sur la rue Forceval, qui faisait jusqu’alors la jonction, sous le périphérique, entre la commune de Seine-Saint-Denis et le 19e arrondissement de la capitale. Par cet édifice, le préfet de police de Paris et le préfet de région ont dit vouloir assurer la « protection » des riverains contre les toxicomanes.

A en croire la manifestation d’élus et de plusieurs centaines d’habitants devant le mur en question, mercredi soir, beaucoup ne goûtent guère d’être « protégés » de la sorte.

« Mur de la honte », a tagué quelqu’un sur les blocs. « Coup de poing en plein visage », tonne au micro Dominique Gamard, membre des collectifs SOS-Quatre-Chemins et 93 Anti-Crack, qui fustige un « symbole de mépris » et appelle à « recoudre la banlieue avec Paris ». Elle s’offusque que la porte de la Villette ait été choisie pour recevoir les « crackeux » au motif que le secteur serait, selon les mots de la Préfecture de police, « sans riverain aux abords immédiats ».

« Il faut soigner ces gens »

Foin de « concertation » avec les élus locaux, le mur a été érigé « dans la précipitation », enchaîne Bertrand Kern, le maire (Parti socialiste) de Pantin, qui appelle à trouver une « solution pérenne » au problème de la consommation de crack « qui mine le nord et l’est parisiens depuis plus de dix ans ». Et de rappeler que l’hébergement d’urgence des majeurs est une responsabilité de l’Etat. « C’est l’Etat qui est compétent, mais c’est le ministère de l’intérieur qui s’en occupe, tance M. Kern. L’approche est seulement sécuritaire alors qu’il faut soigner ces gens qui sont en complète détresse. »

Devant l’Assemblée nationale, Gérald Darmanin, le ministre de l’intérieur, a annoncé pour jeudi une réunion de crise entre les autorités et les élus. Mais Bertrand Kern dit n’avoir reçu « aucune information », et ironise : « Si quelqu’un sait où c’est, qui y va, qu’il le dise ! »

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Karine Franclet, la maire (Union des démocrates et indépendants) d’Aubervilliers, fait état d’une « grande anxiété des habitants ». Dans le cortège qui se met en branle vers la porte de la Villette, Ali (il ne souhaite pas donner son nom de famille), 33 ans, donne sa vision des choses : depuis que les toxicomanes sont arrivés, « ça mendie, ça tape aux vitres des voitures », relate ce chauffeur de bus, qui arpente les rues de Pantin depuis onze ans. « Avec les migrants, c’est compliqué déjà », ajoute-t-il, appelant les politiques à « traiter le problème, pas à se renvoyer la balle. C’est un peu leur travail ! »

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