Les cryptomonnaies servent rarement à blanchir l’argent du piratage bancaire

Les cryptomonnaies servent rarement à blanchir l'argent du piratage bancaire

Bien qu’elles soient considérées comme un refuge sûr pour la cybercriminalité, les cryptomonnaies ne joueraient-elles finalement qu’un rôle très limité dans le blanchiment de fonds provenant de pirates bancaires ? Telle est la conclusion d’un rapport publié par l’organisation financière SWIFT, qui fédère les plus gros groupes bancaires mondiaux.

« Les cas identifiés de blanchiment par le biais de cryptomonnaies restent relativement peu importants par rapport aux volumes d’argent liquide blanchis par les méthodes traditionnelles », fait savoir l’organisation, basée en Belgique et chargée de gérer le système de messagerie interbancaire SWIFT, utilisé par presque toutes les banques du monde pour transférer des fonds par-delà les frontières.

Pour celle-ci, les méthodes finalement privilégiées par les pirates informatiques comprennent des techniques fiscales comprenant l’utilisation de sociétés écrans, d’entreprises de transfert de fonds et d’investissements dans d’autres formes de criminalité, telles que le trafic de drogue ou la traite d’êtres humains.

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Des cas très rares

Pour l’organisation SWIFT, les incidents au terme desquels des pirates informatiques ont blanchi de l’argent via des monnaies cryptographiques restent très limités en nombre. Un exemple cité dans le rapport de l’organisation est le cas d’un groupe de cybercriminels ayant effectué une attaque de retrait d’argent à un distributeur automatique. Selon SWIFT, le gang a converti les fonds en espèces volées en cryptomonnaie plutôt que d’utiliser des mules pour acheter et revendre des produits coûteux avec les espèces volées, comme le font presque tous les autres groupes dans ce genre de cas.

Un autre exemple est celui d’un gang d’Europe de l’Est qui a créé sa propre ferme de bitcoin en Asie de l’Est. Le gang a utilisé des fonds volés aux banques pour exploiter la ferme, générer du bitcoin, puis le dépenser en Europe occidentale. Lorsque le gang a été arrêté, SWIFT a déclaré que les autorités avaient trouvé 15 000 bitcoins d’une valeur de 109 millions de dollars, deux voitures de sport et des bijoux d’une valeur de 557 000 dollars au domicile du chef du groupe.

Un autre cas où la cryptomonnaie a été utilisée pour blanchir des fonds bancaires volés est celui du groupe Lazarus, un groupe de pirates informatiques opérant au profit du gouvernement nord-coréen. Selon SWIFT, le groupe a volé de l’argent aux banques, l’a converti en cryptomonnaie, a déplacé les actifs en cryptomonnaie sur différents marchés pour en dissimuler l’origine, puis a reconverti les cryptomonnaies en monnaie fiduciaire avant de l’envoyer en Corée du Nord.

Les cartes prépayées en cryptomonnaie suivies de près

Ce n’est pas tout. L’organisation SWIFT a également déclaré avoir observé « quelques cas » au terme desquels des pirates informatiques ont utilisé des fonds bancaires volés pour acheter et charger des cartes prépayées en cryptomonnaies.

Il s’agit de véritables cartes de débit qui peuvent stocker des cryptomonnaies en lieu et place d’argent “réel”. Selon SWIFT, plusieurs plateformes financières en Europe et au Royaume-Uni ont été utilisées pour charger des cartes prépayées avec des bitcoins, qui ont ensuite été utilisés pour acheter des bijoux, des voitures et des biens avec des fonds volés.

Selon l’organisation, il ne s’agit toutefois que de cas marginaux par rapport au nombre d’incidents et au volume de fonds volés qui sont blanchis par des méthodes traditionnelles. Celle-ci estime toutefois que le recours aux cryptomonnaies pour le blanchiment de fonds bancaires volés va augmenter à l’avenir. Parmi les facteurs favorisant cette tendance, l’organisation cite notamment le nombre croissant d’altcoins (monnaies cryptographiques alternatives), lancées récemment et qui visent à assurer l’anonymat total des transactions.

La cryptomonnaie a le vent en poupe

L’organisation SWIFT met également en garde contre l’émergence de marchés en ligne où les utilisateurs peuvent s’inscrire via une simple adresse électronique et ensuite acheter des produits haut de gamme, des terrains et des biens immobiliers dans le monde entier, mais également des montres de luxe, des bijoux, des lingots d’or, des œuvres d’art et même des îles tropicales.

Autant de pistes à creuser pour les cybercriminels qui profitent ainsi d’un anonymat accru que les méthodes traditionnelles ne peuvent pas leur garantir. Reste que ces méthodes traditionnelles sont actuellement les plus populaires auprès de ces groupes de pirates.

Dans son rapport “Follow The Money” publié la semaine dernière, l’organisation SWIFT souligne l’ingéniosité de certaines tactiques de blanchiment d’argent qui ont été récemment observées dans la nature. En voici quelques-unes :

  • L’utilisation à grande échelle de diverses catégories de “mules” financières. Il s’agit généralement de jeunes adultes qui cherchent à financer leurs études, ou d’adultes récemment au chômage, qui sont chargés de recevoir l’argent sur leurs comptes avant de le transmettre à un ou plusieurs cybercriminels. Ceux-ci sont de plus en plus souvent recrutés au moyen d’offres d’emploi légitimes destinées à recruter des passeurs de fonds, parfois dans les pays occidentaux, dont beaucoup travaillent involontairement pour de fausses entreprises créées par des gangs criminels.
  • Dans d’autres cas, certains gangs ouvrent des comptes bancaires légitimes pour servir de destinataires de fonds volés, parfois des mois avant un piratage, pour donner plus de légitimité aux comptes. Lorsque les banques appliquent une politique de connaissance du client (KYC) et font preuve de diligence raisonnable lors de l’ouverture de nouveaux comptes, certains groupes criminels recrutent des initiés dans les institutions financières pour échapper à ce processus ou le compromettre.
  • Certains gangs ont également eu recours à des sociétés écrans établies dans des territoires étrangers, pour éviter les sanctions internationales. La plupart de ces sociétés écrans sont souvent établies dans des juridictions connues pour leur forte législation en matière de secret bancaire ou pour leur mauvaise application des réglementations sur le blanchiment d’argent.
  • Les gangs qui manipulent des fonds volés aux distributeurs préfèrent généralement traiter avec des entreprises de vente au comptant, où ils peuvent acheter des produits coûteux pour les revendre plus tard.
  • Les casinos sont également devenus un excellent moyen de blanchiment d’argent, car les escrocs achètent des jetons de pari avec les fonds volés, puis reconvertissent les jetons en monnaie fiduciaire pour obtenir un chèque portant le nom du casino, ce qui représente une transaction/source légitime des fonds.

Source : ZDNet.com

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